Le feu et l'ombre

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Les premières lueurs de l'aube se frayèrent un chemin à travers la persienne et caressèrent le visage endormi d'Astal. Celle-ci fronça le nez et émit un grognement avant d'ouvrir deux paupières gorgées de sommeil. Son attention fut immédiatement captée par le vide à ses côtés. 

Livaï ? 

La jeune femme se redressa sur un coude et jeta un regard à la ronde. Personne. La chambre était aussi désespérément vide que ne l'était sa poitrine à cet instant. Livaï s'était volatilisé. Il avait pris la fuite aussi furtivement qu'un chat farouche à la fierté blessée.   

Je suppose que c'était inévitable, songea-t-elle, un pincement au cœur.

Elle soupira, laissa choir sa tête sur l'oreiller moelleux et rabattit son bras sur ses paupières closes. Dans une ivresse mêlée d'inquiétudes, elle fit défiler devant ses yeux les images de la veille et rejoua le film de leurs ébats. Ces instants précieux, aussi suaves furent-ils, restaient menacés par la complexité de leur relation et par l'ombre que leurs démons respectifs étendaient sur elle. Astal en avait encore eu la confirmation hier soir.

Hier soir. 

Après l'avoir déposé au creux de son lit, Livaï avait poursuivi sa tendre besogne, ses mains et ses lèvres arpentant avec délicatesse et avidité chaque parcelle de sa peau offerte à nue. Il avait encore fallu d'interminables détours et quelques tentatives d'approches indécises avant que le jeune homme n'ose effleurer sa poitrine. Ses doigts s'y étaient aventurés comme on pénètre un lieu saint : avec crainte et dévotion.  Puis, avec d'infinies précautions, ses paumes avaient délicatement enclos ses seins avant que ses lèvres ne s'y déposent à leur tour. Au milieu des frémissements que ces caresses lui avaient arrachées, Astal était restée stupéfaite. Abasourdie. Émerveillée. Sous les touches pourtant maladroites de son amant, elle avait réalisé que jamais auparavant elle n'avait ressenti de la part d'un homme autant de tendresse et de bonté à son égard. Jamais Marc ne l'avait caressé ainsi. Jamais il n'avait eu dans ses mains ni dans son corps ce pouvoir de la faire sentir si précieuse, si désirée. Si aimée. 

Lorsque les lèvres de Livaï avaient progressé pour conquérir son bas-ventre, le corps d'Astal s'était cambré de désir. Elle avait murmuré son nom d'une voix mourante, dans une supplique brûlante, et cette simple évocation avait suffit à ramener les lèvres de son amant contre les siennes. Sous l'impulsion d'un appétit pressant - et tandis que Livaï approfondissait leur baiser - la jeune femme avait forcé le jeune homme à se redresser et s'était attelée à lui ôter son pull. Elle aussi désirait sillonner ce corps, en prendre possession, tout en le couvrant de ces gestes qui crieraient son amour. Leurs lèvres avaient du se quitter quelques instants au passage du vêtement mais pour mieux se retrouver ensuite, dans une avidité décuplée. Le spectacle qui s'était alors offert à elle l'avait laissé parfaitement abasourdie. Astal n'avait jamais été de celles qui accordent trop d'importance à la plastique masculine. Et pourtant, celle qui s'était offerte à ses yeux en cet instant l'avait paralysé dans un accès d'ébahissement. Ce corps ne semblait avoir d'égal que les plus belles sculptures de Michel-Ange. Robuste et athlétique sans être massif. Puissant. La pâleur de sa peau était zébrée ci et là par quelques cicatrices, moins impressionnantes que la balafre qui lui fendait le visage. A cette vue, l'avidité d'Astal s'était embrasée forçant ses lèvres à s'emparer de sa pomme d'Adam avant d'obliquer vers son torse. 

Il ne lui avait pas fallu longtemps avant de comprendre qu'elle ne serait jamais rassasié de cet homme, dont les mains jouaient dangereusement aux creux de ses reins. La faim avait grondé, enflé, jusqu'à lui ravir tout espoir de répit. Elle lui arrachait même - à intervalles de plus en plus rapprochés - des soupirs de supplicié. Astal avait du se rendre à l'évidence : seul Livaï pouvait mettre fin à son tourment. Alors, dans une précipitation fébrile, la jeune femme s'était attaquée à la boucle de sa ceinture, puis à l'attache de son jeans. Quand le dernier bouton avait cédé, elle avait jeté un regard brûlant au gérant. Mais le voile de désir qui embuait ses pupilles l'avait empêché de voir l'ombre terrible qui venait de faire vaciller celles de Livaï. Le jeune homme s'était figé, les traits crispés par une torture d'un tout autre genre. Cela, Astal ne l'avait pas vu et était retournée à l'objet de son désir, glissant déjà une main sous l'élastique de son boxer noir. 

Le bruit du monde (Livaï x OC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant