Venticinque

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— Alaïs ? Je ne pensais plus que tu allais venir..

Stoïque,figé, et rongé dans chaque millimètre de sa chair par un sentiment de frisson inouï, elle n'arrivait ni à placer un mot, ni à bouger d'un seul centimètre. Dans sa rêverie, elle constata que la jeune femme en face d'elle avait laissé ses cheveux poussés, ils étaient plus beaux, plus brillants, sa mine était tout aussi fraîche, elle semblait bien dans ses baskets apparemment. Et puis ce visage qu'elle avait tant vénéré, rêvé, idéalisé, chérie, était là face à elle, on lui aurait dit qu'il n'allait plus jamais l'appartenir, elle aurait maudit cette personne et sa descendance jusqu'à la sixième génération.

— Tu peux entrer... Dit-elle, légèrement gênée.

Tel une machine, elle déplace ses jambes automatiques jusqu'à l'intérieur de cette appartement deux pièces.

Après un silence Jules dit :

— Cette nouvelle coiffure te va vraiment bien, je te trouves vraiment belle.

— Et toi t'as finalement laissé pousser tes cheveux, pourtant je te l'avais tant demandé auparavant.. Lui reprocha t-elle

La jeune femme ne su quoi répondre à cela et resta silencieuse, pendant qu'Alaïs scrutait entièrement l'appartement. C'était la surcharge émotionnelle, elle étouffait à l'intérieur, c'était bien trop insupportable de se retrouver là. Rien a changé, même pas de position. Le clic clac brun et usé se trouvait toujours au milieu de la pièce, les meubles pareil, la mini cuisine au fond de la pièce de vie, même son manteau rose fuscia – son préféré – était toujours accroché au porte manteaux qu'elles avaient installées ensemble, parce que jules avait quelques fois des tendances bordéliques. En faite , c'était elles qui avaient aménagé tout cet appartement, c'était leur appart, c'était le QG de leur relation. Puis, sans réfléchir, elle se déplace lentement jusqu'au fond de la pièce, juste près de la fenêtre – qui avait toujours le don de lui donner des vertiges à cause de la hauteur – leva doucement la couverture blanche dont la poussière avait transformé en kaki, pour découvrir ce piano, ce fameux piano. Elle ne pu s'empêcher de verser des larmes quand elle vit le mot qu'elle même avait écrit au feutre deux ans auparavant : « À la meilleure pianiste du monde, je t'aime à l'échelle de la Voie lactée».

Tu as préparé ton coup pour que je te supplie de me revenir ? Pourquoi tu gardes tout ça ? Tu ne sais que me faire du mal, pourquoi tu reviens, pourquoi tu m'appelles encore ? Dit-elle  sanglotante, caressant du bout de son doigt cet écriteau criminel.

Chaque espace, chaque infime millimètre de cet appartement était un grimoire de souvenirs encore plus douloureux les uns les autres. Du canapé à la table basse, rien n'épargnait le coeur meurtri de cette américaine qui a le lourd fardeau d'être un peu trop vulnérable et sensible.

— Ce n'est pas fait exprès, c'est identique parce que je n'arrive pas à passer à autre chose.. Je suis borné, mes sentiments pour toi sont forts et réels, notre histoire a été la meilleure de toute ma vie, je ne peux pas te perdre..

Elle aussi s'était mise à pleurer, essayant légèrement de se rapprocher d'Alaïs, qui, n'avait pas toujours la force de la regarder dans les yeux.

— C'est fini maintenant, je ne te crois plus, tu n'es qu'une menteuse, Une manipulatrice sans sentiments. Si tu m'aimais tu ne m'aurais jamais laissé tomber pour une troisième fois ! Une troisième fois ! Quel genre d'être humain es-tu ??

Cette fois-ci, elle se tenait en face Jules, dévoilant son visage abattu et désespéré.

— Écoutes moi, écoutes, ce n'est pas ce que tu crois, je ne t'ai pas laissé tu m'entends ?? Je n'avais pas le choix, mes parents avaient prévu de m'envoyer dans une autre université en Australie, je n'avais pas le choix tu comprends ça ?

Signorina Salva Où les histoires vivent. Découvrez maintenant