Une fois la photo transférée sur le portable de Cooper, nous nous divisâmes en deux groupes pour gagner du temps et couvrir plus de terrain. Pour une fois la chance nous sourit et nous tombâmes sur notre cible à peine cinq minutes plus tard. Installée avec des amies à l'une des rares tables de pic-nic présentes dans le parc, elle était en train de grignoter une salade en rigolant.— Kara Morales ? attaqua tout de suite Storm de son plus beau ton d'inspecteur de police.
— Oui ? répondit la jeune fille en reposant sa fourchette, l'inquiétude remplaçant immédiatement la gaité dans ses grands yeux bruns. Il y a un problème ?
— Non, tout va bien, m'empressai-je de la rassurer sortant même mon plus beau sourire. C'est pour le recensement annuel du campus, nous aurions quelques questions à vous poser pour affiner les données, improvisai-je, me sentant parfaitement idiote.
— Ah oui ? Bon, d'accord.
Elle posa ses couverts en plastique sur une serviette en papier avant de se lever, échangeant des regards étonnés avec ses amies. Ces dernières nous scrutaient d'ailleurs d'un œil peu amène alors que Kara nous rejoignait, très chic dans son long manteau noir aux reflets bleutés.
— Je ne savais pas qu'il y avait un recensement cette année ? s'étonna-t-elle, les sourcils relevés avec grâce, ses longues mains manucurées remettant en place une mèche de ses cheveux lustrés.
On était tellement loin de l'aspect sauvage et limite débraillé d'Abby, que durant une seconde je m'interrogeai véritablement sur leur parenté. Mais le regard qui croisa le mien ensuite, ne me laissa plus de doute. Même forme longiligne des yeux, mêmes prunelles noisette, jusqu'à la forme du visage quasiment identique à celle de sa sœur.
— N'y en a-t-il pas déjà eu un, l'année dernière ? revint-elle à la charge, son visage passant progressivement de la perplexité à la méfiance.
— Nous ne dépendons pas du même organisme, lui répondit Storm. Le précédent à été négligeant dans le traitement des données, ils nous ont donc demandé de recommencer. Vous faites justement partie des dossiers incomplets, continua-t-il en se fendant enfin d'un sourire. Nous n'avons besoin que de quelques précisions, cela ne prendra pas plus de quelques minutes.
— D'accord, répondit Kara en se détendant légèrement. Que voulez-vous savoir ?
— Vous êtes bien quatre personnes dans votre foyer ? Vos parents, vous et votre sœur Abby ?
— Oui, répondit-elle après une demi-seconde d'hésitation.
— Et cette dernière est bien scolarisée ici avec vous ?
— Oui, mais quel rapport avec des problèmes de recensement ? Tout cela est indiqué dans le formulaire d'admission.
— Justement, il semblerait que votre sœur ne soit pas venue en cours depuis plusieurs mois.
Le visage de Kara changea soudain radicalement, se fermant comme une huitre.
— Elle a changé d'établissement. Elle est en pension à la campagne depuis la seconde révélation. Elle l'a très mal vécue, mais cela aussi vous devriez déjà le savoir ! nous balança-t-elle d'un ton froid et hautain. Qui êtes-vous réellement ? Dites-le-moi ou j'appelle la sécurité.
— Ce ne sera pas utile, nous avons recueilli les données qu'il nous manquait. Bonne journée mademoiselle Morales, lui répondit Storm sans se démonter.
Puis il tourna immédiatement les talons, laissant la jeune fille bouche-bée. Je le suivi avec une seconde de retard, mais ce fut suffisant pour voir Kara sortir son portable de sa poche.
— Nous ne devrions pas traîner dans le coin, chuchotai-je à Storm en le rattrapant.
— En effet, préviens les autres, qu'il faut décoller tout de suite.
J'envoyai un sms à Cooper tout en marchant. L'impression d'avoir tous les regards fixés sur moi me rendait parano et je devais réfréner l'envie impérieuse de me retourner. Nous atteignîmes la voiture en quelques minutes, soulagés d'y trouver Jenny et Cooper déjà au volant. Sans un mot nous grimpâmes dans l'habitacle et Cooper démarra aussitôt. Deux vigiles déboulèrent sur le parking, pile au moment où Cooper négociait la marche arrière.
— Baissez-vous ! nous ordonna-t-il en coiffant en un tour de main une casquette et des lunettes de soleil, sorties de la boite à gant.
Storm et moi nous aplatîmes sur la banquette arrière pendant que Jenny attachait ses cheveux en un chignon serré et chaussait une vieille paire de lunette à monture rectangulaire sortie de son sac à main, qui lui donna instantanément un air de bibliothécaire. D'autres vigils, talkie-walkie à la main, arrivaient des quatre coins du parking, scrutant avec attention tous les véhicules. Cooper, sans accélérer, s'inséra dans une file de voiture se dirigeant vers la sortie. Nous avancions à deux à l'heure tandis que le service de sécurité du campus s'agitait en tout sens. Le stress était palpable dans l'habitacle et il grimpa encore d'un cran, lorsque deux hommes en uniformes chargés de barrières nous dépassèrent en petites foulées.
— Vite, il faut sortir de là avant qu'ils n'installent le barrage ! siffla Jenny entre ses dents.
— Merci pour l'info ! Tu crois que j'essaie de faire quoi là ? maugréa Cooper en réponse, bifurquant soudain à gauche pour tenter de court-circuiter la queue qui s'éternisait.
— Tu vas nous faire repérer !
— Si tu as une meilleure idée, je t'en prie, fais-toi plaisir !
Le ton grinçant de Cooper céda vite la place à un petit cri de victoire, lorsqu'il réussit à se réinsérer dans la file, à une voiture de la sortie. Le break qui nous précédait passa la barrière du parking à une allure d'escargot qui me donna des envies de meurtre. Cooper, qui lui collait au pare-chocs, n'attendit pas que la barre retombe et s'engagea à sa suite dans un crissement de pneus tout sauf discret. A la seconde où nos roues touchèrent le bitume de la route, la première barrière commençait à fermer la sortie du parking.
— Ouf, c'était moins une ! gémit Jenny en enlevant ses lunettes pour se frotter les yeux.
— Comme tu dis ! souffla Cooper en se débarrassant à son tour de son déguisement sommaire. Vous avez fait quoi pour les énerver comme ça ?
— Poser les mauvaises questions à la mauvaise personne, apparemment ! répondit Storm en se redressant. Et vous ? Du nouveau ?
— Alors là, vous n'avez pas idée ! Je pense que l'on est tombé sur du lourd.
— Lourd dans quel sens ? demandai-je à Cooper tout en récupérant mon portable qui venait de vibrer dans ma poche.
— Plusieurs étudiants nous ont parlé de Kara et de ses copines. Il parait qu'elles ne se mêlent à personne et ferait partie de la même église baptisé L.N pour « Liberté Nouvelle » et qui vient de s'installer dans le quartier, il y a à peine six mois. Je trouve ça un peu gros pour une coïncidence, pas vous ?
— Tu penses à quoi ? lui demanda Storm.
— Pour moi, ça sent la secte à plein nez, cette histoire. Sans parler des initiales. L.N ça ne vous rappelle rien ?
« Lupus Nostrum », pensai-je sinistrement alors que mon téléphone vibrait de nouveau entre mes mains, se rappelant à mon bon souvenir. Je le déverrouillai d'une pression du pouce et lu machinalement le message qui s'affichait.
« Besoin d'aide de toute urgence, venez vite »
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Je profite de ce dernier chapitre de l'année pour vous souhaiter une très bonne et heureuse année 2021 !!*o*!!
En espérant qu'elle soit meilleure que 2020 et vous apporte santé, joie, bonheur et réussite dans tout ce que vous entreprendrez <3 <3 <3
Des bisous et bon réveillon <3 <3 <3

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Lupus Nostrum
ParanormalSuite au plan machiavélique de Ivory consistant à lâcher une horde de loup-garou sur les humains, le temps de la conciliation est révolu. Les métamorphes sont désormais traités comme des monstres et des parias et forcés de se cacher ou de se défend...