Guillaume inséra la clé dans la serrure de la porte d'entrée tout en jetant un coup d'œil discret à son colocataire et meilleur ami, complètement silencieux à ses côtés. Aurélien avait le regard baissé et il fronça les sourcils, se demandant s'il n'avait pas poussé la moquerie un peu trop loin sur le chemin du retour. Il ouvrit enfin la porte de l'appartement et se dirigea directement vers le salon, afin de poser les rollers de son ami à côté de la petite table basse. Aurélien l'y suivit et quand il fut à sa hauteur, Guillaume se tourna vers lui et le dévisagea sérieusement.
« Ça va, Orel ? Ça fait longtemps que je t'ai pas entendu. »
Aurélien haussa seulement les épaules d'un air las et se dirigea vers sa chambre.
« Orel, l'interrompit Guillaume. Tu vas où là ? »
Le plus jeune s'arrêta et se tourna vers lui, un air impassible qui ne trompait personne sur le visage.
« Dans ma chambre. Ça s'voit pas ?
— T'as rien à faire là-bas. Tu vas me faire le plaisir d'aller panser tes plaies.
— Arrête, c'est rien.
— Si c'tait rien, j'aurai pas porté tes rollers à ta place jusqu'à l'appart. »
Guillaume crut apercevoir le plus jeune serrer brièvement la mâchoire et il soupira :
« Tu t'changes en tenue d'intérieur et tu m'rejoins dans le salon. Pas d'négociation possible. »
Il le vit ouvrir la bouche comme pour rétorquer quelque chose mais Aurélien tourna alors les talons et disparut dans sa chambre. Guillaume soupira et se dirigea vers la salle de bains afin de prendre de quoi soigner le plus jeune. Il leva les yeux au ciel en s'entendant se demander intérieurement à quel moment il était devenu si maternel et protecteur envers son ami. Peut-être depuis qu'il avait comprit ses sentiments pour lui ? Oui, ça semblait la bonne solution.
***
Il eut tout juste le temps de s'asseoir sur la table basse en face du canapé, la petite trousse à pharmacie rouge que leur avait offert Skread à leur crémaillère à ses côtés, qu'Aurélien sortit de sa chambre. Le plus jeune le rejoignit rapidement et, après un coup d'œil furtif dans sa direction, vint s'asseoir sur le canapé, face à lui. Guillaume l'observa attentivement, dans son short de pyjama délavé, et grimaça en apercevant ses genoux. Ceux-ci avaient plutôt l'air bien éraflés, si la rougeur présente sur ceux-ci signifiait quelque chose. Il s'en voulu presque aussitôt de s'être moqué de son ami quand il l'avait vu se ramasser au sol.
« J'suis désolé d'm'être moqué, Orel. Ça te fait beaucoup mal ? »
Aurélien qui avait les yeux au sol resta silencieux un moment avant de hocher lentement la tête.
« Ça... pique, murmura le plus jeune. Et ça... me brûle... »
Aurélien lui montra ses paumes, rouges tout comme ses genoux, et Guillaume fit une moue désolée.
« Je vais te soigner, Orel. T'as encore de la poussière là... » dit-il en prenant délicatement ses mains dans les siennes et en soufflant doucement dessus.
Il entendit le plus jeune renifler et il releva le visage, surpris. Il ne pouvait pas être en train de pleurer, si ? Il savait que son ami était sensible. Depuis qu'il l'avait rencontré il y a deçà trois ans, il l'avait comprit. Mais au point de pleurer à cause d'une chute à roller ? Vraiment ?
« Qu'est-ce qu'il y a, Orel ? demanda Guillaume en caressant sa paume rougie de son pouce d'un geste distrait.
— J'ai mal... murmura Aurélien dans un sanglot.