Jour 13

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Je m'éveille avec quelque chose de chaud et mou sous mon bras. Avec un grimace de dégoût, je sors du lit et réalise enfin où je suis. Dans mon ancienne chambre. Sur le toit. Je secoue la tête et tente vainement de me remettre les idées en place. Un grognement me fait me retourner vers le petit lit et je vois Jules s'étirer. Qu'est-ce que...

La mémoire me revient enfin et je titube sous le coup de l'émotion. Le brun saute sur ses pieds et court pour me rattraper. Je ris doucement et le repousse.

- C'est bon, tout va bien, je suis juste pas bien réveillée.

Il s'assoit par terre et je m'installe en tailleur sous mon lit. Je sens son regard irrémédiablement attiré par la photo de mes parents. Je triture mes doigts, réfléchissant à comment je vais lui expliquer. Il attend, patiemment, comme toujours. Alors je me lance. Je saute dans le vide. Pour la dernière fois, je l'espère.

- Ils ont eu un accident quand j'avais cinq ans. J'ai pas beaucoup de souvenirs d'eux. Mathias avait sept ans, il en a plus. Mon oncle et ma tante nous on recueillit. Ils venaient d'avoir Automne. Il faut savoir qu'ils ont mis beaucoup de temps à l'avoir. Enfin bref. Ils ont été géniaux avec nous. Je les considère comme mes vrais parents. Enfin comme mes parents. Je les appelle Papa et Maman et tout le blabla. Mes parents biologiques... Me manquent, évidemment mais... Pas de la même manière qu'à Mathias. Lui il se souvient d'eux. Moi pas vraiment. Donc voilà.

Il acquiesce lentement et attrape son pull étalé au milieu du toit. Je me suis rhabillée avant de m'endormir, mais lui n'a pas remis son pull. Il a dû avoir froid cette nuit.

- Et tu penses pas...

- Je pense rien du tout à propos de ça, le coupé-je. Ne t'improvise pas psy.

Il fronce les sourcils, déstabilisé par mon agressivité mais n'insiste pas. Peut être est-ce son seul défaut. D'être persévérant, mais juste sur la longue durée. Si j'étais de bonne humeur au réveil, je suis désormais au comble de l'énervement. Parce qu'il s'en va aujourd'hui. Et que je n'ai pas envie. Mais plutôt mourir que de l'avouer.

- Bon on redescend ou on passe la journée ici ? demandé-je en me dirigeant vers la sortie.

Attendant que le brun me rejoigne, je m'arrête. Mais il ne bouge pas d'un pouce et se gratte le crâne, un air mal à l'aise imprimé sur la figure.

- Maëlle... Je dois être à l'aéroport dans une heure. Je suis désolé.

Le monde s'arrête de tourner. Alors c'est réel. Ce n'est pas une blague. Il part. Lui aussi. Je vais me retrouver seule. Encore. La réalité me frappe de plein fouet et mes yeux s'emplissent de larmes. Je ne veux pas ! On se connaît depuis deux semaines. Ce n'est rien. Je le sais. Et pourtant je suis tombée amoureuse en deux semaines. Et alors que je pensais que cela ne faisait que commencer, il part.

Il faut tout recommencer à zéro Maëlle.

Je chancelle et Jules me rattrape de justesse avant que mon crâne se fracasse sur le sol. Je ferme les yeux et savoure le contact de sa main sur mon dos, de sa peau sur la mienne.

- Maëlle... Je n'ai pas envie de te briser. S'il te plaît.

Je secoue la tête. C'est un peu tard pour penser à ça. D'un autre côté hier soir est ma faute. Je me hais. Je le hais. Je veux partir et rester ici en même temps. Je veux le jeter du haut du toit et rester accrocher à lui. Je veux l'aimer. Indéfiniment. Mais ce n'est pas possible.

Il s'assoit en tailleur et je fais de même. Le soleil se lève à peine. À quelle heure est son avion ? Je cherche un sujet. Pour retarder son départ. Parce que je suis égoïste et que je veux le garder pour moi.

Lueurs solitairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant