Nuit 11

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Je suis perdue. Mes paroles de Jules ne m'ont pas quittée de la journée. Je ne sais pas quoi faire. Je sais qu'il a raison. Mais je sais aussi que je n'ai pas envie de briser ma famille plus qu'elle ne l'est déjà. En soupirant, je m'allonge sur mon lit et regarde le ciel par la fenêtre. J'entends Mathias et Chloé discuter dans le salon. Papa ne devrait pas tarder à rentrer. Je ne sais par quel miracle, il a décidé de revenir dîner ici aujourd'hui. D'ailleurs, je ne suis pas sûre que Maman le sache parce que je ne pense pas qu'elle m'aurait laissé faire sans rien dire.

Tant pis.

Si je veux dire quelque chose, c'est le moment ou jamais. Mais j'hésite. Parce que ma vie changera. Et que, même si elle est assez pourrie, je l'aime.

Je soupire à nouveau.

J'ai besoin d'en parler avec quelqu'un. Quelqu'un qui sait tout. Quelqu'un qui me comprendrait. Mais il n'y a qu'une seule personne qui est au courant, et vu comment s'est terminée notre dernière discussion, je n'ai pas forcément envie d'aller la voir.

Mais je n'ai pas le choix.

Je me lève et descends les escalier doucement. Je passe sans faire de bruit devant le salon, je ne veux pas que Mathias m'interpelle. Chloé à beau être gentille, une discussion avec elle n'est pas dans mes plans de la fin d'après midi.

Je descends jusqu'au hall d'entrée et cherche sur le panneau d'affichage le nom de Jules et donc son numéro d'appartement. Septième étage, appartement 75. Je remonte, le souffle court. Je n'ai jamais été très sportive, alors dévaler et grimper des centaines de marches en quelques minutes, c'est dur.

Je m'arrête devant la porte, à nouveau anxieuse. Je me surprends même à souhaiter qu'il ne soit pas là, alors que je sais que je dois absolument lui parler. La main tremblante, le cœur au bord des lèvres, j'appuie sur la sonnette. Un grésillement se fait entendre de l'autre côté de la porte, suivi d'un bruit de verre cassé et d'un juron.

Jules apparait devant moi, les cheveux en bataille, ce qui lui donne un air adorable, et torse nu pour une raison... Inconnue. Des traces de coupures jalonnent ses avant bras et je me mords la lèvre, me sentant coupable. Il a sûrement cassé un verre à cause de moi.

- Maëlle ?

Son ton surpris me fait lever la tête et quand je tombe sur ses yeux pétillants, je rougis.

- Oui ?

Déboussolée, je ne sais plus ce que je dis.

- C'est toi qui a sonné chez moi, pas l'inverse...

Je passe une main dans mes cheveux, me redresse et me reconcentre à nouveau.

- Oui. Désolée. Je... Peux entrer ?

Je me penche sur le côté et essaie d'apercevoir son appartement derrière lui. Un rire me fait lever les yeux.

- Je te dérange peut être.

Je fais mine de réfléchir, en riant intérieurement. Il a su me mettre à l'aise, c'est tout à son honneur.

- Un peu, un peu mais bon... On dort sur ce palier ou ça se passe comment ?

- Viens.

En sautillant comme une petite fille, je pénètre dans cet espace inconnu. On ente directement dans le salon, une grande pièce toute blanche avec des canapés jaunes, des coussins colorés, des tableaux multicolores et des étagères croulant sous les livres. Des débris de verres gisent sur le parquet, et une bouteille d'eau est posée sur la table basse. Je grimace devant ce spectacle qui vient troubler l'ambiance cosy de la pièce, me sentant responsable. 

Lueurs solitairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant