Chapitre 7 💉

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Cinq jours, c'est le temps qu'a passé Carter à « s'occuper » de Ryder. Pour tout vous dire, c'est clairement impossible que je tienne plus. Il est en train de le pousser à bout, et moi aussi par la même occasion. Je n'en peux tout simplement plus de l'entendre crier après moi sans que je puisse le rejoindre. J'ai terriblement envie de le voir...

Ryder a droit à une nouvelle dose de sédatifs à chaque fois qu'il fait une crise. Mes deux collègues costauds qui accompagnent Carter m'ont dit que Ryder n'a pas encore eu d'injection de son nouveau traitement. Je me demande juste quel est le but de Carter. Pourquoi il fait tout ça ? Pourquoi il lui fait subir ça...

Tout ça, c'est juste parce que je me suis servie de notre proximité pour le calmer, et que par la suite j'ai fini par le rassurer au sol à ses côtés. Mais c'est juste normal ! Je suis la seule capable de le calmer sans avoir recours aux sédatifs, alors autant en profiter et l'apaiser.

En sortant de la chambre de Carole, je passe dans le couloir où est située la chambre de Ryder. J'entends directement des cris, ce qui me fait longuement soupirer. Mes deux collègues me regardent avec désolation, mais moi je les regarde mal. Je suis au bout, et je suppose que ça se voit.

- Bon, c'est bon les gars, vous en avez pas marre ? lâché-je devant eux.

Ils haussent simplement les épaules, me faisant froncer les sourcils.

- Ordre du chef, répond Zachary.

- Ouais, bah moi j'en ai marre de ses ordres, poussez-vous.

Cependant, ils ne bougent pas le moins du monde, restant plantés devant la porte comme deux armoires à glace.

- Vous savez que si je crie après lui, il va directement débarquer, pas vrai ?

Lorsque je leur fais part de ma menace, je crois moi-même en mes paroles. Ryder me réclame toujours, ce qui veut dire qu'il considère qu'il a besoin de moi. Si à mon tour, je montre que j'ai besoin d'aide, il n'hésitera pas à tout pousser sur son chemin pour venir à mon secours.

Lors de ces cinq derniers jours, je suis restée entièrement silencieuse, faisant comme si je ne l'entendais pas. La vérité, c'est que ses cris me touchaient mentalement. Je voulais le voir, comme lui me réclamait. Trop à bout à cause des cris de Ryder, je pousse les deux hommes et ouvre la porte d'un coup.

- Ryder ! m'exclamé-je.

Ses yeux se dirigent vers moi et mon corps s'immobilise sous le choc, lorsque je l'aperçois. Ses poignets sont maintenus par des sangles attachées à son lit, et Carter se trouve devant lui, avec une seringue remplie. Celui-ci me regarde très mal en raison de ma présence ici.

Dans un élan de rage, Ryder se débat encore plus et finit par briser ses liens. Je lâche un cri de surprise. Même s'il était maintenu par les plus petites sangles, elles sont quand même coriaces et pas faciles à briser.

Avec cette même rage, il se lève du lit et pousse Carter. Dans sa chute, sa tête se cogne contre le mur et il tombe au sol, inconscient avec les sédatifs. Je souffle de soulagement, en me disant que voici une bonne chose de faite. Les deux hommes situés derrière la porte entrent et vont vers Ryder pour le tenir, et j'explose au sens propre du terme.

- Non mais c'est bon, putain ! Je ne suis pas Carter. Dégagez, il ne me fera rien.

Ils me dévisagent longuement, et puisqu'ils ne bougent pas, je les pousse en dehors de la pièce avant de fermer la porte derrière eux. Je m'avance ensuite vers Ryder et pose mes mains sur ses joues pour établir un contact visuel avec lui.

- C'est bon, Ryder. Je suis là, calme-toi...

Face à face, nous restons pendant de longs instants sans bouger ni prononcer une parole. On se regarde juste et je sais qu'il en a besoin à cet instant précis, après ces cinq jours sans me voir. Je finis par laisser glisser mes mains de son visage pour les laisser retomber le long de mon corps.

Ryder se laisse tomber sur son lit pour s'asseoir en passant sa main dans ses cheveux. Mon regard se pose sur Carter, qui est toujours dans les vapes, allongé au sol. Je trouve que c'est carrément mérité, ce qui vient de lui arriver. Pas vous ?

Ne supportant plus de le voir, j'ouvre la porte et indique aux deux armoires à glace de récupérer leur chef. Ils s'exécutent sans rien dire et je referme la porte derrière eux pour prendre soin de mon ancien patient que je tente de récupérer.

Cette situation m'insupporte vraiment au plus haut point. Non seulement Ryder a droit à des doses de sédatifs, mais en plus, ils ont utilisé tout ça pour le contrôler. Alors que moi, je suis seule, et sans sédatifs.

Je saisis les poignets de Ryder et grimace en voyant à quel point ils sont rouges. Les sangles sont dessinées sur ses poignets et le contour est ensanglanté, sous forme de plusieurs grosses griffes. J'indique à Ryder que je reviens et pars chercher du désinfectant le plus rapidement possible avant de revenir pour m'occuper de lui.

En silence, je désinfecte ses poignets. Il regarde mes moindres faits et gestes, comme s'il voulait les enregistrer dans sa mémoire. Lorsque j'ai terminé, je me pose sur le siège face à lui et le détaille du regard. Je comprends qu'il est touché par les remords au vu de l'expression de son visage. Je sais qu'il est plus blessé mentalement que physiquement.

- Ryder, tu n'as pas à t'en vouloir... Il le méritait vraiment. Et n'importe qui aurait fait la même chose à ta place.

Il hoche doucement la tête en regardant le sol.

- Pourquoi t'es revenue, Denasia ?

Cette fois, il me regarde enfin et je lis la sincérité dans son regard. Je fronce les sourcils en me demandant ce que Carter a pu lui raconter pour qu'il pense ça. Certainement que je ne voulais plus le voir d'après sa question. Franchement, si je reste, c'est parce que j'aime l'environnement, mes collègues et surtout les patients. Sinon, j'aurais cherché un stage autre part. Et c'est une réelle habitude de travailler dans cet endroit, en trouver un autre serait comme reprendre à zéro.

- Parce que je le voulais. Je n'en pouvais plus de rester sans rien faire.

- Mais je croyais que tu ne voulais plus me voir ?

Je soupire et me relève pour me poser face à lui. C'est bien ce que je pensais. Cet enculé lui met je ne sais combien de choses fausses en tête. Mais à part ce grand malade, qui mentirait à une personne avec un problème psychologique pour le décevoir ? Tout ça pour l'éloigner de moi, j'en reviens pas !

- Ryder, je n'ai jamais demandé à ce que quelqu'un d'autre s'occupe de toi. C'est lui qui l'a voulu. Il est mon supérieur et j'ai dû obéir à ses ordres. Tu comprends ?

- Ça veut dire que tu viens de lui désobéir pour moi alors ?

- Bien sûr, Ryder. Et je serais prête à le refaire s'il ne veut toujours pas que je m'occupe de toi.

- C'est parce que je t'ai poussée contre le mur la dernière fois que tu ne peux plus t'occuper de moi ? Je suis désolé.

Je secoue la tête. En soit c'est en lien, mais c'est moi le problème, pas lui.

- Non, c'est parce qu'on était proches lorsque je t'ai emmené voir la psychothérapeute. Me voir t'aider à te calmer et me mettre à genoux à tes côtés ne lui a visiblement pas plu.

- Je comprends pas, c'est quoi le problème ?

- On ne doit pas avoir de relation avec nos patients. Mais je ne faisais que mon travail. Carter est un con, c'est tout.

- Et s'il te renvoie à cause de moi ?

Vous aussi vous voyez cette facette de lui ? Cette facette où il ressemble à un petit enfant fragile, alors qu'il est juste un homme fort. C'est une facette de lui que j'aime redécouvrir à chaque fois.

- Alors j'aurai besoin de toi. Mais j'ai pu penser à un plan, ne t'en fais pas.

J'ouvre ma blouse et prends une carte dans la poche de mon jean avant de lui tendre.

- C'est mon numéro personnel, tu me contacteras pour que je puisse avoir recours à ton aide si tu le veux bien.

Il hoche la tête et saisit ma carte. Je referme ma blouse avant de soupirer. Même si je sais que je peux compter sur lui, je vais vraiment redouter le moment où Carter va se réveiller. Qu'est-ce qu'il va me dire ?

Eyes in EyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant