Ventisette

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La main sur le coeur, Donna Gíno semblait faire une violente crise, elle respirait fortement, les yeux grands ouverts traduisant parfaitement son choc. Vu son état, Salva se précipite vers sa mère, s'inquiétant de plus belle. Une voix grave aux intonations brutales attira son attention :

— Lâche la misérable ! C'est toi qui a mit ta pauvre mère dans cet état !

Son père avait apparu quelques minutes plus tard, arborant cette même expression de visage froid et inébranlable. Il l'impressionnait, mais pas dans le bon sens, il la terrifiait, c'était son pire cauchemar et ça, depuis son enfance. Sa taille élancée, son chapelet enroulée sur son cou et ses accoutrements noirs de la tête au pied lui donnait une carrure machiavélique.

Sa mère alla reprendre sur elle même, assise sur une chaise non loin de la scène : Le père Gíno, face à sa pécheresse de fille, se confrontant par des regards à milles sens.

— J'espère que tu es juste revenu chercher tes affaires.. Annonce t-il, sans une hésitation dans la voix.

Son mal être est palpable, il traverse sa chair et son esprit, cette situation, elle en avait rêvé des nuits et des nuits. L'insensibilité de son géniteur la donnait froid au dos, elle était vraiment là, se faisant rejeter par sa propre famille.

— Pourquoi tu nous as fais ça Salva ? Pleurniche sa mère

Les sanglots apparents dans la voix de la Donna tordaient ses entrailles et son cœur, la douleur trop évidente de sa mère remettait en question ses choix, ses décisions, se demandant si elle n'avait pas gâché sa vie inutilement.

— Je ne vous ai rien fait, c'est vous qui ne m'aimez pas, parce que n'importe quel parent aimant même un minimum son enfant, l'accepterait malgré tout..

— Mais ma fille, ton discours ne tiens pas la route. Ce n'est pas naturel, tu n'auras jamais d'enfants.. Continu t-elle

— Qui t'as dis que j'avais envie d'enfants ? Tu n'en sais rien, on en a jamais parlé. Tout ce que vous savez faire c'est planifier la vie des autres à leur insu.. Jamais de ma vie je n'ai aimé faire des études de lettres, ce qui m'intéresse moi c'est la cuisine, j'adore cuisiner, me retrouver autour de différents aliments mais ça, vous me l'avez formellement interdit, assez c'est assez.  Pardonne moi Ricardo de ne pas être comme tu veux, mais j'aime cuisiner et j'aimerais toujours les femmes, et ça, tu le sauras jusqu'à ta mort, qui j'espère est proche.

Comme la dernière fois, il fit voltiger sa paume jusqu'à la joue de sa fille, créant une nouvelle fois un gloussement insupportable de la mère de Salva. Mais cette fois-ci, elle n'allait pas faire la victime et ne rien dire.

— Je te hais, je te hais depuis ma conception, je suis née en te haïssant, j'ai grandi en te haïssant, tu as toujours été le premier obstacle dans ma vie, je maudissais ta vie et ton existence à chaque fois que tu tournais le dos. Tu n'es qu'un radicaliste sexiste, un raciste sans vergogne, tu rassemble en toi seul tous les défauts du monde, tu ne mérites ni l'amour ni la paix de l'âme, maman reste avec toi parce que c'est une soumise, elle n'y peut rien puisqu'elle ne travaille pas à cause de toi, tu la retiens par ton statut social et puis, quel statut ? Toutes ces personnes qui t'idolâtre à la cathédrale  n'ont même pas une infime idée de qui tu es réellement. Maudit sois le jour où ma mère t'as rencontré.

Un silence tomba entre les deux, puis, sans même grimacer il dit :

— Et moi je maudis le jour où Sergio est mort au lieu de toi.. Ne te considère plus comme ma fille.

— Ça fait longtemps que je ne te considérais plus comme mon père. 

Les larmes accumulées sous ses cils, c'est avec la vision trouble que Salva quitte son domicile, peut-être pour la dernière fois.

Signorina Salva Où les histoires vivent. Découvrez maintenant