CHAPITRE XLV - LA VIE ÉTERNELLE

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Hélio avait regardé les deux soldats descendre lentement, essayant tant bien que mal de se dépêtrer de la glace qui s'étendait jusqu'au plafond comme un geyser figé. Puis, sans leur porter plus d'attention, il avait avancé en direction de la fontaine de jouvence. Dans sa main droite, il tenait le calice d'or qui avait retenu plus tôt dans la nuit le sang mélangé de ses fidèles, et qu'il avait répandu dans l'océan furieux. Arthur le sommait de s'arrêter, Hector l'insultait dans un langage des plus châtiés, mais il n'aurait reculé pour rien au monde : c'était la dernière ligne droite vers son objectif.

Alors qu'il ressassait ses souvenirs, les yeux fermés, passant en revue, comme un vieux film, les événements de sa vie qui l'avaient conduit ici, il entendit un bruit sur sa gauche. Les deux jeunes soldats étaient finalement parvenus à descendre de sa sculpture de glace. Quelle n'avait pas été sa surprise de les voir chuter avec le reste du plafond... Il n'avait rien contre eux pourtant. Lorsqu'il avait aperçu Arthur à Fort-Tempêtes, il avait même éprouvé de l'affection pour lui, car il semblait être une version assagie de son propre fils Soles. Ces boucles blondes, cet air déterminé, et cette lueur d'intelligence dans ses yeux brillants... Il ne voulait pas l'amocher, et ferait son possible pour limiter les dégâts. C'était une promesse qu'il se faisait à lui-même.

Les deux soldats n'avaient montré aucun signe de patience : une fois descendus de l'arborescence glacée, dès que leurs pieds avaient retrouvé la terre ferme, ils s'étaient élancés vers le pirate. Hector avait les poings et les mâchoires serrés, il fulminait, tandis qu'Arthur dégainait Excalibur. Ils avaient peur, bien sûr, de cette légende de la piraterie, mais ils avaient bien plus peur encore de ce qu'il adviendrait s'ils ne parvenaient à l'empêcher d'accomplir ses desseins.

Cette peur était leur moteur. La peur de l'échec, bien sûr, du jugement de l'autre aussi, mais surtout la peur qu'avec un tel pouvoir, un être aussi puissant que Hélio ne ravage le monde auquel ils tenaient. Pour défendre, pour protéger, ils étaient prêts à ne courir aucun risque.

En les voyant courir vers lui à toute allure, Hélio se tourna lentement, et leva sa main droite avec une infinie délicatesse. Ses lèvres bougèrent légèrement, mais la tension était telle dans le crâne d'Arthur que le bourdonnement assourdissant qui lui encombrait les oreilles ne lui permit pas d'entendre ses mots.

Il sentit aussitôt sous ses pieds le sol se dérober, et ne prit pas le temps de regarder ce qu'il se passait : il attrapa Hector et se jeta en avant, alors qu'un nouveau mur de glace s'élevait là où ils s'étaient trouvés quelques secondes auparavant. Ils roulèrent sur le sol de pierre, se relevèrent immédiatement, et comme d'un mouvement unique se jetèrent à nouveau sur leur adversaire. Pour la première fois, il leur faisait face, avec le plus grand des sérieux. Sa main droite s'agita de nouveau, et d'épaisses racines sortirent du sol pour saisir les deux soldats : d'un revers de l'épée, d'un coup de poing surpuissant, ils s'en débarrassèrent, poursuivant leur inexorable assaut. Rien ne pouvait les arrêter.
Hélio sourit, et ferma le seul œil qui lui restait :

- Vous n'allez pas me laisser tranquille, à ce que je vois. Je suis désolé pour ce qui s'apprête à se passer.

- Pas autant que nous ! hurlèrent Arthur et Hector à l'unisson.

...

En pistant la trace de Haru, Jun était parvenue, avec Emmy et Igana, à rejoindre la grande salle dorée où se trouvait la jeune femme, en compagnie de Jorge. Alors qu'elle pansait les plaies de son ami, elle avait aperçu leur camarade et était allée à sa rencontre, se jetant dans ses bras.

- Je suis si heureuse que tu n'aies rien, déclara Haru en serrant Jun contre sa poitrine. Vous n'êtes pas trop secouées, toutes les deux ?

- Tout va bien, répondit sobrement Igana.

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant