38| Romanellia

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J'avais retrouvé l'énergie que je n'avais pas eu depuis bien longtemps. Je me faufilai alors dans la tente qui semblait accueillir tous les participants. Je me dirigeais vers la cabine libre, refermais le rideau comme Julien me l'avait expliqué sans le moindre soupçon de ce que j'allais faire. Un bouton noire apparu et j'actionnais le mécanisme, une trappe s'ouvrit alors dans la paroi. Julien avait vraiment bien organisé l'évènement. Je pris le contenu et enfilai la combinaison beaucoup trop grande pour moi. Je remontais la fermeture éclair et la magie s'opéra. La combinaison s'adapta à mon corps et se colla à ma peau. Cette combinaison était faite d'un tissu résistant à tout frottement et était renforcé à des endroits stratégiques. J'enfilais les bottes noires et enfin les gants et le casque. Personne ne semblait se soucier de moi à part une personne. Chris Right se tenait prêt à entrer dans sa cabine quand j'en sortis. Il me reconnut à coup sûr mais je ne fis comme si je n'avais pas remarqué son sourire maléfique sur les lèvres. Sans plus tarder je me dirigeais vers le garage improviser. Un drone me demanda de piocher dans une grande boite noire une balle. Je fis tournoyer les boules et en ressortir une. J'étais seule avec le drone et espérait que Julien ne me reconnaitrait pas s'il voyait par la caméra du drone. « Voiture 4 » annonça le drone avant de remonter dans les airs et me filmé en train de rejoindre la voiture. Il n'y avait aucune participantes et ma carrure pourrait me trahir si les participants s'attardaient trop sur moi. Je marchai donc à pas presser vers la voiture, tentant d'arborer une démarche masculine. La voiture était dans une cabine tout comme je l'avais été pour me changer. Une fois enfermé dans la cabine je retirai mon casque. J'essuyais les quelques larmes qui coulaient encore. Alyos était allongé derrière cette tente, il ne me pardonnera pas facilement ce que je lui avais fait. Peut-être aura-t-il perdu toute la confiance qu'il avait réussi à m'accorder ces derniers jours. Mais si je devais payer ce prix pour le savoir débarrasser une bonne fois pour toute de ses démons, je prendrais le risque des millions de fois.

La voiture était blanche et neuve, comme sortie d'usine et lors du démarrage le ronronnement du moteur me procura une sensation de bonheur. La voiture avait été débridée. La porte de la cabine s'ouvrit soudainement et j'appuyai sur l'accélérateur en retenant un sursaut. Un drone me conduisit jusqu'à la ligne de départ. J'étais la sixième quand j'arrivai, le septième arrivait derrière moi ainsi que le huitième. Je pris une inspiration et me focalisais sur mes mains et mon volant, sur mon pied droit pressant les pédales. Mon casque m'empêchait de bien respirer mais la vision à l'intérieur était excellente comme s'il n'était pas teinté de l'intérieur. Je retins de nouvelles larmes qui tentaient de me submerger. Le ronronnement de nos voitures était la seule chose qui perçait le silence. Le stress était à son comble. Je fermais les yeux et sortit de l'intérieur de mon gant la petite photo que Louisa avait donné à Alyos et que j'avais subtilisé de sa poche. Je la contemplai, m'imprégnai du visage de mes proches autant que je le pus. Ils avaient l'air si heureux. Je me promis de revenir en un seul morceau pour les voir de nouveaux ainsi, souriant, éclatant. Je reviendrai et l'ombre menaçante de Chris Right aura disparu de nos visages. Je défis rapidement ma combinaison et posai la photo sur mon cœur. Mes amis conduiraient avec moi.

- Désolé papa mais il va falloir que tu fermes les portes du paradis quelques minutes, je ne veux pas te rejoindre tout de suite.

Le vrombissement des moteurs s'intensifia et une dizaine de drone nous survolèrent. Un plus gros transportait avec lui un écran noir et vint se placer en face de tout le monde. Nous étions tous méconnaissable dans nos voitures et j'ignorais où était Chris Right mais je le saurai bien assez tôt quand il essaiera de me pousser dans le fossé.

L'écran afficha un décompte. Mes bras remuèrent d'excitation et de peur. Je me détendis le cou avant de me préparer à appuyer de toute mes forces sur l'accélérateur. Ce n'était pas bien différents que l'entrainement, j'en étais tout à fait capable. Le décompte arriva à son terme. Tous les moteurs rugirent et coller à mon siège la voiture avança avec fluidité. Une première ligne droite et un virage montrèrent à tout le monde que les places n'étaient pas décisives dès le départ. Effectivement, j'étais sixième et passai troisième avant d'être doublé par deux voitures. Les virages s'enchainèrent mais je ne voyais pas encore où était la route qui semblait taillé dans la falaise dont tout le monde parlait. Je me focalisais sur les prochains virages qui n'étaient pas annoncés par un co-pilote. Il me fallait tenir trois tours.

- Tu peux le faire !

Dans mes rétroviseurs je voyais les autres participants tenter de me doubler mais je ne me laissais pas faire. J'accélérai légèrement pour les distancer et pour pouvoir prendre mon virage. Je fus alors collé à l'arrière de la voiture devant moi. Je devais gagner cette course en remontant petit à petit les concurrents. Dans le virage suivant je réussis à en laisser deux derrière moi. J'étais dans ce qui me semblait être le podium. Mais d'autres derrière moi semblaient vouloir ma place. J'accélérais alors dans le virage. Le désert ne semblait ne plus finir et si je mordais un peu alors je ne serais pas vraiment ralentit. Je continuais alors l'accélération jusqu'au bout avant d'actionner légèrement le frein. Mais alors que j'avais prévu de mordre je me rabattis au plus près de la paroi. Le désert n'existait plus et un ravin d'une centaine de mètre avait pris place. L'odeur iodée de la mer pénétra mon casque. Je retins ma peur pour prendre le second virage sans regarder dans mon rétro si une voiture plongeait dans le ravin. Les voitures derrière moi essayait de me doubler mais je les en empêchais en accélérant toujours plus. La route n'en finissait pas de longer le ravin et je commençais à trouver mes marques dans les virages quand je fus dépassée par une voiture qui négocia le virage avec une vitesse bien trop grande. Il fit déraper la voiture mais une roue se retrouva dans le vide. Il fit ralentir tout le monde et ainsi perdre de vue les deux premiers que je m'efforçais de rattraper depuis le début. Quand je repris ma vitesse normale je commençai à m'ennuyer. Je frappais le volant une fois puis deux. J'étais capable de bien plus mais la peur me tenait encore et toujours les tripes.

Je pris alors une grande bouffée d'air sous mon casque et serrai les mains sur le volant.

Ce n'était pas si différent de l'entraînement, me répétai-je.

Je pouvais encore et toujours battre mon record si je me concentrais et ne faisais qu'une avec la route. Je mis alors le pied au plancher et accélérait, en quelques virages je rattrapais les deux premiers. Mais une voiture me suivait de près. Bien trop prêt. Le premier tour fut fini. Je soufflais, il me fallait rester concentré. Les virages recommencèrent une seconde fois, je savais que le troisième tour était différent, il ne fallait pas prendre la bifurcation de gauche mais celle de droite et la ligne d'arrivée se trouvait à la fin d'une ligne droite, cerné par la falaise et le ravin. Je pouvais le faire. Mon cœur battait à tout rompre et l'adrénaline pulsait comme une morsure ardente. La voiture de derrière me colla de bien trop prêt et je poussai la voiture qui rugit sous mes pieds. La voiture continua de me suivre et d'entrechoquer nos voitures. Je compris alors qui était le conducteur, il me signalait sa présence. C'était l'heure de l'affrontement. J'accélérai une dernière fois pour le distancer et le provoquer. Je pris le virage en frôlant la paroi. La route de la Dryland ne laissait à peine la place pour deux voitures côtes à côtes. Je repensais à Alyos, Julien, Aïko et Louisa, ainsi qu'à ma mère. Je ne les abandonnerai pas. Je devais revoir leurs sourires et les entendre rire aux éclats à une mauvaise blague, je voulais les voir vieillir. Les virages se succédèrent mais la voiture de Chris revint à la charge en tapant l'arrière de ma voiture, me faisant virée non loin du fossé. J'accélérai une nouvelle fois pour être hors de sa portée et rapidement nous atteignîmes le dernier tour ainsi que les deux premières places. Je n'avais jamais conduit aussi vite mais cela ne semblait pas faire hésiter mon concurrent qui s'approcha de nouveau. Mais je savais comment en finir avec lui. Dans la Dryland tout était permit et le père d'Alyos ne s'était pas fait prier pour éliminer tous ses ennemis dans cette course. Cela ne me dérangeait pas de faire la même chose. Je réussi à ne pas me faire sortir de la route jusqu'au croisement. Nous étions les premiers, les autres étaient loin derrière. Je savais exactement où tout prendrait fin et je trépignais d'impatience. Il ne faisait aucun doute, Chris Right se tenait derrière moi et devais probablement jubiler devant ma conduite fluide.

Ce fut le moment. La falaise se divisai en deux, l'une montait en pente abrupte et nous ramenait dans le circuit  déjà emprunté deux fois et l'autre qui continuait le long de la falaise. J'avais le désavantage de ne pas connaitre la route et Chris le savait, il pensait sûrement que je comptais gagner en passant la ligne d'arrivée. Mais je ne comptais pas le battre. J'accélérai tout comme lui et quand il vint assez proche de moi je me décalai vers la paroi rocheuse et mon plan fut exécuter à la perfection. J'actionnai la pédale de frein tout en tournant le volant sur la droite. Je me retrouvais très vite à ses côtés, la carrosserie de nos voitures faisant des étincelles. Il donna un coup de volant pour se remettre sur la route mais un deuxième coup de volant eu l'effet escompté. Je priai une dernière fois mon père de fermer les portes ou alors de ne pas me laisser passer si je venais à me présenter, Là-haut. Nos deux voitures plongèrent dans le vide. Sa portière étant bloquée par ma voiture. Il était condamné. Je fermais les yeux un instant accueillant la sensation de chute avec délice. C'était la fin. Enfin.

Night DriverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant