A l'abri pour un certain temps, je détaille ma planque. De la lumière naturelle entre par un large hublot. Nous nous situons donc contre le flanc du navire.
Sous mes yeux, le patrouilleur assis de force sur la cuvette des toilettes me toise d'un air colérique. Je ne lui laisse pas reprendre ses esprits. Je saisis son arme – une matraque électrique – et je l'allume. Elle crépite dans ma main. Puis, je l'approche de son visage. Il recule sa tête et se cogne contre le mur. Alors, il râle, mais il n'a pas le choix. Il est mon otage. Je peux en faire tout ce que je veux.
— Alors, tu fais moins le malin maintenant ?
— Tu ne perds rien pour attendre. Tu verras... Quand mes collègues mettront la main sur toi, tu ne joueras plus.
Je le frappe de ma main libre.
— Pour l'instant, c'est toi qui ne joues plus. J'en ai marre. J'ai été en détention pour une raison que je ne connais pas...
Il m'interrompt en ricanant.
— Certainement pour une bonne raison...
Je poursuis infatigablement.
— Et on n'a pas arrêté de me traquer depuis mon évasion. Maintenant, on me tire dessus à vue et on m'attribue des crimes que je n'ai pas commis ! C'est injuste !
Il ricane encore.
— Tu n'as pas encore compris ? Ici, la justice est uniquement du côté des Armateurs. Rends-toi, ça sera plus simple pour tout le monde.
Je repense aux dénonciateurs, aux habitants soucieux de trahir ma présence, aux collaborateurs avec les autorités.
— Pourquoi les gens sont-ils aussi rapides à dénoncer leurs voisins ? Pourquoi tout le monde se plie à cette dictature ?
Il me regarde d'un air narquois.
— Et comment en échapper ? Tu as une idée ? Tu sembles tout savoir sur tout. J'imagine que tu as une solution magique à proposer ?
Je le trouve même insolent, mais je ne peux m'empêcher de lui répondre.
— Il suffirait pourtant de quitter le REM !
Cette fois, il éclate de rire et n'en finit plus. Pour le calmer, je dois le frapper une nouvelle fois.
— Quelle blague ! Mais quitter le REM n'aurait aucun sens ! Ça serait pour aller où, en plus ?
J'hausse les épaules. Je ne connais pas le monde entier mais j'ai une petite idée sur la question.
— A terre, par exemple, pour commencer.
Il me fixe alors comme s'il avait devant moi un être venu d'une autre planète.
— Il n'y a plus de terre. Il n'y a que l'océan.
Je n'en crois pas mes oreilles.
— Ce n'est pas possible.
— Si. Uniquement la mer. Partout. Tout le temps.
J'imagine la situation : des navires immenses, comme des îles, éparpillés sur l'ensemble du globe.
— Dans ce cas, il faut se mutiner, saboter, rejoindre d'autres navires.
Il ricane encore.
— C'est rare, mais nous avons déjà accueilli des réfugiés. Ils disent tous la même chose : c'est pareil partout.
Je refuse d'y croire.
— Menteur !
— C'est ce qui se raconte, mais libre à toi de vérifier. J'imagine que les Armateurs pourront te le confirmer, quand on aura mis la main sur toi.
Je souris.
— Encore faudrait-il pouvoir m'attraper...
Il secoua la tête, le visage grave.
— Ça, ça va arriver, je peux te l'assurer. Tout est bouclé, le système est rôdé, tu ne peux pas fuir éternellement. Les patrouilleurs sont partout, les Armateurs ont des yeux dans tous les coins. Chaque couloir est scruté. Tu n'as aucun moyen de quitter leur surveillance.
Je comprends son explication. Effectivement, la vie à bord est comme un confinement sous les yeux scrutateurs et artificiels des caméras automatisées. Chaque pas est observé. On ne peut y échapper.
Mon regard se porte sur l'extérieur. Je pense à une idée. Ok, les coursives sont filmées. Ok, la coque au niveau des flots doit être surveillée pour éviter tout abordage. Mais plus haut ? Ont-ils disposé des caméras également partout sur la coque ? J'en doute fortement. Je perçois là une opportunité à saisir.
A suivre dans le chapitre 21 : un peu d'audace.
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Les Confinés
Teen FictionEn cette période de confinement, n'oublions pas que la situation pourrait être pire. Cette histoire visera à nous le rappeler sur le ton de l'humour et de la légèreté, à travers un récit haut en couleurs destiné en premier lieu à un public adolescen...