23. You, kings, you don't care, that's not what you like.

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"- Parle-moi..."

May était partie vu l'heure avancée, elle travaillait le lendemain, elle ne pouvait se permettre de prendre plus de jours de congés. Son patron était gentil, pas à ce point. Jie n'avait pas cours donc elle accompagnait Lenny qui avait décidé de faire la muette depuis la dernière phrase de May. Enfin plus maintenant.

Écrasant la cigarette dans le cendrier, Jie regarde la boule formée par le corps de la brune sous la couverture.

"- De quoi ?

- De toi... Ça me fait du bien de penser aux autres..."

Jie réfléchit et le visage de Chris lui revient en tête. Le visage carré, sa pomme d'Adam prédominante, ses grandes mains, sa voix grave, sa taille élancée,... Elle en frissonna de dégoût.

"- Je hais les hommes."

Lenny fronce les yeux, cachée sous sa couette, elle écoute. Elle s'était rapprochée de Jie, loin d'être sa meilleure amie, mais elle voulait en savoir plus. Son cerveau s'était mit en pause, son obsession envers Aina s'était affaiblit, elle ne pensait plus aussi souvent à cette femme.

"- J'en ai une peur bleue."

Jie commence à frissonner. Ses souvenirs d'enfance reviennent petit à petit. Lenny sort sa tête de sa couette. C'est étrange, voir une petite faille chez Jie l'avait éveillé. Comme une petite flamme.

"- Quand j'étais petite... Mon père me frappait souvent pour un oui ou pour un non. Il représente ma plus grande peur aujourd'hui. L'odeur de musc, ses vêtements qui traînaient partout, ses grandes mains qui me faisaient si peur, son tique de se mordre la langue avant de me frapper."

Jie renifle doucement. C'était adorable. Non pas son vécu passé, mais la façon qu'elle a d'acquiescer un léger sourire pour dire "Tout va bien, je vais bien". Moi, Lenny, je voyais cette petite flamme qui m'avait fait succomber chez Aina. Ce n'était pas une flamme puissante, juste une légère chaleur, fragile.

"- Le nombre de fois où des bleus se dessinaient sur mon visage ou sur mon corps... Le nombre de fois où j'ai dû inventer des excuses à l'école..."

Je glisse doucement ma main sur la sienne. Sa peau laiteuse était froide. C'est la première fois que je remarque la taille de ses mains. Elles étaient plus petites que les miennes. Juste un peu.

"- Tu veux savoir... Il représente mon traumatisme le plus grand et pourtant... Je ne me souviens pas de son visage. Dans mes souvenirs de lui, je vois ses mains me frapper, sa langue se mordre mais son visage est comme flouté par mes larmes."

Jie ricane légèrement en essuyant ses larmes. Non... Je voulais m'excuser de lui avoir demandé de faire revenir ces images dans sa tête. J'aimerais être une de ces divinités capables d'effacer la mémoire. De remplacer ses larmes par des rires. Supprimer cet homme de son esprit.

"- Aujourd'hui, il ne fait plus partie de ma vie mais jamais je ne pourrais oublier sa place dans ma vie.

- Jamais je ne lèverais la main sur toi."

Cette phrase m'avait glissé des lèvres, naturellement. Je ne lui devais rien, ce n'était qu'une promesse entre deux femmes qui s'aiment, alors pourquoi cette phrase me pèse lourd dans la poitrine. Comme si elle scellait une union entre elle et moi ?

"- Je sais..."

Jie soupire comme soulagée de l'avoir dit au moins une fois dans sa vie. Je la tire sous la couette en ricanant. Son petit rire avait tout de suite détendu l'atmosphère. Jie n'était pas vulgaire, je m'en voulais presque d'avoir pensé ça, à notre première rencontre.

Jie vient me rejoindre sous la couette en souriant. On pourrait dire que c'était enfantin de faire cela, mais avec May, Aina et les souvenirs de Jie, nous avons besoin de cette légèreté pour cette journée.

Jouant à se chatouiller et à rigoler, nous nous sommes endormies, l'une contre l'autre, à peine minuit passé. C'est sans doute l'une des meilleures nuits de ma vie.

The 13th StreetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant