Finalement, la chance doit être de notre côté car nous parvenons à rejoindre le pont désiré. Nous quittons la cabine dans la précipitation puis nous éloignons de l'ascenseur au pas de course.
Ici, aucun garde, aucune menace, aucun envahisseur. Le tumulte de la bataille se fait plus distant mais ce n'est qu'une impression. Tout le navire est touché par les tirs de canons.
— Alex, nous sommes encore loin ? Je n'en peux plus...
L'inquiétude de Camille est le symptôme d'une situation générale. Camille verbalise le sentiment de tous.
— Nous y sommes presque. Courage. Encore quelques mètres.
J sort son petit commentaire.
— C'est dans les moments de difficulté que nous déterminons l'abnégation de chacun. La bravitude se calcule sur le baromètre individuel de l'attitude.
Je le dévisage avec une grimace.
— J, Le mot bravitude n'existe pas. C'est la bravoure.
J sourit étrangement.
— Je sais, mais sinon ça ne rimait pas.
Très bien. Dans une telle situation, J s'occupe encore de faire des rimes et de sortir des traits d'esprit. J veut peut-être détendre l'atmosphère. Décidément, J n'est pas une personne facile à comprendre. J a toujours exprimé ses pensées de façon complexe, voire compliquée, même incompréhensibles. J : trublion de la pensée !
Notre course folle nous mène à la coque, à l'écoutille où nous avons accosté. L'aviso est toujours amarré, sous la surveillance de nos amis. Nous nous précipitons et nous montons à bord. J reprend son rôle à la timonerie. Les autres l'imitent à leurs postes respectifs. Nous sommes fin prêts pour le départ.
Je lance alors quelques consignes dignes du capitaine d'un navire. Je n'ai pas la prétention de commander à mes amis, mais il faut coordonner le groupe.
— Larguez les amarres ! Tous à vos postes ! Quittons la proximité de l'AIR-PET-CET ! Nous allons nous faufiler entre les navires de l'UHESSA ! Soyez préparez au pire et ne faites aucun bruit ! Le silence sera notre arme ! Coupez toutes les lumières ! Nous allons devenir invisibles !
Devenir invisibles et silencieux au milieu de tout ce boxon n'est pas d'une difficulté terrible. Dans tous les coins, ça tire à la mitrailleuse. Dans un vrai boucan, ça canarde au canon. Telles des phares dans la nuit, de puissants projecteurs s'orientent vers la coque massive du navire amiral.
Dans notre fuite discrète, nous pouvons observer les flancs du gros paquebot : ils sont ravagés par les tirs, grêlés d'impacts et par endroits, enfoncés sauvagement par les plus puissantes frappes. Il peut encore naviguer mais il n'échappera jamais à ses poursuivants. L'AIR-PET-CET est piégé, sa flotte de soutien est absente et il ne peut s'enfuir. Tôt ou tard, il va devoir se soumettre.
Après quelques minutes, nous ralentissons l'allure car nous arrivons à proximité des agresseurs. La petitesse de notre aviso face à l'ampleur des navires de siège est une force. A rythme réduit, toutes lumières éteintes et silence complet à bord, nous nous faufilons à proximité. Nous respectons néanmoins une distance de sécurité.
Ainsi exécuté, notre passage nous permet de nous faufiler au nez et à la barbe des envahisseurs. Nous quittons le confinement imposé par leur blocus naval et nous nous libérons de l'étreinte tentaculaire de leurs machines de guerre par centaines.
Nous pouvons être contents de nous. Nous pouvons apprécier notre succès. Nous sommes parvenus à passer le barrage et j'avoue que ce n'était pas une mince affaire. En quittant le paquebot géant, je ne donnais pas cher de nos peaux. Je n'ai rien dit aux autres, mais je n'étais pas optimiste. La bataille promettait les plus grandes difficultés, mais nous les avons surmontées.
Nous attendons de nous être suffisamment éloignés puis nous laissons éclater notre joie. Avec Camille, nous nous embrassons. Avec les autres, nous nous congratulons. La nuit rôde autour de nous et nous isole des combats à l'horizon. Ils ne sont maintenant plus qu'un vague tumulte. Des éclairs brillent au loin mais ne représentent plus la moindre menace. Nous sommes hors de danger.
Cependant, nous ne sommes pas totalement à l'abri de toute menace, loin de là. Dès que le jour se lèvera, nous serons visibles. N'importe qui pourra fondre sur nous et nous capturer. La région n'est pas sûre et nous devons trouver une solution.
Le souvenir des Militants et de leurs navires rapides ressurgit dans ma mémoire. Nous devons tout faire pour éviter un nouveau drame de ce genre. Depuis mon réveil amnésique, j'ai vécu des choses terriblement douloureuses. D'enfermements en restrictions des libertés, je ne veux plus vivre ça, et tous à bord de l'aviso s'accorderont avec moi à ce sujet.
Non, nous devons nousassurer d'une liberté définitive. Pour cela, une unique solution s'offre ànous, mais encore faut-il pouvoir l'atteindre.
A suivre dans le chapitre 50 : l'île promise.
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Les Confinés
Teen FictionEn cette période de confinement, n'oublions pas que la situation pourrait être pire. Cette histoire visera à nous le rappeler sur le ton de l'humour et de la légèreté, à travers un récit haut en couleurs destiné en premier lieu à un public adolescen...