CHAPITRE 25 (1/2)

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ZOIA

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ZOIA

Attendre. 

Zoia avait l'impression que sa vie se résumait à attendre. Le bon moment. La bonne personne. Les bons mots. Et Zoia, elle, elle n'aimait pas spécialement attendre. En fait, elle était carrément impatiente. Si ça n'avait tenu qu'à elle, elle se serait déjà introduite dans la maison, et elle aurait fouillé le musée, clairement déserté, pour trouver le Parchemin Sacré. Mais voilà, les choses ne tenaient pas qu'à elle. Et elle ne pouvait pas agir aussi égoïstement. Pas maintenant.

Nael était assis à côté d'elle dans l'herbe. Ils avaient choisi de se cacher près d'un grand arbre, derrière la maison. De cette façon, ils étaient camouflés par l'obscurité, tout en ayant une vue imprenable sur les allées et venues du couloir. La jeune femme s'était enfermée dans le silence. Son visage s'était assombri à mesure qu'ils s'étaient approchés de son ancienne maison, et ce soudain air désolé n'avait rien à voir avec l'obscurité.

Le soldat avait pourtant mainte fois essayé de briser la glace, mais la jeune femme ne réagissait qu'à peine. Quand elle n'avait pas le regard fermement fixé sur le couloir, elle arrachait prestement les brins d'herbes et les jetait autour d'elle. Revoir cette maison, qu'elle avait tout fait pour oublier, lui coupait la langue. Elle ne savait plus vraiment parler, plus vraiment penser. Les souvenirs l'envahissaient, et lui laissaient un goût amer dans la bouche.

Dans cette demeure, on lui avait broyé les ailes. On l'avait privé de sa liberté. On lui avait volé sa vulnérabilité. Ses démons se cachaient dans chaque recoin de chaque pièce, prêt à lui sauter dessus au moment où elle faiblirait. Elle voulait rester forte. Mais son cœur battait désespérément dans sa poitrine. La petite voix dans sa tête lui hurlait de s'enfuir, tant qu'il en était encore possible. Mais elle luttait. Elle résistait contre sa volonté.

Le soleil avait complètement disparu dans le ciel. Dans ce dernier, pas la moindre trace d'un joyeux nuage aux couleurs enjouées. Le firmament étoilé lançait sur eux un regard attristé, spectateur à cette fatidique soirée. Au loin grondait l'orage. La tempête n'était pas loin. Elle leur tomberait bientôt sur le coin de la tête. Mais les grognements des tonnerres étaient trop faibles pour couvrir la voix qui s'éleva soudainement de la maison.

Zoia reconnut immédiatement l'orateur.

Asael avait une voix de charmeur. Il avait le pouvoir d'émerveiller avec ces mots acérés, de séduire avec ces paragraphes sagement pensés. Il n'y avait pas plus fin négociateur que lui. Mais Zoia n'était jamais tombée dans son piège. Le dicton disait que le venin de serpent n'atteignait pas les ailes de la blanche colombe. Tant mieux pour elle. Elle avait laissé ses ailes en enfer.

« Tu entends ça ? » demanda Nael, en levant précipitamment la tête.

D'aussi loin, il était trop difficile d'entendre distinctement les mots que Faure servait à son assemblée. Pourtant, Zoia imaginait parfaitement ce qu'il disait. Elle avait suffisamment vécu avec son mari pour comprendre une partie de ses noirs desseins. La guerre. Tout simplement. L'homme nourrissait une rancune terrible contre le pays d'à côté. Cependant, la jeune femme ne comprenait pas comment les membres de l'organisation, qui se rassemblaient tous sous ces ordres, pouvaient encore le croire.

Hormis le soutien du roi, Faure n'avait rien, absolument rien, qui l'aiderait à gagner la guerre.

Un sentiment désagréable s'insinua dans ses veines à cette pensée. Asael n'était pas un idiot. Il devait probablement avoir un plan pour sa conquête ultime. Ou une arme qu'elle ne soupçonnait pas.

« Rapprochons-nous un peu. » proposa-t-elle tout de même.

Nael hocha la tête, et ils se levèrent précautionneusement. Ils prêtent une attention particulière à leurs mouvements, se veillant à rester dans l'ombre du bâtiment. Lorsqu'ils arrivent près d'une large fenêtre du couloir, les brides de paroles s'assemblèrent bien plus clairement.

Asael était en train de leur souhaiter une bonne soirée. Très rapidement, les exclamations enjouées et la musique classique remplaça les brides de voix. Ils avaient raté le discours. Zoia pesta intérieurement. Mais elle savait très bien que ses amis se feraient un plaisir de lui relater les inepties que son mari avait osé profaner. Et puis, qui disait fin du discours, disait également déplacement du Parchemin Sacré. C'était le moment qu'ils attendaient.

Pourtant, le Parchemin brilla pour son absence ... Ils attendirent une bonne minute. Puis, une deuxième. Troisième. Cinquième. Le Parchemin ne venait toujours pas. Zoia commença à s'impatienter.

« Pourquoi est-ce qu'ils ne déplacent pas le parchemin ? » pesta-t-elle à voix haute.

Nael tourna la tête dans sa direction, un air sombre sur le visage.

« Est-ce qu'ils seraient passé par un autre chemin ? »

La jeune femme jeta un coup d'œil dans le couloir, mais toujours aucun mouvement. C'était étrange ... Est-ce que son mari avait décidé de laisser le Parchemin à la vue de tout le monde ? Cela ne lui ressemblait pas ... Asael avait peut-être changé. Après tout, un long moment séparait leur dernière rencontre. Mais elle en doutait fortement. Son mari avait toujours été paranoïaque. Ce fait-là n'avait pas changé en seulement quelques mois.

« Non. C'est le seul passage jusqu'à son musée. » répondit-elle sans lever son regard du couloir.

Soudainement, une silhouette se dissocia de l'obscurité et son cœur rata un battement. L'ombre s'approcha dangereusement de la fenêtre où ils se cachaient, mais passa à côté sans les remarquer. Zoia avait, cependant, eut le temps d'apercevoir le visage de la silhouette.

Et son cœur s'était réellement arrêté.

Lui.

Qu'est-ce qu'il faisait ici ? Elle avait entendu dire qu'il se trouvait actuellement au palais de Grim, pour le renouvellement des traités de paix. Alors, pourquoi venait-il de surgir de l'obscurité ?

Zoia étouffait. Elle n'arrivait plus à reprendre son souffle, et son cœur exultait. Elle nageait en plein cauchemar. D'abord, la maison. La voix d'Asael qui avait fait frémir toutes les cellules de son corps. Et maintenant, l'homme qui avait bouleversé sa vie.

Enfin, la colère déferla dans ses veines.

« Tu as vu cette silhouette ? » demanda Nael en chuchotant.

Mais Zoia ne l'écoutait déjà plus. Le sang pulsait dans ses veines, et elle n'entendait que ce tambour de guerre. Boum boum. Tout ce qui l'entourait avec été effacé. Il n'y avait qu'elle. Et cet homme, qui marchait lentement dans le couloir. Ses pieds claquaient contre le marbre. Boum boum.

Comme un automate, elle se leva précipitamment.

« Zoia ? »

Elle ne prit même pas la peine de lui répondre. Ses jambes se mirent en marche d'elle-même. Ses dernières faillirent céder sous son propre poids mais l'adrénaline prit le relai. Ce n'était plus du sang dans ses veines. Mais un mélange de haine et de tristesse. Elle longea le couloir jusqu'à trouver une ouverture suffisamment grande pour qu'elle puisse s'y glisser à l'intérieur. Une fois dans le couloir, l'obscurité l'accueillit comme une vieille amie. Le silence également. Il n'y avait plus de bruit de pas contre le sol. Ni de tambour de guerre.

La silhouette se trouvait à l'intérieur du musée. Sans hésitation, Zoia y pénétra à son tour. Elle n'avait jamais été autorisée dans cette pièce. Pourtant, une fois à l'intérieur, elle ne prit même pas le temps de la détailler.

Toute son attention était focalisée sur l'homme en face d'elle. Elle ouvrit alors la bouche, puisant dans son cœur le courage dont elle avait besoin pour le confronter.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? »

L'homme se retourna brusquement, surpris.

« Zoia ? »

D'IRE ET DE BRAISES - Tome 1 : le parchemin sacréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant