Nuit 13

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Jules est dans le salon. J'entends ma mère lui parler depuis ma chambre. Je ne sais pas ce qu'il fait là. Je ne savais pas qu'il était aussi proche de ma famille. Mais surtout, je ne savais pas qu'il m'avait autant manqué. Je veux sortir, aller lui parler, mais pas comme ça, pas ici, pas avec Maman à côté. La tête de Mathias apparaît dans l'embrasure de la porte.

- Jules veut te parler. Il a dit qu'il t'attendait dehors et que tu ferais mieux de prendre un plaid et un gros pull.

Les sourcils froncés, je prépare mes affaires et y ajoute un une bouillotte et une écharpe. Pas sûre que la température du toit dépasse les zéro degrés. Enfin si c'est là qu'il veut m'emmener. Je n'en doute pas trop en tout cas. Je referme la porte de ma chambre et descend en bas où ma mère m'attend. Elle m'embrasse le haut du crâne avant de reculer de deux pas et de m'envelopper d'un regard tendre.

- Fais attention à toi Maëlle. Bonne soirée.

Je lui jette un regard suspicieux avant de franchir la porte de l'appartement. Qu'est ce que Jules m'a encore préparé ? Ce dernier m'attend, adossé contre le mur, plus beau que jamais. Enfin si c'est possible. Il sourit en me voyant et me tend son bras comme si on était deux siècles plus tôt.

- Euh... Salut ?

Il rit doucement devant mon incrédulité et me précède vers la porte coupe feu.

- Salut Maëlle.

L'accent avec lequel il prononce mon nom fait faire un salto à mon pauvre petit cœur. Je rougis mais ne dis rien et commence à grimper les marches de l'escalier. Il m'arrête de sort de sa poche un ruban noir. Ça y est, je le sens mal.

- Petit épreuve avant...

Cette fois mon cœur accélère, mais par peur. Je lui fais confiance, mais de là à le laisser me guider alors que je n'ai pas la vue...

- Je, je veux pas Jules, désolée.

Il suffit d'un seul mot, d'un seul geste, d'un seul objet, pour me braquer. Il le sait. Alors il range son ruban et soupir, déçu.

- Dommage la surprise sera pas la même... Viens.

Soulagée qu'il ait abandonné sur idée, mais en colère contre moi-même de le fâcher, je le laisse m'attraper la main. Je profite du contact de sa peau contre la mienne et finit de grimper l'escalier curieuse de savoir ce qui se trouve en haut. A côté de moi, je sens Jules trembler. De quoi ? Peur, appréhension, ou excitation ?

Nous débouchons enfin en haut. J'en ai le souffle coupé. Il a tout organisé, et je me doute que Mathias et Maman, voir peut être Papa ont aidé. Devant moi se trouve la chambre de mon enfance, de ma petite enfance. Mon petit lit, mes jeux, mes peluches, mes livres d'images. Tout est là. Rangé comme avant. Même la photo de mes parents. Et celle de Mathias et moi.

Les larmes me montent aux yeux. J'en rêve, de cette chambre. Toutes les nuits. Je rêve que je suis dedans. Je rêve que j'y suis avec mes parents et Mathias. Ce qui ne sera plus jamais le cas. Jules vient de ramener à la vie la partie la plus heureuse de mon enfance.

- Je... Je sais pas quoi dire...

Le souffle coupé, je m'assois sur la couverture à l'effigie de Mulan et regarde le brun qui sourit fièrement.

- Alors ne dis rien.

Soudain, l'évidence me saute au yeux. La photo de mes parents m'attire autant qu'elle me répulse. Il sait. Il sait tout. Il me connaît mieux que personne.

- Alors comme ça tu as réussi à percer mon dernier secret.

Un sourire amer lui tord le visage. J'ai soudain peur qu'il parte, que ce soit trop pour lui.

Lueurs solitairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant