Lorsqu'Astal pénétra dans la boutique le lendemain matin, elle fut surprise d'y trouver Livaï déjà à pied d'oeuvre, perché sur l'escabeau.
- Mais vous êtes pas croyable ! , houspilla-t-elle. Vous ne pouviez pas m'attendre avant de commencer ?!
- T'avais qu'à traîner ton cul jusqu'ici plus tôt.
Sous la violence cinglante de la répartie, Astal écarquilla les yeux avant qu'un éclat de rire jaillisse de sa gorge.
- Je vois que vous êtes en forme ce matin, patron ! , railla-t-elle.
- Et j'aimerais le rester le plus longtemps possible, alors ferme la et active toi !
- Bien, chef ! , lança-t-elle d'un air pompeux avant de se diriger vers l'arrière boutique pour y déposer ses affaires.
Lorsqu'elle revint dans la pièce principale, la jeune femme installa son enceinte sur le comptoir bâché et, comme la veille, se mit en quête d'une musique susceptible de meubler agréablement le silence gêné qui risquait de s'installer entre eux.
- Qu'est-ce que tu fous, merdeuse ? , demanda-t-il du haut de son escabeau.
- Je cherche l'inspiration ... , marmonna Astal concentrée, le nez froncé au dessus de son téléphone.
Elle ne reçut qu'un claquement de langue agacé en guise de réponse, avant que le jeune homme descende de son perchoir pour s'approcher d'elle.
- File-moi ça, je m'en charge, grommela-t-il en lui prenant son portable des mains. Toi, occupe toi plutôt de ton mur.
Astal s'exécuta en se pinçant les lèvres pour ne pas pouffer une fois de plus et risquer de s'attirer à nouveau les foudres matinales du gérant. Alors qu'elle versait une bonne quantité de peinture dans son bac, son regard, à la dérobée, retourna machinalement se poser sur Livaï. Celui-ci pianotait sur son téléphone, la mine sérieuse. Pour les travaux du jour, il avait enfilé un pantalon de jogging noir et un t-shirt bleu passé qui s'accordait dangereusement à l'azur glacé de ses yeux. L'attention de la jeune femme s'accrocha irrésistiblement à la silhouette galbée et athlétique de cet homme qui ne dépassait probablement pas le mètre soixante. Contrairement à Marc qui utilisait sciemment sa plastique avantageuse pour éblouir et séduire son entourage, celle de Livaï était chargée d'une sensualité qui s'ignorait complètement. A n'en pas douter, pensait Astal, il devait même s'en foutre royalement.
Tout à coup, quelques notes de musique brisèrent le charme, forçant la jeune femme à sortir de la torpeur de son exquise contemplation. Elle reconnut immédiatement la mélodie diffusée par l'enceinte.
- Pink Floyd ! , annonça-t-elle dans un sourire triomphal.
Livaï se tourna vers elle, un air de défis luisant au fond de son regard.
- Quel album ?
- The dark side of the moon. 1973.
Un léger sourire releva soudain le coin des lèvres du jeune homme :
- On dirait que t'es pas un cas si désespéré que ça, merdeuse , railla-t-il avant de remonter sur son escabeau.
Une douce chaleur irradia aussitôt dans la poitrine de la jeune femme, qui se répandit paisiblement dans toute sa cage thoracique. Au même instant, la rythmique planante de Breathe s'éleva dans la pièce. Son bac de peinture à la main, Astal posa à nouveau les yeux sur l'homme affairé à peindre son pan de mur. Elle sourit en réalisant que, paradoxalement, cette mélodie allait comme un gant à cette boule de nerfs acariâtre. Le concerné, alerté par le silence dans son dos, jeta un coup d'oeil par dessus son épaule pour vérifier ce que faisait son employée qui n'avait pas bougé d'un pouce.
VOUS LISEZ
Le bruit du monde (Livaï x OC)
FanfictionAstal vient de déposer ses valises à Trost. Dans l'anonymat de cette bourgade où personne ne l'attend, la jeune femme n'espère qu'une chose : se reconstruire et trouver la force d'un nouveau départ. Rapidement, ses pas l'amènent à pousser la porte d...