Ebony War

Débat

- Pourtant, j'aurais juré  qu'une aura magique émanait d'elle.
- Et toujours selon toi, Nacht, elle est censée nous aider d'une quelconque façon ?
- Je pense que Mint sera d'accord avec moi, elle est un élément essentiel à notre protection. Gardons la fille.
Enora s'éclaircit la voix :
- Les gars, je suis là. J'ai un nom, et c'est Enora.
Nacht, sans même daigner se tourner vers Enora, lança :
- Tu peux nous laisser tous seuls, merci ?!
Enora, vexée, s'en alla sans mot dire. Avant qu'elle ne franchisse la porte, Nacht se rendit compte de la sécheresse de sa réplique cinglante, et, culpabilisant, accompagna Enora jusqu'à une salle remplie d'occupations (jeux, magazines, etc). Il lui demanda de patienter. Il avait peut-être été secrétaire dans une autre vie. Qui sait ?

Céleste soupira. Les voilà embarqués dans une belle galère. Elle se redressa sur son siège, qu'elle avait tiré du bureau dans le coin de la pièce, et s'adressa aux autres enfants chefs, assis, eux, sur les banquettes qui contournaient le mur. Elle se contenta d'énoncer les faits :
- Bon, Silence, silence. Récapitulons, s'il vous plaît. On fait face à plusieurs problèmes dont les majeurs sont ...
Brann lui donna un coup dans le tibia, avant de diriger son regard vers Lucy. Céleste s'engagea alors avec prudence :
- Mais avant tout, Lucy, nous devons savoir si nous pouvons te faire confiance. Certains te prennent pour le pion de ton père, et ...
Brann lui fit grâce d'un nouveau coup dans le tibia.
Mint enchaîna directement :
- Il est vrai que la raison de ta venue est encore floue, et moi-même, puissante tempête verte, je ne sais si je peux placer ma confiance en tes mains. En d'autres termes, si tu veux, Lucidnost, t'intégrer au groupe des quatre fils de chefs, il te faudra nous accorder un ou deux renseignements sur ton rôle durant ce « séjour » sur la Terre-Sol.
Les regards se focalisèrent sur Lucidnost, alors celle-ci prit la peine de s'arracher de sa position assise. Elle approuva :
- Mentham, il est vrai que certains éléments me désignent comme suspecte. Cependant, je ne sais moi-même rien de la raison de ma venue. Du moins, pas directement. Ruby et mon père ne m'ont pas donné d'ordres. Et je ne tiens pas à trahir mon père en vous confiant à vous des choses qui devraient peut-être rester sous silence. Cependant ... je dois avouer que j'ai constaté des détails qui dénotent. Ruby et mon père trament quelque chose. J'ai dans la tête qu'ils entament un projet éminent dans lequel vous -nous- ne serions qu'une distraction. Vous, comme moi, savez que venir sur la Terre-Sol était prendre un risque plus énorme que rester tous à nos domiciles propres, bien assez isolés des champs de batailles. Donc, en conséquence, il doit s'agir par là, quelque part au fond des petites têtes d'un des clans, d'un plan élaboré dont la majeure partie doit se dérouler sur la Terre-Sol. Il y a donc quelque chose sur cette Terre que nous ne connaissons pas qui attire l'oeil de deux de vos parents, probablement quelque chose capable de leur faire gagner la guerre. Notre présence ici n'est qu'une façon de concrétiser le déplacement sur la Terre-Sol aux yeux des deux chefs ennemis, sachant que chaque fait et geste est surveillé de manière patiente par l'ennemi quelqu'il soit. Tin et Ruby sont les exécutants de ce projet et votre présence ne rend que leur déplacement sur la Terre-Sol valide aux yeux des chefs qui ne sont pas au courant du « projet ». De plus, par soucis de prudence, Tin et Ruby ont été choisis car ce sont des Innovateurs et non pas des Tempêtes, car il est impossible de tracer leurs déplacements sur la Terre-Sol, en effet on ne recèle chez eux aucune magie. Donc on ne peut pas les trouver.

Mentham ouvrit de grands yeux, tandis que Céleste s'étonna de la vivacité de la jeune fille de 16 ans. Un vague silence plana, poussant les enfants chefs à la réflexion. Nacht, plus concentré que jamais, prit la parole :
- Et donc Tin et Ruby travaillant pour les deux chefs dirigeant le projet, soit mon père et la mère de Brann, ce sont Scarlett et Mercure qui ont pour vocation de remporter cette guerre.
Céleste se dressa sur ses jambes avant de proclamer férocement :
- PEU IMPORTE LE PLAN, IL FAUT LES EN EMPÊCHER !!!
- Écoute, Céleste ... ce serait une bonne chose que la guerre cesse. De tous les côtés, il y a des centaines de victimes par jour, il faut que ce massacre prenne fin, résonna Nacht.
- Ça, c'est parce que si on laisse ce projet aboutir, c'est ton clan qui gagne, ça t'arrange bien !
Mentham surenchérit :
- Ce ... plan que comptent mettre Scarlett et Mercure à exécution, est sûrement dévastateur et pourrait bien causer plus de dégâts que le continuement de la guerre. De plus, il s'ensuivrait une domination écrasante des Bleus et des verts, et ce n'est pas ce que nous souhaitons n'est-ce pas ? Nous voudrions la paix. Je pense que nous devrions tenter de sauvegarder la survie des deux camps adverses et contre-carrer ce projet afin de rétablir un équilibre, si mince l'espoir que paix il y ait.
Nacht agréa finalement.
Ils se lèverent alors tous et se décidèrent à confronter Enora.

Enora gisait dans un canapé, contemplant le plafond. Elle checka son téléphone. Des nouvelles de Ruth, lui sollicitant des explications, et des messages de son père lui demandant comment avançait son exposé avec Julia. Enora répondit brièvement à Ruth, puis appella son père en prenant une voix alègre. Elle lui parla d'un sujet quelconque - bien heureusement, elle avait assez de culture générale pour faire croire qu'elle avait fait des recherches. Enora s'étendit ensuite sur le sofa et repensa à tout ce qu'elle avait vécu dernièrement. Une boucle temporelle, des rêves de guerre, un homme lui attrapant le bras en lâchant des inepties hors d'intérêt. Bref. Comme toute personne normale. Puis la jeune fille s'assoupit. Elle rêva encore en tunnel.
Elle essaya de prêter plus attention aux paroles qu'elle fredonnait. Elle remarqua alors avec effroi qu'il s'agissait d'une chanson dont l'air ne lui était pas inconnu : «Sais-tu seulement pourquoi
Les fleurs n'éclosent jamais ?
Ce bourgeon que j'aimais
Frémissant autrefois
Flétri à présent
Parfois
Agonisant
M'amènes-tu, je crois,
Là où se meurt l'été
Le Printemps amèrement regretté
Lorsqu'à ma porte vient sonner
L'Hiver ou l'Automne
Les Fleurs ne fleurissent
Entre désert de caprices
Les Fleurs ne fleurissent
Ce n'est que du fer
Glacial
Et Alors les Fleurs
Fleurissent mal
Quand elles ne sont en Enfer »
Puis elle eut la vision. Elle vut devant elle Gabrielle, sa mère. Elle agrippa sa couverture. « Oh non, pas ça, s'il vous plait, pas ça, pas maintenant, pas ça, s'il vous plaît. ». Mais aucune imploration ne fut entendue, et elle dut voir le spectacle de la mort de sa mère. Il lui arrivait souvent de contempler cette scène, et ensuite d'imaginer les différentes étapes de la décomposition de ce cadavre. En général, cette vision prévoyait pour Enora des ennuis.
Puis l'image changea du tout au tout, pour un environnement pas plus plaisant. On voyait de grands champs, mais il n'y avait pas de ciel. Pourtant il y avait de la lumière. C'était très étrange. Détail le plus important : une bataille se déroulait. Pn voyait des éclats de lumière verte, des épées scintillantes, la terre volant en morceau sans raison connue, des cris agonisants, et du sang giclant. Les guerriers étaient vêtus d'armure de couleur, mais le sang les couvrait. Enora se réveilla en sursaut quand une femme se fit décapiter juste à ses côtés.

Nacht gravissait les escaliers menant à la sorte de salle d'attente où patientait Enora. Céleste l'intercepta.
- Nacht ... écoute, je sais que tu n'aides les autres que quand ça t'arrange, mais il faut vraiment que tu comprennes que c'est important de mettre un terme aux plans de ...
Nacht se défit de l'étreinte de Céleste.
- Non.
Céleste fronça les sourcils. Nacht était toujours comme ça. En un mot, il pensait répondre à une question complexe, comme si c'était à elle d'appréhender la réflexion qui se cachait derrière le « non » sec et tranchant de Nacht.
- Nacht ! Quand est-ce que tu arrêteras d'être rien qu'un tas d'égoïsme condensé !
Nacht se retourna vers elle, et répondit très sérieusement :
- Jamais. »