En sortant de chez mon père, je me sentais comme après un moment charnière, ce genre de moments que l'on sait importants avant même de les avoir vécu. Une page venait de se tourner, et ce bien plus délicatement que ce que je l'aurais cru, sans se déchirer ou même se froisser, s'effriter. Et quand je respirais, c'était comme si mes poumons se remplissaient d'air pour le première fois, comme si tout était devenu indéniablement plus simple. Andrea et moi sommes rentrés chez ses grand-parents et avons tout de suite préparé notre valise pour aller chez son frère, dans quelques jours. Et ce voyage me paraissait beaucoup moins effrayant à présent, je me sentais prêt à épauler Andrea pendant celui-ci, comme il l'a fait pour moi avec mon père.
Nous prenons l'avion cet après-midi et Andrea en est tout excité. Il adore l'avion. Moi, ça me fait flipper. Son papy nous a proposé de nous déposer à l'aéroport en temps voulu. Soit quelques heures qui passent rapidement, nous laissant juste le temps de manger un plat de lasagnes préparé par Andrea. Selon lui, c'est la recette de son ami Kayssi et c'est aussi la meilleure qu'il n'ait jamais gouté. Il a raison, elles ne sont vraiment pas mauvaises.
Arrivées à l'aéroport, Andrea et moi allons faire enregistrer notre unique valise puis empruntons le couloir qui mène à la porte d'embarquement trois. On s'assoit, sur les chaises inconfortables en métal froid qui remplissent la salle, et Andrea pose sa tête sur mes genoux.
« Ça ne te dérange pas si je dors un peu ? On va avoir pas mal d'attente. »
« Non, vas-y. »
Je passe une main dans ses cheveux châtains et il ronronne presque de plaisir en fermant les yeux. Parfois il m'arrive d'oublier à quel point il peut se montrer adorable, et d'en être pris totalement au dépourvu. Je continue mes petits mouvements sur son cuir chevelu et demande :
« Combien de temps dure le vol ? »
« 11h. »
« Autant ? Alors on va passer la nuit dans l'avion ? Et il y a des toilettes ? »
« Oui. »
« Oui à quoi ? »
« A tout. »
« Et si il y a des turbulences ? »
Il lève son regard vers moi en riant.
« Tu as peur ? Les grosses turbulences sont rares, ne t'en fait pas. Et puis si tu as peur, je te tiendrais la main. »
Je dépose un baiser sur sa joue.
Quelques temps plus tard, alors que la nuit commence à tomber, la voix mécanique de l'hôtesse annonce que notre vol vient d'arriver.
Je réveille doucement Andrea en le secouant par l'épaule et je l'aide à se relever.
« C'est l'heure. »
Il acquiesce en baillant et nous avançons vers le couloir des embarquements. Nous traversons une sorte de d'accordéon qui débouche directement contre la porte de l'avion. Andrea entre le premier et montre les tiquets à l'hôtesse de l'air qui nous indique l'emplacement de nos sièges. On est juste derrière les ailes, et Andrea me laisse la place près du hublot. Quelques minutes plus tard, après les consignes de sécurité qui ressemblent plus à une énumération sans fin de toutes les pannes et problèmes que l'on est susceptibles de rencontrer, l'avion se met à doucement rouler sur le tarmacadam pour rejoindre la piste de décollage. Il prend peu à peu de la vitesse et je dois dire que je ne suis pas trop en confiance, puis il commence à s'incliner, et décolle du sol. Je regarde par la petite fenêtre ronde notre ville et ses lumières s'éloigner, et je ressens comme une petite euphorie en moi. C'est la première fois que je vais voyager, que je quitte la France, et j'ai l'impression d'être un enfant la veille de Noël. Et quelque part, ça fait du bien.
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𝐴𝑢 𝑚𝑖𝑙𝑖𝑒𝑢 𝑑𝑒𝑠 𝐸𝑐𝑙𝑎𝑡𝑠, 𝑝𝑜𝑢𝑠𝑠𝑒𝑛𝑡 𝑞𝑢𝑒𝑙𝑞𝑢𝑒𝑠 𝑓𝑙𝑒
Teen Fiction-Suite de Comme un papillon dans un bocal, attention, ce résumé peut contenir des spoils du tome 1- Cela va faire un an. Un an qu'Andrea est sorti de la vie d'Éos, et un an qu'il ne le sort plus de sa tête. De l'autre côté de l'Atlantique, le châta...