Chapitre 7 : Compter les secondes dans lesquelles tu me manque.

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J'avais beau avoir les cours le lendemain, ça ne me motivais pas plus pour dormir. Le sommeil ne venait pas car je pensais à Allan. Cette nuit, il partais en direction du nord alors que moi, je m’enracinais sur place avec mes regrets. Pourquoi est-ce qu'il ne m'avait pas dit qu'il m'aimait avant qu'il parte ? Avait-il déjà une idée derrière la tête et comptais-t-il revenir au plus vite ? Je l’espérais.

- Alors voilà, tout ça pour venir au faite que Allan a dû quitter l'école. Nous aurons bientôt un nouvel élève. En attendant, on a décidé de faire une carte de soutien à Allan, après l'incendie. Conclut la prof.

- On est obligé de signer ? Ricana un garçon populaire. Un rire collectif envahit la classe. Les seules qui ne rigolaient pas, c'était la prof et moi.

- Bien sûr. Même si vous ne le connaissiez pas bien, ça lui fera plaisir de voir un petit mot de soutien. Répondit-elle sur un ton bon enfant.

Elle avait l'air attristée elle aussi. Mais je la comprenais. Des fois, Allan discutais de tout et de rien avec elle et passait un peu pour le chouchou. Mais c'est normal quand on s'entend pas avec ceux de sa classe.

Et que dire de la manière dont il me manquait à moi ? J'aurais donné n'importe quoi pour qu'il soit là à mes cotés. J'avais envie de sentir sa présence car celle-ci, habituellement me rassurait. La solitude me rongeait.

Une lettre tournait alors sur les tables, pendant que le cours de français se passait. Tout à coup, le même malin que tout à l'heure demanda :

- Excusez-moi, l'adresse sur la carte, c'est l'endroit ou il va habiter maintenant ?

La prof paraissait agacée et acquiesça positivement.

- Comment ses parents peuvent vouloir aller habiter au nord du pays ? On doit se les geler là-bas.

Je me mordit les lèvres et tout le monde chuchotait en même temps en rigolant et lançant des blagues. La prof réclama le silence mais il mit pas mal de temps à revenir. Moi, la colère grimpa dans mon cœur, puis...Finit par déborder.

- T'est vraiment qu'un con !

Le silence se fit instantanément et la prof me fixai d'un air grave. Le garçon ricana, sûrement gêné qu'une des deux mis à l'écart de la classe lui parle comme ça :

- Pardon ? C'est l'avocate du gothiquo-martien qui parle là ?

Je n'étais pas en colère par rapport au fait qu'il se foutait de moi, mais...Il fallait quand même que je le lui dises :

- Oui, et tu n'es qu'un con car tu sais très bien qu'il n'as plus de parents.

Le silence ne fut pas long et les chuchotement reprirent vite. La prof me regardait maintenant d'un air compatissant. Elle avait compris. Le jeune par contre non. Il sortit d'un ton plein de méchanceté et de cruauté :

- Mais on s'en fout qu'il aie des parents ou pas !

- Aleks ! Hurla la prof.

Je me raidit sur ma chaise et serra les poings alors que dans la classe, certains rigolaient et d'autre criait qu'il n'y avait rien de drôle. Le brouhaha me monta à la tête et je tournai la tête vers lui, remplie de haine. Je le fixai dans les yeux pour l'intimider :

- Et si c'était toi, hein ? Et si tes parents crevaient du jour au lendemain. Tu ferais quoi ?

Il ricana gentiment :

- Mais ça n'arrive pas à moi, alors je m'en fout.

- Aleks, ça suffit ! Cria la prof.

Mais je ne l'entendait déjà plus. Les larmes envahirent mes joues et je ne résistais plus à l'envie de partir. Je prit en vitesse mon téléphone et mon porte-monnaie, me leva et traversa la classe pour sortir. Le trajet me parut être passé au ralentit. Je vit bien toute les expressions dégoûtée et incompréhensive de mes camarades.

Mais moi, je m'en foutait. Je voulais juste partir. Voler loin de là et oublier toute cette classe d'immature. Ils ne pouvaient pas savoir combien Allan souffrait et combien je m'inquiétais pour lui. Je passa la porte, laissant derrière-moi le brouhaha. J'entendis juste la prof crier :

- Fanille, revenez !

Mais je restais sourde à ses mots. Je ne sais pas combien de temps je courus, mais je savais juste que quand je m'étais arrêtée, j'étais essoufflée. Observant autours de moi, je reconnut la place en face de la gare. Je m'en fichais du lieu et de l'heure, je n'avais qu'une envie, appeler Allan.

Les poumons encore brûlant, je dégainait mon téléphone pour pouvoir composer son numéro mais...Mes mains tremblaient tellement d'émotion que le portable glissa et alla s'écraser au sol dans un bruit de verre brisé, qui me fit comprendre que l'écran était cassé.

La colère m'envahit et cette fois je ne put me retenir.

- Bordel de merde ! Quelle journée à chier !

Ma gorge me fit mal à crier pareillement, et des larmes recommencèrent à couler. Je levais la tête et c'est là que je le vit.

Il venait de prendre le « reste » de mon téléphone, et de me le tendre. C'était un garçon aux cheveux plutôt courts, châtains clairs, légèrement en bataille. Il avait des traits fins et était petit en taille, même si je pensais qu'il devait frôler les 17ans. Ses yeux bleus clairs brillaient d'une lueur chaleureuse.

Je me rendit compte en faite, que j'avais arrêté de sangloter, et que je le fixait. Quand je détournais enfin les yeux, il annonça d'un ton comique :

- Les filles sont toutes aussi grossière ici ? Bah, ça doit pas être pire quand dans les pays du nord où elles boivent.

Comprenant que son ironie ne m'avait pas fait rire, il reprit d'un ton compatissant :

- Dure journée ?

Je fit un hochement positif de la tête. Sur le coup, je me disais : C'est qui celui-là ? Encore un harceleur dont on parle au journal ? Mais...Quelque chose me disait que ce n'était pas ça. Qu'il n'était pas méchant et qu'il voulait m'aider. Je prit enfin mon téléphone qu'il tendait et constata l'état des dégâts ; L'écran était fendu et inutilisable. Pour un tactile, ce n'est pas vraiment malin. Je soupirais :

- J'avais un appel important à passer...Mais il n'y a pas que ça qui foire aujourd'hui.

Il me regarda et fit un grand sourire :

- Bah, c'est pas une journée si terrible que ça. Je peux te prêter un téléphone si tu veux. Et puis, si ça peut te remonter le moral, ça me fait plaisir de t'avoir rencontrée. Tu t'appelles comment ?

Un véritable martien. Mais il n'étais pas méchant. Je sais pas pourquoi, mais je lui répondit :

- Je m'appelle Fanille. Et toi ?

A ce moment là, je ne le savait pas, mais rien que son nom allait donner une autre tournure aux choses.

- Sympa comme prénom, moi c'est Kert.

Ne me regarde pas dans les yeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant