Chapitre 22

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 Martin retint un cri de rage tandis que ses poings martelaient le cuir rêche du sac de sable. Ses genoux et ses pieds heurtaient le sac à pleine vitesse en faisant cliqueter la chaîne sur lequel il était suspendu. Il s'efforçait d'imaginer que cette toile était un adversaire redoutable, esquivait des coups imaginaires et les contraient en enchaînant les figures. Suivant les conseils du Capitaine Vincent Drihem, il y mettait moins de force brute, mais plus de rapidité dans l'exécution technique de ses gestes. Il n'avait plus aucun mal à suivre le rythme imposé par leur professeur, et même, parvenait à s'amuser durant ces entraînements.

Il s'arrêta un instant, essoufflé. Non sans un sourire, il contempla ses mains osseuses. Ses phalanges étaient rouges. Tant mieux, au moins ça montrait qu'il n'était pas un tir au flanc.

S'il avait progressé aussi vite, c'était moins grâce à leur professeur qu'aux précieux conseils d'Hugo. Certes, il s'était senti ridicule quand il avait écouté ses recommandations et répété ces gestes devant son miroir. Durant des semaines, il s'était exercé, se battant contre son reflet en espérant s'améliorer. Aujourd'hui, il constatait que son camarade avait eu raison.

Il ferma les yeux un instant et inspira profondément. Sa magie chatouillait agréablement ses entrailles comme pour lui rappeler sa présence. Ses épaules s'affaissèrent, las. Malheureusement, la maîtrise de ses pouvoirs restait son point faible. Ils se faisaient de plus en plus présents à mesure qu'il progressait, et pourtant il ne parvenait toujours pas à les contrôler. Il avait pourtant vu quelques-uns de ses camarades s'en servir malgré eux en pleine session de combat ! Mais pour l'heure, ses efforts restaient vains : sa magie refusait obstinément de lui obéir, à son grand désarroi.

Le Capitaine Drihem – qui n'avait pas manqué de remarquer son inactivité – s'approchait de lui, justement. Les mains jointes dans le dos, il lui accorda un sourire bienveillant.

- On se repose, Martin ? la taquina-t-il.

- J'aimerais bien vous y voir, rétorqua l'intéressé. Je suis sûr que vous êtes rouillé à force de nous regarder faire !

- Ne souhaite pas m'affronter trop vite. Et montre-moi tes progrès !

Martin haussa un sourcil avant de faire craquer ses doigts. Il souffla tout l'air qu'il avait dans ses poumons et s'appliqua à exécuter chaque coup avec précision. Il réalisa chaque crochet, chaque direct, chaque savate avec dextérité, les dents serrées en signe de concentration.

Vincent l'observa un instant, le sourire aux lèvres. Il se racla la gorge pour attirer son attention, sans toutefois y parvenir. Martin avait purement et simplement oublié sa présence. Ses pouvoirs vibraient en lui, et cette sensation obsédait toutes ses pensées. Peut-être qu'en s'acharnant encore, il parviendrait à... ?

- Martin ! l'appela son instructeur d'un ton sec, le ramenant brusquement à la réalité.

L'Aspirant s'arrêta, essoufflé. Il tourna la tête vers son professeur, hésitant. Celui-ci lui sourit davantage encore si c'était possible.

- C'était très bien. Tu as affiné la technique à ce que je vois !

Martin ne put retenir un large sourire, signe d'une joie sincère.

- Enfin ! lâcha-t-il néanmoins avec un sourire goguenard. On peut dire que vous êtes avare de compliments, vous !

- Je ne les donne qu'à ceux qui le méritent. M'enfin, la théorie c'est une chose, badina le professeur, la pratique c'en est une autre ! Maintenant que tu ne cognes plus dans le vide, va t'entraîner avec Étienne. Que tu puisses voir ce que tu vaux vraiment en situation réelle !

ALLÉGEANCE {Tome 1} Les Murmures du BastionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant