37| Alyos

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Le matin était venu à vitesse ralentit, nous nous étions levés, les mains accrochées l'une à l'autre ne cessant de nous retourner pour voir si l'autre se tenait toujours là, pour s'assurer qu'il ne s'était pas évaporé. Nos yeux étaient rouges et nos joues craquelées par les larmes qui avaient séchées. Je n'avais pas dormi et elle non plus. Le silence parlait pour nous, nos regards en disaient bien plus que nos mots. La journée passa lentement, elle aussi. L'effervescence du centre me requinquât un peu mais c'est toujours les mains liées que j'avançais. C'était aujourd'hui que j'allais me battre pour tous ceux que j'aimais, pour en finir avec ces tourments, pour en finir avec cette histoire, une bonne fois pour toute.

Je n'avais qu'un seul espoir : pouvoir serrer de nouveau contre moi, celle qui faisait battre mon cœur. Personne ne se doutait, à part mes amis, de ce qui viendrait ce soir, de l'enjeu de cette course. Ils n'avaient pas conscience de ce qui se tramait dans l'ombre. J'étais sûr qu'il viendrait, il ne louperait pas ce seul moment d'action qui lui permettrait de se montrer à nouveau triomphant et terrifiant, comme il l'était autrefois. J'allais lui faire payer tous les traumatismes qu'il m'avait infligés, ceux de ma famille et ceux du groupe des SerpentSand. Julien me répétait l'organisation et l'avancée des choses mais comme un condamné à mort j'avançai du mieux que je pouvais. J'écoutais ce qu'il me disait d'une oreille distraite en regardant autour de moi et me collant contre Romy. L'effervescence était dingue et tout le monde accrochait des banderoles à la ligne d'arrivée. D'immenses tentes avaient été montés pour accueillir les participants et le protéger du vent poussiéreux qui s'élevait. Romanellia observait tout d'un œil attentif, comme si elle cherchait à repérer la silhouette de mon père.

- Alyos, mon site est bloqué, je n'ai plus accès à la liste entière des participants. Personnes n'a pu s'inscrire au-delà du dix-huitième rang...

- Voilà notre confirmation... fis-je plus pour moi-même. Il sera là.

- Je pense, oui.

Le vent fit trembler les toiles autour de nous comme en confirmation de ce qui se préparait. Il était temps pour moi de réunir les derniers êtres sur terre qui m'appréciait encore un peu. Mon cœur se serra.

-Ils arrivent, fis Julien quand je lui demandais de contacter Aïko et Louisa.

Ils entrèrent bras dessus bras dessous dans la tente, le regard absent. Ils s'assirent autour de la table.

- Si je pleure tu auras le droit à la chaise électrique, me réprimanda Louisa en croisant les bras.

Les rires qui s'élevèrent de nous étaient alourdis par la tragédie imminente. Je me dégageai la gorge et leur lançai un sourire sincère mais triste.

- Merci à vous d'avoir été présent dans ma vie. Merci à toi Aïko, malgré la colère que tu auras toujours contre moi pour aimer ta sœur, merci d'avoir été le plus fidèle compagnon et confident qui m'ai été donné d'avoir. Merci à toi Louisa, de supporter cette pauvre tache que je suis, tous les jours, de t'énerver contre moi et d'être chiante quand je dépasse les bornes. Merci à toi Julien que je connais depuis petit et même si tu me faisais peur au début, à parler de codage et ordinateurs dans chacune de tes phrases jamais je n'aurais échangé notre amitié contre quoi que ce soit.

Je fis une longue pause pour les regarder tous les trois, les larmes aux yeux. Puis je tournai la tête pour saisir le regard intense de la fille qui se tenait à mes côtés, essuyant une petite larme dans le coin de son œil.

- Et toi Romy, celle qui a fait fondre ma glace et m'a apporté le printemps dans mon automne éternel. Jamais je ne pourrais rembourser la dette que j'ai envers toi mais je vais m'en défaire d'une partie ; je vais faire de ton passé une chose révolu, rendre la justice que tu mérites, celle que vous deux avez mérité, dis-je en englobant son frère du regard. Aujourd'hui nous sommes sur la dernière ligne droite les amis. Merci à vous d'avoir pardonner toutes mes erreurs ou de les avoir tolérés. Vous êtes ma famille. Celle que j'ai choisi d'avoir et que j'aime bien plus que ma propre vie.

Night DriverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant