29. Race macabre.

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Ekaterini émit un sifflement rageur, agrippant la pierre pour y enfoncer ses ongles. Son visage était tourné vers nos prisonniers, les traits tirés par la haine qu'elle éprouvait à leur égard. L'aveugle avait du mal à contenir ses sentiments ; sa rage, sa colère, sa haine étaient ceux qu'elle parvenait le plus difficilement à garder tapis en elle. Je la soupçonnais de ne pas chercher à les contenir, bien qu'elle fît des efforts que je devais reconnaître. Elle ne leur avait pas encore sauté à la gorge et ne les avait pas tués, elle avait su contrôler un minium ses pulsions.

Pour ma part, j'avais su garder mon calme et un visage neutre. La haine bouillonnait dans mes entrailles mais je ne laissais rien paraître. Le calme était plus puissant qu'une violente colère.

Ange était assise dans un coin de la pièce, contemplant la scène sans broncher. Impossible de savoir à quoi elle pensait. Elle était imperturbable. Sa présence était vitale en cet instant précis. Son pouvoir nous rendait intouchable. Nous étions invulnérables face à ces captifs aux grands pouvoirs, mais désormais démunis de leur puissance.

Impétueuse, Ekaterini dressa dignement la tête avant d'écraser son pied dans la face de l'un d'eux. J'émis un râlement désapprobateur, mais l'aveugle n'en fit qu'à sa tête, voulant faire couler le sang des êtres qu'elle haïssait par-dessus tout. Comprenant qu'il allait falloir l'éloigner de force, je fis un signe de tête en direction de Shaytan pour qu'il s'empare de l'aveugle et la tienne loin des prisonniers. L'Ogre écarquilla l'œil de terreur face à mon ordre, et, courbant l'échine, il attrapa Ekaterini par la taille et la tint fermement contre lui en reculant, l'éloignant des captifs. Ekaterini hurla de rage et voulut lui balancer ses cendres à la figure, mais grâce à Ange, elle ne put parvenir à ses fins. Pestant de plus belle, elle balança diverses grossièretés piquantes en direction de l'Ogre.

J'attendis que sa crise de colère se tarisse, retenant difficilement mon impatience. Ekaterini avait le don de me faire perdre mon temps. Après ce qui me semblât être une éternité, l'aveugle se calma et Shaytan put la relâcher, veillant à ce qu'elle ne se rut pas de nouveau en direction des prisonniers.

Je m'avançai vers eux, le regard imperturbable, jugeant qu'on avait assez perdu de temps pour aujourd'hui. Leurs yeux de contrefaçon, faits de diamants, m'étudièrent avec animosité. Le visage des prisonniers était masqué par une large capuche bleu nuit, d'un habit qui recouvrait tout le corps. Impossible de voir la moindre trace de peau. Décidée à leur enlever leur anonymat, pour écraser peu à peu leur dignité construite à travers leur image, j'agrippai la capuche du premier avant de la rabattre. D'un geste vif, je lui arrachai le masque qu'il avait au visage, là où étaient accrochés les yeux de diamants.

Le captif émit un bruit de mécontentement difficilement contenu. Ses yeux étaient emplis de haine. Ses iris étaient couleur miel. Il faisait partie de la race des Fées. Je retins un rire. Comment une race aussi privilégiée que la sienne avait pu se retrouver impliquée dans une histoire aussi sordide ?

Doucement, je lui empoignai le menton, levant sa tête en ma direction. Un sourire mauvais se dessina sur mes lèvres.

- Ainsi, des Fées se sont retrouvées mêlées à toutes ces affaires sordides, remarquai-je. Je peux savoir ce que tu as à y gagner ? lui demandai-je d'un ton dur.

Le Darknil ne me quittait pas des yeux, le visage fermé, le regard luisant. Il ne semblait pas prêt à vouloir dialoguer. Je soupirai, levant les yeux au ciel. Lentement, j'enfonçai mes ongles dans son menton maintenu entre mes doigts, secouant la tête dans un signe désapprobateur.

- Ne m'oblige pas à utiliser la force, murmurai-je, car sache que je finirai par te délier la langue. A toi de voir si tu préfères parler dans le calme et la douceur ou si les cris et la douleur sont plus à ton goût.

Obscuras Tome 3 : L'intouchable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant