CHAPITRE 32 (2/2)

17 6 5
                                    

DONOVAN

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou télécharger une autre image.

DONOVAN


Un coup léger à sa porte le tira de sa léthargie. Il ne dormait pas vraiment, mais il avait fermé les yeux suffisamment longtemps pour le faire croire. Il grogna, signifiant à la personne qui avait toqué qu'elle pouvait rentrer, et il observa ensuite la fine silhouette de Iema se glisser dans la cabine. Elle portait dans sa main un petit récipient d'où s'échappait une soupe fumante.

Attiré par les odeurs, l'estomac de Donovan se rebella instantanément. Avec un sourire, Iema s'approcha du lit et lui tendit le breuvage. Elle s'assit à ses côtés, tandis qu'il s'empressait de commencer à manger.

C'était le deuxième jour, déjà, qu'ils étaient en mer, et Donovan était carrément agacé de ne pas pouvoir se déplacer. Il aurait tout donné pour simplement pouvoir sentir la caresse du vent contre sa peau. Mais la sentirait-il encore ? Après tout, la moitié de son corps ne ressentait même pas le toucher de ses doigts. Il essaya de repousser l'amertume, mais trop tard ; elle se déposait déjà sur sa langue et rendait son breuvage imbuvable.

« Est-ce que tu as bien dormi ? »

Il tourna la tête dans la direction de la jeune femme, lui offrant une sorte de grimace à la place d'un sourire.

« Oui. » mentit-il.

Elle lui jeta un regard en biais, avant de baisser les yeux. Si elle avait décelé son mensonge, elle ne le lui reprocha pas pour autant. Donovan posa le petit récipient à côté de lui, sur le lit, et reprit :

« Qui tient le gouvernail ? »

Iema grimaça.

« Nael. »

Et Donovan copia son expression. Même s'il n'était plus spécialement en colère contre le soldat, il ne pouvait s'empêcher d'être carrément exaspéré ... Ce qui revenait à la même chose, en soi.

« C'est un miracle que nous ne soyons pas encore encastré dans un rocher. » grimaça-t-elle.

Donovan réprima un petit éclat de rire.

« J'ai frôlé la mort à Castel, ce n'est pas pour la trouver en mer. »

L'attitude changea brusquement. Le visage d'Iema se figea, et elle baissa les yeux. Donovan l'observa pendant de longues secondes, incapable de trouver les mots pour briser le silence qui s'était installé.

« Je suis désolée. » finir par murmurer Iema.

La jeune femme évitait soigneusement son regard. Sur ses genoux, ses jointures blanchissaient sous l'assaut de ses poings serrés.

« Désolée pour quoi ? » demanda doucement Donovan.

Les yeux d'Iema papillonnèrent dans sa direction. Ils se croisèrent, quelques secondes, avant qu'elle ne baisse la tête et se morde les lèvres. Donovan avait eu le temps, cependant, de remarquer la culpabilité de son regard. C'était donc cela.

La culpabilité.

« Pour tout ce qui s'est passé. Si je n'avais pas été aussi faible, Caelum n'aurait pas eu besoin de se transformer... » commença-t-elle, essayant de maitriser le chagrin qui paralysait ses mots. « Si Caelum n'avait pas essayé de me protéger, le bâtiment n'aurait jamais pris feu ... Et tu n'aurais jamais ... »

Donovan leva brusquement la main, interrompant ainsi la jeune femme.

« Iema. Tu n'y es pour rien. »

Sa voix sonna plus froide qu'à l'accoutumée. Le visage de la jeune femme s'était figé. Donovan prit alors soin de choisir avec précaution ses prochains mots et d'adoucir son ton.

« Si les choses étaient à refaire ... J'agirai probablement de la même façon. »

Au loin, le fracas des vagues résonna contre le proue du navire. Le regard d'Iema était profondément ancré dans le sien. Il ne mentait pas en lui disant cela, car il le pensait réellement. Si ses amis lui demandaient de se jeter à nouveau dans les flammes pour sauver leur cause, il le ferait. Les yeux fermés.

« C'est moi qui ai sauté dans ses flammes. Tu ne m'as pas forcé. » continua le colosse de glace.

La jeune femme se mordit les lèvres, tandis que son regard se teintait de sa culpabilité.

« Je sais, mais ... »

Il leva la main une deuxième fois pour l'interrompre à nouveau. Cette fois-ci, il lui offrit l'ébauche d'un sourire.

« Le passé est le passé. »

La jeune femme accueillit ses paroles en silence. Tout comme lui et ses erreurs passées, elle ne pouvait pas changer ce qu'il s'était passé. Et elle ne pouvait pas non plus refaire le monde, à la force de ces deux mains. Il ne servait à rien de garder la tête tournée vers l'arrière, quand le futur se trouvait juste au bout de son nez. Il était très bien placer pour le savoir. Après tout, il vivait aussi avec sa propre croix à porter-

Iema hocha rapidement la tête, comprenant là où Donovan voulait en venir. Un véritable sourire étira alors les lèvres du colosse de glace.

« Je ne t'en veux pas. Et je ne t'en voudrais jamais. » rajouta-t-il.

Les yeux de la jeune femme se remplirent de larmes, et elle baissa la tête pour les dissimuler. Maladroit comme il était, il ne savait pas vraiment quoi dire, ni quoi faire, pour apaiser le chagrin de la jeune femme. Il finit par reprendre :

« Et puis, comme ça, nous avons chacun nos cicatrices. »

Il leva sa main valide et pointa du doigt le petit carré d'encre qu'il devinait sur le poignet d'Iema. Ce numéro indélébile, marqué dans sa peau comme on marquait une bête sauvage. La jeune femme tiqua brusquement, mais résista à l'envie de dissimuler l'évidence de leur passé commun.

Le sourire de Donovan se fana légèrement. Au fond de lui, il ne comprenait pas comment la jeune Iema pouvait le regarder sans se laisser submerger par la haine. Il était l'homme qui avait détruit sa vie, l'homme qui l'avait arrachée à sa famille. Pourtant, elle lui tendait la main, comme s'il n'était pas le monstre qu'il avait toujours été.

« Comment peux-tu ne pas m'en vouloir ? Après tout ce que je t'ai fait ... » finit-il par murmurer, libérant ainsi le doute qui planait sur son corps.

Il se rendit compte qu'un poids venait de s'envoler de son estomac. Il ne s'était jamais rendu compte qu'il avait eu besoin de cette réponse pour avancer. Pour se pardonner.

Mais il était temps désormais. De faire la paix ...

Le visage d'Iema effaça ses larmes d'un joli sourire, tandis qu'elle lui soufflait doucement :

« Un grand homme m'a dit un jour que le passé est le passé. »

D'IRE ET DE BRAISES - Tome 1 : le parchemin sacréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant