33| Alyos

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Depuis deux heures je les écoutais déblatérer des idioties entre eux, mangeant leurs chips, avachis sur les vieux canapés du Centre. Je ne les écoutais pas, les mains plonger dans les poches, les yeux dans le vide, je ne pouvais plus arrêter de penser à la sensation de froid qui m'avait envahi en quittant ses bras ce matin. Elle avait à peine cillé devant tout le bruit que je faisais à côté d'elle, je n'avais pas l'habitude d'avoir quelqu'un d'autre chez moi. Depuis quelques jours j'étais en retard chaque matin, je me perdais dans la contemplation de son corps sous les draps, de son visage d'ange et de ses cheveux brillant comme de la soie claire sous les rayons du soleil. Je me sentais plus détendu et parfois cela m'énervait, surtout quand Julien me disait que je me ramollissais, je lui lançais alors un doigt d'honneur sans lui répondre et m'en allait fumer.

- Donc tu es sûr que ton père se pointera à la course ? fit la voix enrouée d'Aïko.

- Il viendra, je repris en tirant sur un reste de tapisserie pour l'arracher. Il ne manquerait pas la chance de voir ses deux fils s'affronter dans un combat mortel et de participer à ce carnage.

- Donc tu comptes défier Tancho et ton père ?

- Je vais faire bien plus... Je vais les tuer.

- Je peux le faire à ta place, j'ai quelques comptes à régler avec ces enflures.

Sa voix nous surprit tous, elle passa la porte constituée seulement d'un rideau lourd et épais, ses cheveux étaient relevés en chignon et elle portait une robe noire dont les épaules étaient dénudées. Elle s'approcha et me déposa un léger baiser sur la bouche avant d'aller s'assoir à côté de son frère qui me fusillai encore et toujours du regard.

- Tu connais Tancho ? demanda Julien les sourcils levés.

Elle serra les dents aux souvenirs qui devaient lui revenir mais elle ouvrit la bouche et raconta tout ce qu'elle m'avait appris il y a quelques jours. Tout avait commencer par son arrivé à l'université sous le nom de Thomas. Ils s'étaient fréquentés jusqu'à s'embrasser, je serrais les poings, elle raconta d'une traite la soirée où elle était venue chez lui pour le larguer. Elle semblait gorgée de haine et elle bougeait ses doigts comme si elle voulait le frapper. Son frère l'écoutait, devenant de plus en plus énervé, pendant un instant je crus qu'il allait se lever et sortir pour vomir devant l'immondice des actions de Tancho. Elle acheva son récit et tout le monde resta silencieux. J'avais la mâchoire si serrer que j'avais mal dans tout le crâne. Elle avait prononcé les mots qu'il lui avait dit. Il voulait la violée pour me passer devant, lui infliger la pire torture pour me faire enrager et ça aurait marché, rien que maintenant, je voulais le torturer pendant de longues heures, le voir se vider de son sang lentement jusqu'à ce que ses yeux deviennent vitreux et que son corps expire son dernier souffle.

- Si quelqu'un doit le tuer, je m'en chargerais. Inscris-moi pour la Dryland Julien.

- Il est hors de question ! riposta son frère.

- Si je le défi lors de cette course il viendra et je suis sûr qu'il amènera ton père, dit-elle en me lançant un regard. Il ne manquerait pour rien au monde la mort d'un Lower non ?

J'acquiesçai. Il n'en fallut pas plus à Aïko ; il me sauta dessus en m'envoyant ses poings. Je l'évitai et il grommela une insulte doublée d'un cri de douleur. Il n'avait pas encore cicatrisé totalement et ses blessures restaient douloureuses. Aïko refusait en criant que j'étais cinglé d'accepter. Mais elle savait ce qu'elle voulait et je serais incapable de faire pencher la balance de ses choix. J'étais pourtant opposer à ce choix mais si j'avais le temps de réfléchir un peu plus à tout cela, je trouverais sûrement un moyen de ne pas l'impliquer. Je réfléchirais ce soir, quand elle dormira dans mes bras. Julien partit avec Aïko pour publier l'annonce de la Dryland et pour en inscrire les premiers participant. Il sorti en trainant le frère de Romy qui continuait de m'insulter et d'interdire à sa sœur de participer à la course. Louisa se leva et sortit en prétextant avoir des choses importantes à faire. Une fois le rideau retomber je me tournai vers elle. Romanellia avait le dos tourner vers une fenêtre brisée et regardait probablement le marché noir qui se déroulait en face. Il y avait foule aujourd'hui, le raffut que chaque discussion faisait me rassurait et les rires fusaient avec le tintement des choppes de bières qui s'entrechoquaient. Mais en marchant vers elle je compris qu'elle ne faisait pas attention à tous ces gens, elle regardait le vide avec rage.

Night DriverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant