Chapitre 50 : S U L K S

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« Éos ? On pensait que tu étais déjà rentré, on a vu ta voiture. »

Le grand-père d'Andrea ouvre la porte un peu plus grand et se décale sur le côté pour me laisser entrer.

« Ouais, non, j'étais parti à pied. » Baragouiné-je un peu dans ma barbe, gêné.

« Sous cette pluie ? Oh mais mon pauvre petit, tu dois être frigorifié. Va vite prendre une douche pour te réchauffer. » Avise Maryse en m'offrant un sourire doux dont seules les grand-mère semblent avoir le secret.

Je hoche la tête et monte les escaliers d'un pas rapide. Je jette un œil à la salle de bain et passe devant sans m'arrêter. Je continue jusqu'à la chambre d'Andrea, frappe quelques coups à la porte close, et quand il l'ouvre, je remarque immédiatement -à ses yeux encore un peu rouges et boursouflés- qu'il a pleuré.

Merde quel con...

« Je... tu m'en veux ? » Demandé-je maladroitement sans oser de nouveau croiser son regard.

« J'en sais rien. Peut-être un peu, oui je crois. »

« Ouais, normal. »

Il a toutes les raisons du monde de m'en vouloir, je n'ai absolument pas été à la hauteur.

« Je ne t'en veux pas parce que tu étais mal, ni parce que tu m'as laissé en plan, mais parce que tu m'as fait une crise de jalousie devant tout le monde, et que je me suis senti hyper mal, honteux, limite coupable, alors que je n'avais absolument rien fait, quoi tu aies pu t'imaginer. Soyons clairs, on est ensemble, c'est une chose et j'en suis archi fier, mais retiens bien une autre chose, jamais tu ne m'empêcheras de voir mes amis, pour quelque raison que ce soit, pour une quelconque jalousie ou autre, jamais. »

« Bien sûr, j'ai été con. Je... je suis désolé. »

« Je sais que tu t'en veux. Parce que tu as très bien vu que tu avais fait une connerie mais je ne veux jamais que ça ne se reproduise, tu m'entends, jamais. Je ne te laisserais pas me faire choisir entre toi et mes amis, sous prétexte que tu viens de développer une toute nouvelle jalousie que tu n'avais jamais ressentie avant. »

Je baisse les yeux et acquisse, quelques gouttes de pluie dégoulinant encore de mes cheveux jusqu'à mes joues, à moins que ce ne soit des larmes.

« Ok alors maintenant va prendre une douche avant de tremper toute la maison. » Sourit-il en passant une main dans mes mèches brunes. Il ajoute en avisant ceux-ci : « Tes cheveux ont poussés, tu devrais penser à les recouper un peu. »

Je sais qu'il dit seulement cela pour détendre l'atmosphère après sa petite remontrance à peine dissimulée alors je souffle avec un petit sourire triste :

« Ouais, j'y penserais... »

Il attrape ma main dans la sienne.

« Si tu veux on peut s'occuper de ça demain, comme ça on passe l'après-midi ensemble et on oublie ce qu'il s'est passé ce soir. »

Je hoche une nouvelle fois la tête et dépose un baiser sur sa joue pour me faire pardonner.

« Ouais on peut faire ça, ce serait sympa. »

Puis je fais demi-tour et me dirige vers la salle de bain. Je ne perds pas de temps sous la douche, déjà par habitude, mais aussi parce que ce n'est pas moi qui paye l'eau et que ça me met toujours aussi mal à l'aise.

En sortant de la pièce, après avoir ouvert la petite fenêtre en oscillo-battant pour faire évacuer la vapeur d'eau présente dans la pièce, je jette un œil vers la porte -fermée- de la chambre de mon châtain et prend le sens inverse pour retourner vers la mienne. Je pense que ce soir nous avons tous les deux un grand besoin de nous reposer, d'être à seul et de réfléchir. J'ouvre la porte et me laisse tomber sur le lit avant de me relever un peu précipitamment, un objet dur dans mon dos me gênant. Je passe une main sur le matelas, pour récupérer l'objet en question. Il ne s'agit de rien d'autre que mes clefs de voiture, à l'anneau desquelles pend un petit porte-clefs nounours que je reconnais bien. Le tout est accompagné d'un petit mot manuscrit laissé sur un post-it, tout à fait le style de procéder d'Andrea.

''La prochaine fois que tu veux m'offrir quelque chose, fais-le proprement au lieu de le jeter par terre.''

Je dépose mes clefs sur le petit tabouret qu'Andrea a pausé à côté du futon pour faire office de table de nuit. Je me rallonge et rabat les couvertures sur moi. Pour la première fois depuis que je dors ici, je ressens un peu le manque. Cela fait un petit moment que je n'ai plus dormi seul, sans Andrea, ni même la présence rassurante de Ganesh ou Pimousse qui sont pour le premier sans doute à vagabonder dehors, et le second semble préférer la présence d'Andrea à la mienne. Enfin bref, je ne vais pas me lancer dans le sentimental maintenant, je me sens déjà bien assez mal à cause de mes crises de larmes ou de colère de ces dernières semaines, j'avale mon traitement du soir, avec le nouveau dosage que le médecin m'a prescrit, juste avant d'éteindre la lumière. J'ai vraiment l'impression d'être un drogué, mais c'est encore plus douloureux que quand je l'étais réellement, parce que désormais je me rends compte de tout, de tout ce qu'il se passe et d'à quel point j'ai pu tomber bas, d'à quel point il va être compliqué de remonter.

Je prends alors une grande résolution, pour laquelle je n'attendrais pas la nouvelle année : demain je vais retourner à l'hôpital et tout expliquer au docteur Duflot au sujet de mes autres addictions, même si cela me coûte de finir la cure entre les murs blancs de l'hôpital. Ce qu'il s'est passé aujourd'hui ne doit pas se reproduire, jamais. Je ne veux pas être de ceux qui dès qu'ils sont en couple tentent de contrôler le moindre mouvement de leur partenaire, je déteste cela.

Cette nuit-là, j'ai peiné à trouver le sommeil, encore plus que d'habitude, j'ai pensé un instant rejoindre Andrea, mais je me suis retenu, effrayé à l'idée de réveiller quelqu'un dans la maison si paisible, ou tout simplement qu'il ne veuille pas de moi, qu'il me rejette. Il aurait toutes les raisons du monde de le faire...

_🐛_

J'aime bien ce chapitre, je sais pas trop pourquoi mais ouais, j'l'aime bien.

Et vous ?

Avec amour et dévotion,

Paradoxalementparadoxale.

𝐴𝑢 𝑚𝑖𝑙𝑖𝑒𝑢 𝑑𝑒𝑠 𝐸𝑐𝑙𝑎𝑡𝑠, 𝑝𝑜𝑢𝑠𝑠𝑒𝑛𝑡 𝑞𝑢𝑒𝑙𝑞𝑢𝑒𝑠 𝑓𝑙𝑒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant