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Lily

Lundi

Je me réveille en sursaut, retour brutal à la réalité, cette nuit, ce n'était pas mon oncle qui bouffait mon cerveau, mais mes parents. Lorsque mon sommeil est hanté par mon oncle, c'est presque avec plaisir que je retourne à la réalité, mais lorsque je rêve de mes parents, tout me semble atrocement plus dur au réveil. Purement et simplement parce qu'ils ne sont plus là, et que ma vie sans eux est un cauchemar éveillé. Je n'ai pas envie de me lever, pas envie de descendre et de me vêtir de ce masque qui me grignote l'âme à n'en plus finir. C'est un peu comme un tigre avec une bavette d'antilope sans fin, comme un puits sans fond dans lequel on tombe sans cesse, sans jamais heurter le fond. Mais, après avoir rassemblé mes esprits brouillés de fantômes, je décide que de toutes façons, je ne ferais pas longtemps ici, et donc que tant qu'à faire, je préfère montrer à ces connards que je suis plus forte que ce que j'en ai l'air. 

Je me lève, maquille mon visage fatigué et m'habille. J'enfile un pull en laine et un jean. Il fait chaud, mais peu importe, l'important, c'est que je sois à l'abri du regard des autres et que ma peau soit protégée des contacts inopportuns. Après, la littérature, je décide de profiter de mon heure libre pour aller lire en étude. Je m'assied donc seule dans un coin et m'enferme dans ma lecture quand une voix vient déranger ma concentration.

-Ca te tente un baby-foot? Me demande un garçon à la peau métisse et aux yeux bleus.

Je le regarde, mais les mots se bousculent dans ma bouche sans pour autant sortir, je n'arrive pas à parler.

-On doit être quatre pour faire une vraie partie ! Tu devrais venir! Surenchérit Rio, un nouveau comme moi.

J'ai envie d'accepter, de rire avec eux, de m'amuser, mais mon self-contrôle ne me le permet pas, je suis figée, à la recherche de la force pour répondre positivement à leur invitation. Au bout de deux minutes, ma tête finie par accepter de bouger et je leur signifie que j'accepte. Nous nous levons et croisons les filles d'hier. Les pimbêches se mettent à ricaner, et je ne réagis pas, hors de question de rentrer dans leur jeu, et puis, du moment qu'elles ne me touchent pas, je ne sortirais pas de mes gonds. Cependant, Marley sort les griffes à ma grande surprise. Je me demande si elles vont se sauter au visage, et j'aimerais réagir, lui montrer que c'est inutile, lui dire de ne pas se faire des ennemies pour moi alors même qu'elle ne me connaît pas, mais le contrôle me bouffe en essayant de me protéger. Je me noie dans un océan de mots et fini par renoncer à ma tentative de parler. Lorsque Rio et Isac finissent par calmer Marley, je susurre un merci, que je ne suis pas certaine qu'elle ai entendu, mais je le fais quand même, pour ma bonne conscience.

J'aime beaucoup les garçons, ils sont adorables, j'adore Rio, son rire est vraiment entrainant, il réussit même à m'arracher quelques gloussements. Marley est affreusement gentille et j'essaye de m'intégrer, et même de parler, il faut que mon armure tombe, ici, elle ne me sert à rien et me rendra plus vulnérable qu'autre chose.

[...]

-Tu veux manger avec nous ce soir ?

J'hésite quelques minutes, quand Rio ajoute.

-Ca serait cool que tu viennes, Lily.

Il ponctue ses paroles d'un sourire et je fonds littéralement, il est vraiment mignon. Je hoche la tête et lui rend son sourire ce qui me demande un effort considérable pour fendre mon masque. Tous trois m'adressent un grand sourire avant de sortir de la salle. Je me retrouve seule, attablée devant mon bouquin, et pour la première fois longtemps, je sens ce sentiment de solitude s'estomper, et je n'ai qu'une envie, retourner avec eux.

Cygnes, dans l'ombre, la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant