« Orel...!! »
Guillaume courut dans sa direction dès qu'il aperçut son ami, assis sur une chaise près du camion d'ambulancier. Ce dernier ne releva même pas la tête, sûrement encore en état de choc, et il remarqua la couverture de survie dorée avec laquelle on lui avait recouvert les épaules. Aurélien avait les yeux dans le vide, complètement perdu au monde qui l'entourait, et Guillaume se précipita vers lui. Il s'accroupit à même le sol, se mettant ainsi à niveau pour chercher son regard perdu dans le vague.
« Orel, c'est moi, c'est Gringe. » murmura-t-il en posant une main délicatement sur la jambe de son ami.
Il commença à caresser doucement sa cuisse à travers son pantalon, sur lequel il pouvait apercevoir une tache de sang séché. Ce léger contact sembla faire revenir le plus jeune au monde réel et ses yeux, auparavant perdus dans le vague, se déplacèrent lentement jusqu'à son visage. Son regard croisa le sien et Aurélien ne parut qu'à cet instant retrouver pieds avec la réalité.
« Gui...llaume...? dit le plus jeune dans un souffle, plissant légèrement les yeux comme si se rappeler de qui il était lui demandait un effort incommensurable.
— Oui, c'est moi, sourit doucement Guillaume en pressant une dernière fois sa cuisse à travers son vêtement, avant de venir attraper sa main. Comment tu te sens, Orel ? »
Aurélien écarquilla légèrement les yeux à sa question et il eut l'impression en voyant les traits de son visage se contracter qu'il se repassait la scène tout d'un coup en tête. Des larmes apparurent au coin de ses yeux et Guillaume s'insulta mentalement.
« J'ai failli... mourir... » dit Aurélien d'une voix étranglée, prononçant le dernier mot dans un sanglot.
Guillaume se releva et l'attira à lui pour lui faire un câlin rassurant.
« C'est fini maintenant, Orel. C'est fini, lui chuchota-t-il en caressant doucement le haut de son dos.
— L'accident... J'étais en train de rouler... le vélo... se mit à pleurer le plus jeune et Guillaume vit du coin de l'œil ce dernier au sol. Et la voiture... Elle m'a pas vu... Et elle m'a percuté...
— Je sais, mon chat, viens-là... soupira Guillaume en le serrant un peu plus fort contre lui. Mais c'est fini, je suis là, tout va bien. Je vais m'occuper de toi, Orel...
— J'ai eu... peur...!! » pleura de plus belle le plus jeune en s'accrochant à son tee-shirt comme si sa vie en dépendait.
Guillaume ferma les yeux, serrant le plus jeune dans ses bras. Il sentit ses yeux le piquer, signe qu'il était sur le point de pleurer lui aussi. Mais il ne le pouvait pas, il voulait rester fort pour Aurélien. Son cœur le faisait souffrir atrocement, serré comme il était dans sa poitrine. Sa gorge était nouée, son cœur battait bien trop rapidement par rapport à d'habitude. Il avait eu peur. Peur de le perdre. Les ambulanciers qui s'occupaient de son ami avaient trouvé son numéro de téléphone dans les « contacts favoris » du portable du plus jeune et l'avaient prévenu. Ils lui avaient dit que son ami avait eu un accident en rentrant en collision avec une voiture et Guillaume avait perdu momentanément pieds avec la réalité, en pensant que Ça y est. Orel est mort. Mon meilleur ami, la seule personne assez importante pour moi dans ce monde, cet enfant si innocent que j'aime tant... Et je n'ai pas eu l'occasion de lui dire ce que je ressentais pour lui. Il était revenu à lui en entendant l'ambulancier répéter son nom de famille en boucle, Mr Tranchant ?, et il lui avait dit que son ami n'avait rien de grave. Qu'il avait seulement des blessures superficielles et était momentanément en état de choc dû à l'accident. La personne qui lui était rentrée dedans était partie avant leur arrivée, redoutant sans doutes des représailles, et les avait seulement prévenu de la collision. Est-ce qu'il pouvait venir le chercher ? Bien sûr qu'il pouvait venir le chercher.