Bonne lecture !
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Assis sur le porche du manoir, dans un fauteuil à bascule en bois, Keiji observait tranquillement la neige tomber à l'extérieur.
Kuroo et Daishou s'étaient enfuis deux jours plus tôt en courant, et arpentait la forêt depuis. Il les entendait parfois hurler la nuit, et à chaque fois Keiji ne pouvait retenir un petit sourire. À présent, il essayait de ne pas s'endormir, enroulé dans une épaisse couverture. Il avait passé l'après-midi à déambuler dans la bibliothèque, et à présent il ne voulait rien faire d'autre qu'attendre.
Attendre le retour de Kuroo et Daishou, celui de Bokuto qui s'était enfermé dans sa chambre, le réveil d'Oikawa.
L'air doux de l'hiver tombait sur sa peau comme un voile, et Keiji expira doucement.
— Tu ne t'ennuies pas ?
Sur le deuxième fauteuil, Hinata était apparu de nulle part. Un sourire espiègle sur les lèvres, il observa Keiji.
— T'aimes bien quand il fait pas beau ?
Hinata pointa l'orée de la foret du doigt, juste devant le manoir. Une épaisse couverture de neige, du vent, des flocons : Keiji aussi aurait appelé cela un mauvais temps, avant. Quand se chauffer était dur, quand l'argent lui donnait sa nourriture, quand ne pas pouvoir aller chasser signifiait rester le ventre vide.
Mais à présent, il pouvait fermer les yeux et sentir les odeurs, entendre les murmures, sentir son cœur faire ces étranges choses qu'il faisait depuis un moment. Keiji ne s'était jamais senti à la fois aussi vivant, et aussi étranger.
Il se sentait plus lui-même que jamais, tout en peinant à se reconnaître.
— J'aime bien la neige, dit-il. Elle parle doucement.
Elle au moins ne lui demandait pas toujours de la rejoindre. Elle n'essayait pas de le convaincre de se transformer en eau, en feu, en terre, ou en air. D'abandonner les humains, les vivants, pour rejoindre quelque chose qui jamais ne mourrait.
La neige se déposait dans ses cheveux, et c'était à la fois froid et chaud.
Hinata pencha la tête sur le côté.
— T'es marrant, comme garçon.
Ses jambes battaient l'air. Ils avaient l'apparence d'un garçon, avec cet air innocent et ces cheveux presque rouges.
— C'est bien que tu sois là. J'aime bien les nombres pairs. Bokuto avait besoin de quelqu'un, je crois.
Keiji avait remarqué ça : Hinata disparaissait parfois pendant des jours, et avec Kenma, ne réapparaissait qu'au moment où ils s'y attendaient tous le moins. Mais quand il parlait, c'était soit avec la candeur de la jeunesse, soit avec la sagesse de la mort.
Aujourd'hui, il semblait avoir fait le choix de la deuxième option.
— Oikawa et Iwa, Kuroo et Daishou, Kenma et moi : c'était un peu triste, de le voir seul. Enfin, Kenma me dit toujours qu'on a pas besoin de quelqu'un pour être heureux, mais l'éternité, c'est long. Moi je suis bien content de l'avoir.
Il rajouta :
— De vous avoir.
Son sourire fit frémir les lèvres de Keiji. Il eut envie de lui dire que lui aussi, mais le vent souffla et avala sa voix.
Il se retrancha dans sa couverture, avec une moue boudeuse discrète.
— Hinata, demanda Akaashi d'une petite voix fatiguée. Je peux te poser une question vraiment indiscrète ?
Le garçon força le fauteuil à se balancer.
— Tu te demandes comment je suis mort, c'est ça ?
Keiji hocha la tête.
Hinata haussa les épaules.
— Je m'en fiche. Tu peux demander. En fait, tu peux demander tout ce que tu veux : quand Kenma n'est pas là, je peux tout dire. Même sur les autres.
Son sourire lui fit un drôle d'effet, et Akaashi le lui rendit. Il attendit, les yeux tournés vers la neige, et il remarqua le temps qu'Hinata mit à se mettre à parler, malgré ce qu'il venait d'affirmer.
— C'était Kenma qui habitait là. Avec ses parents. Ils n'étaient pas très gentils, mais Kenma l'était toujours avec moi. C'est lui qui m'a trouvé et qui m'a caché.
Keiji se demanda deux choses : trouvé où et caché de qui. Il ne dit pas un mot, en revanche, et laissa son propre fauteuil basculer régulièrement. Une biche apparut entre les arbres, regardant Keiji intensément, puis le fauteuil vide où Hinata se trouvait.
Elle s'avança.
— Je ne sais pas à quoi ressemble ton village, mais avant il y en avait un aussi. Je vivais là. Et il y a eu... la chasse aux sorcières. Quand ils ont essayé de me mettre sur le bûcher, j'en ai mordu deux et je me suis enfui. Kenma était noble, et leur maison était immense. C'était bien longtemps avant que Bokuto ne trouve le manoir.
Il regardait le ciel à présent, et la biche monta le perron comme si de rien n'était. Elle s'approchait de Keiji, presque hypnotisée.
— Il m'a caché dans sa chambre, m'a donné à manger, m'a fait rire. Il a pas l'air très bavard comme ça, mais avec moi il est toujours très gentil. Il aime bien les jeux de société qu'il y a au grenier.
Le grenier ? Était-ce là bas qu'ils disparaissaient tous les deux ?
— Ce sont ses parents qui m'ont tué. Sa maman m'a trouvé dans son armoire, un soir. Elle criait beaucoup, et même si je me souviens plus vraiment du reste, je sais que quelqu'un m'a poussé par la fenêtre du troisième. Je suis tombé sur une branche un peu pointue, et la seconde d'après j'étais de nouveau dans la maison, sauf que personne ne me voyait.
Il ferma les yeux. Keiji l'observa attentivement, et se sentit triste au fond de lui. Ce ton détaché, il ne l'aimait pas beaucoup.
— Kenma était... vraiment en colère. Il s'est débattu, il a couru, il a crié : au final, quand il a essayé de descendre les étages pour aller voir si j'étais... blessé, et bien il est tombé dans les escaliers. C'était affreux, et il est apparu devant moi. Son corps était en bas des escaliers. Ça fait tout bizarre, tu sais ? De mourir.
Keiji le croyait sur parole. Ses lèvres se pincèrent, et il souffla finalement :
— Ses parents....
— On a hanté la maison pendant des mois. Au final, ils ont déménagé sans même la vendre, et on s'est retrouvé tout seuls. Tu sais, sans personne à l'intérieur, c'est assez ennuyant. Quand Bokuto est arrivé, avec Oikawa, ils nous ont tenu compagnie. Et quand Oikawa est parti pour aller trouver Iwaizumi, on est resté avec Bokuto. J'ai toujours rêvé d'avoir une famille.
Moi aussi, pensa Keiji. Il ne dit rien, mais Hinata le regarda comme s'il savait.
Trois secondes passèrent, le vent souffla, et soudain Shoyo se redressa vraiment ; il tourna la tête vers la maison.
— Kenma est là. À plus tard.
Il disparut comme il était venu, et la biche repartit vers la forêt.
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Des bisous !
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Somewhere to go || BokuAka
Hayran Kurgu| Bokuto Kotaro X Akaashi Keiji | Fiction terminée | Au cœur des bois, pas si loin d'un petit village perdu au milieu des terres, un manoir se dresse au delà les arbres. C'est là que vivent les personnes dont la société ne veut pas. Là que se retro...