Chapitre 44

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L'alarme retentit moins d'une heure plus tard. Martin se réveilla en sursaut. Il enfila ses bottes à la hâte et bondit dans le salon où il retrouva ses camarades qui se rhabillaient en toute hâte. Il ne leur fallut qu'une ou deux minutes pour quitter leur Garnison et retrouver leurs condisciples devant les hangars où les bus qui s'apprêtaient déjà à partir. 

     La Commandante Marie Simon, en charge de toutes les opérations extérieures, aboyait ses ordres auxquels ses subordonnés obéissaient sans discuter. Par petits groupes, ils grimpaient dans les antiques machines aux moteurs ronronnants. À leurs mines graves et déterminées, Martin comprit que les éclaireurs avaient repéré des Ombres, et une surprenante vague d'excitation le saisit tout entier. Sa magie, complice, se manifesta soudain en lui gelant les doigts. « Enfin ! » songea-t-il avec rage. 

    Quatre bus démarrèrent en trombes, les obligeant à s'écarter brusquement pour libérer le passage. Ne restait plus qu'une trentaine de Gardes, ainsi que l'ensemble des Cadets. Tous avaient en commun d'être rattachés à la sécurité intérieure. La Commandante Simon leur adressa un sourire désolé avant de monter dans une vieille jeep fatiguée. 

- Vous n'êtes pas sous mon autorité, leur apprit-elle tandis que son chauffeur mettait le contact. Retournez-vous coucher. On peut gérer ça, ne vous inquiétez pas. 

     Après quoi, le véhicule fila en crachotant un panache de fumée noire. Martin la regarda disparaître au bout du parc, ahuri. Il ignorait s'il était vexé, déçu, ou tout simplement en colère. Peut-être les trois à la fois. Bon sang, il n'avait pas signé pour rester dans son lit quand des Ombres chassaient dans les alentours ! Il était là pour se battre ! Pour faire son devoir ! Pas pour vivre dans le luxe en attendant qu'on veuille bien faire appel à lui ! 

     Tous n'étaient visiblement pas du même avis. Les autres se dispersèrent sans esclandre – d'ailleurs, Thomas baillait ostensiblement et Nora ne cessait de se frotter les yeux. Comment pouvaient-ils ne serait-ce que songer à retourner se coucher en sachant que des Ombres attaquaient un village ? « Ce ne sont que des lâches ! » maugréa-t-il pour lui-même. 

- On va quand même pas rester là, les bras croisés, à ne rien faire ? s'insurgea Valentine.

- Elle a raison, ajouta Hugo, les poings serrés. On devrait être là-bas !

     Étienne, en poussant un juron, tapa du pied dans un caillou. Il semblait être du même avis. Martin fut soulagé de les savoir aussi furieux que lui. Il n'aurait pas pu rêver meilleurs coéquipiers !

- Mais qu'est-ce que tu fabriques, Yann ?!

     Martin sursauta en reconnaissant la voix du Lieutenant-Colonel Laurent Rizzi. Le Major venait d'apparaître aux abords du hangar et boitait vivement vers l'un des derniers véhicule disponibles – un vieux pick-up à la carrosserie rouillée et couvert de ce qui semblait être des griffures. Une pensée traversa l'esprit de Martin : celle que le Major et ce véhicule avaient vu passer trop de combats. 

- Tu n'as rien à faire là-bas ! insista Lieutenant-Colonel. Et puis qu'est-ce que tu vas y faire ? Tu ne ferais que gêner Marie !

- Tu ne crois quand même pas que je vais rester les bras croisés alors que des Ombres attaquent Trèfle d'Or ?

« C'était donc ça ! » songea Martin. Inconsciemment, il s'avança au-devant de ses supérieurs, devinant qu'il y aurait peut-être là une opportunité à saisir. 

- Mais tu es blessé, Yann !

- Et alors ? Est-ce que ça m'empêche d'utiliser mes pouvoirs ? Quoi ? Tu ne me crois plus capable de me battre ?

ALLÉGEANCE {Tome 1} Les Murmures du BastionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant