[Terminé][Amour Sucré][Nathaniel]Trauma

Flash-Back Trois - Nathaniel -La Rupture - Mars 2018

Les vacances d'hiver venaient de débuter pour la zone A mais il ne restait plus qu'une semaine pour la zone C. Nathaniel n'avait donc qu'une semaine en commun avec Milla qu'il attendait justement à la gare. Les mains dans les poches, le cou enfoncé dans son écharpe, l'étudiant dansait un pied sur l'autre. Sur les trottoirs, des restes de neige persistaient de la dernière averse.
Enfin, la voix mélodieuse annonça l'arrivée du train avec cinq minutes de retard. Il jura intérieurement et se fit ensuite philosophe : cela faisait quatre mois que Nathaniel n'avait pas revu sa petite-amie, alors il n'était pas à quelques minutes près... Si cela ne tenait qu'à lui, il irait la rejoindre tous les week-end et à la moindre occasion. Il avait financé son permis avec la pension que ses parents lui versaient depuis son émancipation et une bonne occasion avait suffi pour trouver une voiture. Mais la jeune femme avait à chaque fois refusé, prétextant le travail de ses parents ou ses révisions chargées. En plus de cet éloignement, ils s'appelaient moins souvent depuis Noël : deux à trois fois par semaine, au lieu de tous les jours.

Milla n'ait pas non plus venir pour les fêtes, il les avait donc passées seul et cela l'avait profondément marqué. Les relations à distance étaient beaucoup plus difficiles que ce qu'il aurait cru. La solitude le pesait à la suite de son changement de mode de vie, il était seul le soir à travailler encore et toujours ou bien à ruminer sur l'absence de sa soeur, de sa mère, de Milla, ses amis du lycée qui s'adaptaient à la vie d'étudiant alors que lui restait fixé dans le passé.

Il ne s'en plaignait pas trop, se disait que ce n'était qu'une mauvaise période à passer. Il ne voulait pas non plus passer pour le petit-ami possessif, il respectait le choix de sa bien-aimée à faire ses études dans la fac de son choix. Et maintenant qu'il pourrait disposer d'elle durant tout une semaine... Cette simple pensée lui conféra une bulle d'air revigorante.

Enfin, la silhouette massive du train se dessina au loin et la légère excitation, présente depuis déjà deux jours s'accrut encore lorsque Nathaniel vit la silhouette de Milla en émerger. En approchant de lui la jeune femme eut un petit sourire que Nathaniel ne vit pas puisqu'il saisit son visage à deux mains pour l'embrasser, geste aussi vital qu'une inspiration.

— Ça était la route ? Tu n'es pas très chargée pour une semaine !
— Je ne reste pas toute la semaine, je repars mercredi, avoua-t-elle d'une petite voix.
— Quoi ? Seulement trois jours ? Mais pourquoi ? s'étonna Nathaniel dont la voix aiguë trahissait sa grande déception.
— J'ai eu un billet de train en promo, c'était une occasion...
— Mais tu aurais dû me prévenir, j'aurais pu t'aider à payer un autre train...
— Grade ton argent et puis de toute façon, je dois réviser...

Milla marchait devant, son attitude était teintée d'indifférence et d'évitement et Nathaniel sentit une grande tristesse refluait en lui. Il pensait vivre une semaine inoubliable et ce serait le cas, malheureusement.

Le jeune couple rejoignit l'appartement de Nathaniel à pied et durant ce trajet, Milla discuta un peu plus librement mais toujours avec une certaine retenue et évitant le regard de son compagnon lorsqu'il se perdait dans ses yeux bleus. Ils racontèrent leur vie à la fac, les cours, les profs, les amis. L'étudiant en lettres classiques raconta son parcours, ses examens brillamment réussis et Milla en fit de même mais se lamentait du travail incessant à fournir. L'étudiant avait l'impression qu'elle se mettait beaucoup de pression à réussir sa licence, en plus d'un travail occasionnel comme serveuse pour un traiteur. Il la trouvait épuisée, amaigrie et ce fut la raison pour laquelle ils se couchèrent tôt. Nathaniel se colla contre sa douce avec la délicieuse envie de goûter son corps. Ses mains gourmandes se perdirent sous le t-shirt de Milla qui l'arrêta un peu abruptement.

— S'il te plaît, je n'ai pas envie.

Frustré, vexé, Nathaniel n'eut pas l'idée d'insister et se retourna.

Durant les deux jours qui suivirent, Milla avait voulu sortir, aller au cinéma, faire un peu les magasins et profiter de voir ses amis. Pendant tout un après-midi, elle avait été seule chez Rosalya et Leigh où Alexy les avait également rejoints. Nathaniel comprenait qu'elle avait besoin de les retrouver tranquillement mais il ne pouvait s'empêcher de penser que chaque minute avec eux était du temps perdu pour lui de profiter d'elle. Et après avoir pensé cela, il culpabilisait de vouloir se l'approprier. Il répudiait l'idée d'être à l'image de son père, à toujours demander ce que Milla faisait, quand est-ce qu'elle rentrait, qui elle fréquentait. Alors il tenta d'oublier sa peine et se dit qu'il restait une soirée entière et presque une journée avant que Milla ne le quitte à nouveau. Malheureusement pour lui, la jeune femme rentra au milieu de la nuit alors que l'étudiant dormait de l'avoir attendu.

A son réveil à lui, elle dormait encore et, à bout de nerfs, Nathaniel préféra prendre une douche froide au lieu de provoquer une dispute. Il ne voulait surtout pas que le séjour se termine de cette façon mais il sentait une boule amer dans son estomac.

— Tu reviens pour le pont du mois de mai ? questionna-t-il alors que la jeune femme venait à son tour de sortir de la salle de bain.
— Je ne sais pas, on verra en fonction de mes révisions et mes partiels.

Elle avait à nouveau remis une barrière virtuelle entre eux deux et fuyait le regard de son petit-ami. Il ne put s'empêcher de questionner pour la première fois.

— Toi et moi, ça va ?

Il sentit la peau de ses bras frissonner et son estomac se nouer. Il avait posé tout haut la question qu'il se posait depuis déjà longtemps. Il fallait voir la vérité en face, rien n'était comme avant.

— Je ne sais pas, c'est pas pareil c'est sûr...
— Qu'est-ce que tu veux dire par là ? continua-t-il d'une voix affaiblie.
— Mes études me prennent beaucoup de temps et quand je suis avec toi, je n'arrête pas d'y penser.
— Est-ce que passer du temps avec moi, tu trouves que c'est une perte de temps ?

Milla ne répondit pas, son regard était bas et elle semblait retenir sa respiration et Nathaniel, de son côté, n'eut pas le courage de la forcer à le regarder.

— Non, quand même pas mais... ma priorité, c'est ma licence et je pense que toi aussi, tu dois te concentrer là-dessus.
— Moi, je n'ai pas de problème pour mes études, c'est facile, ricana-t-il faussement pour tenter de dédramatiser l'atmosphère.
— Eh bien je ne suis pas comme toi ! se révolta Milla. J'ai pas tes facilités, je ne suis pas aussi brillante ! J'ai pas besoin de distraction !
— Je suis une distraction ?
— Non !
— Attends, tu veux rompre ? comprit Nathaniel, blême.

Milla se releva d'un geste d'humeur, prit son sac et y fourra rapidement les quelques affaires qui traînaient dans la pièce.

— Non pas forcément, répondit-elle en s'attelant à cette tâche. Mais je pensais que ça serait plus facile mais je me suis trompée ! Je pense qu'il serait mieux de faire une pause pendant quelque temps et de voir si on est toujours en phase... proposa-t-elle en haussant les épaules.

L'étudiant se leva à sa suite, paniqué. Il avait froid, glacé de terreur d'être abandonné.

— Attends, il doit y avoir une solution ! Je peux m'inscrire dans ta fac l'année prochaine, prendre un appart' là-bas, tu aura plus de temps pour toi...
— Non Nathaniel ! Tu ne comprends pas ce que je veux !

La jeune femme saisit son manteau au vol, jeta son sac sur son épaule et quitta l'appartement, le littéraire sur ses talons.

— Alors explique-moi !

Milla s'arrêta au milieu du couloir, elle fit volte-face, mais baissa immédiatement le regard, les poings serrés au point que ses ongles entraient dans sa chair. Nathaniel était prêt à se jeter à terre, à la supplier de rester mais il savait que, peu importe ce qu'il ferait, elle partirait et il ne la convaincrait pas de rester. Ils restèrent muets, seules leur respiration se faisait entendre. Il savait que c'était fini et il eut l'impression que son coeur se fendit en deux.

— Milla, murmura-t il.

Elle releva enfin les yeux vers lui, ils étaient humides mais la douleur de ses ongles dans sa chair l'empêchaient de pleurer.

— Je te libère, si c'est ce que tu souhaites.

Ses lèvres remuèrent mais aucun son n'en sortit. Finalement, elle hocha la tête et tourna les talons. Milla quitta l'immeuble et Nathaniel se retrouva seul à nouveau. Pire, il était à nouveau abandonné par une personne qu'il aimait. Il resta de longues secondes debout, inerte, à tenter de reprendre son souffle, incapable de réfléchir. Il reprit une grande inspiration et eut l'impression d'étouffer. Pris d'une crise d'angoisse, il avala de grandes bouffées d'air frais pour laisser échapper le malaise qui l'assaillait. Il sentit un débordement émotionnel le submerger. Il avait le choix de ravager son appartement ou bien de sortir. Il choisit de sortir, vêtu d'un jean et d'un simple t-shirt, il déboucha sur la rue précipitamment et marcha, d'abord de pas hésitants puis plus sûrs et il finit par courir. Il courut comme un dingue jusqu'au parc mais en quelques minutes il fut sur place et ça ne lui était pas suffisant, il continua, sans faire attention aux personnes qu'il évitait, aux rues qu'il traversait ou aux risques qu'il prenait. Pour épuiser son corps, empêcher son coeur d'exploser, il voulait se tuer à l'effort, ou se tuer tout court.