Nuit 10

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Je pose les mains sur mes hanches, mon placard grand ouvert devant moi. Une question qui a taraudé beaucoup de jeunes filles avant moi me taraude à mon tour. Que mettre ? Il ne faut pas que je sois trop chic. Il ne faut pas que je ne le sois pas assez. Il ne faut pas que je sois vulgaire. Il ne faut pas que je sois guindée. J'aimerai tellement avoir ma mère, une grande sœur, ou même Aimée pour m'aider ! Mais je n'ai rien de tout cela, et il va falloir que je me débrouille toute seule.

J'élimine dès le départ l'option jeans, ce qui enlève déjà la moitié de mon armoire. Reste des jupes, des robes, des pantalons... En gémissant, je m'écroule sur mon lit, complètement perdue. Des coups à ma porte me fait sursauter.

- Deux minutes je mets mon peignoir ! hurlé-je en priant pour que ce ne soit pas maman, mais plutôt Mathias ou papa qui serait arrivé plus tôt.

La porte s'ouvre finalement pour laisser place à la figure joyeuse de mon grand frère. Je pousse un soupir de soulagement, finis le noeud de mon peignoir et m'écroule à nouveau sur mon lit.

- Bah alors ! Tu n'es pas encore habillée Maé ?

Je lève les yeux au ciel tandis qu'il fait pencher le matelas en s'asseyant dessus.

- Je sais pas quoi me mettre !

Il explose de rire, tandis que je me renfrogne, vexée.

- Je vais t'aider moi !

Il se lève et considère mon placard avec la même mimique de concentration que moi quelques secondes plus tôt.

- Toi ? Tu vas m'aider ?

Absolument pas convaincue, je croise les bras et le regarde en silence choisir des vêtements.

- J'ai fait beaucoup de shopping avec Chloé tu sais, et du coup...

Il ne finit pas sa phrase et brandit une jupe noire et un pull rose. Que je mettais il y a deux ans.

- Mathias, regarde la taille et après dis-moi si cela te semble raisonnable...

Il cherche l'étiquette, la lis, et repose immédiatement les vêtements sur la pile. Je souris victorieusement, et me lève pour attraper ma brosse à cheveux posée sur mon bureau.

- Tu trouves ?

- Je crois oui...

Cette fois-ci, il sort un pantalon noir, qui m'enserre la taille et s'évase toute de suite après, ainsi qu'un petit pull rouge, qui s'arrête au niveau de mon nombril et dont j'avais oublié l'existence. C'est absolument parfait. Un grand sourire éclaire mon visage, et je me précipite vers mon frère pour l'embrasser. Il paraît surpris, mais ne s'écarte pas. Nous n'avons pas l'habitude d'effusions pareilles.

- C'est parfait merci Mathias !

Je l'accompagne à la porte, la referme derrière lui puis m'habille à la quatrième vitesse par peur d'être en retard. Je finis de me brosser les cheveux, les laisse librement retomber sur mes épaules, cours dans la salle de bain pour me maquiller légèrement, et essuie les verres de mes lunettes.

J'attrape une paire de chaussure à talon pas trop haut, les chausse et descends enfin les escaliers. La porte s'ouvre au moment où je pose le pied sur la dernière marche, laissant place à mon père.

Légèrement embarrassé, il pénètre dans la maison qui, durant dix ans, a été la sienne, et qui ne l'est désormais plus du tout. Il s'avance vers moi, étant la seule personne présente dans les parages, et, maladroitement, sûrement par peur que je réagisse comme la dernière fois, il m'embrasse la joue. Je lui fais un grand sourire et le sers dans mes bras.

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