12| Romanellia

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- C'est simple, on donne la masse molaire et tu cherches à calculer...

Les chiffres et les expressions perdaient leurs sens au fur et à mesure que je cherchais à les comprendre. Une envie commençait à me déranger : celle de sentir la vitesse me coller au siège.
Celle de conduire et de me mesurer à d'autres.
Qui sait ? Peut-être que ce soir j'allais devoir conduire ? Louisa m'avait assuré que tout se passerais bien, que nous irions fêter ma première course tous les quatre. Elle aurait dû dire tous les trois, j'aurais préféré, mais Alyos avait toujours l'air d'être avec eux donc je n'avais pas vraiment le choix. Je ne sais pas si j'appréhendais de le voir ou si je m'en fichais totalement et que j'étais nerveuse seulement à cause de la course à laquelle j'allais prendre part.

Je décidai de lever le nez de mes livres pour regarder mon amie qui n'avait presque rien dit depuis mon arrivée. Elle s'était contentée de m'écouter déblatérer des indications sur les différents exercices.
Le visage de mon amie se mut en une mine contrariée avant de céder et de poser la question qui lui tournait dans la tête depuis longtemps, apparemment.

- Cette Louisa... C'est une fille du gang n'est-ce pas ?

Son ton fut cinglant en prononçant son prénom, comme plein d'un poison fatal. Je la regardais avec hostilité. Elle m'avait l'air tellement loin, inaccessible et inamicale. Je ne répondis rien, elle savait très bien qui elle était, il était trop tard pour que je puisse défendre Louisa. Je lui avais déjà dit qu'elle était la copine de mon frère mais cela la gênait plus depuis que je passais plus de temps avec elle qu'avec mon amie d'enfance.

- Je croyais que tu ne trainerais jamais avec ce genre de personne, qu'ils te dégoutaient.

- Louisa est très gentille et loin du stéréotype que je m'étais fait d'eux.

Je n'allais pas lui dire que j'allais aider mon frère dans son enquête sur notre père, que j'allais lever le voile sur la disparition de mon père. Et j'allais encore moins lui dire que depuis que j'avais découvert les SerpentSand et leurs courses, je n'avais fait que réprimer ma curiosité envers ce monde vaste et secret qu'offrait ce gang.

- Donc tu participes aux courses maintenant ? fit-elle en me pointant du bout de son stylo avec dédain. Romanellia, si tu comptes remettre les pieds là-bas, sache que je ne pourrais plus te soutenir. Je ne veux rien avoir à faire avec des gens qui se sont tournés vers l'obscurité puisqu'il n'était bon à rien d'autre.

- Ils ne sont pas bon à rien, je répondis avec tranchant. Ils ont une passion, rouler. Ce que ni toi, ni Victor n'avez.

- Donc tu les défends.

- Parce que mon père était comme eux !

J'avais explosé, je l'avais dit. Ses yeux s'ouvrirent dans une expression d'étonnement, elle en resta bouche-bée. Je ne sais pas si c'était parce qu'elle ne m'avait jamais vue élever la voix ou bien parce que je viens de révéler que mon père n'était pas de la ville, qu'il avait vécu avec les SerpentSand. Alors que le temps parut s'étirer, nous restions pétrifiés par ma révélation. Plus rien ne bougeait et dehors tout était silencieux. Quand elle détourna la tête pour regarder le sol, fuyant mon regard, comme déçue.

- Je... Je crois que nous n'avons plus rien à faire ensemble.

Je fixai la nuit qui s'étendait par la fenêtre. Petit à petit je me rendis compte que ça ne me gênait pas. Oui, ça ne me gênait pas, elle avait été élevée ainsi et je devais dire que moi aussi quand mon père n'était plus là. Nous étions différentes. Lors de la mort de mon père je m'étais rapprochée d'elle, elle m'avait consolé puis peu à peu m'avait tiré avec elle, j'étais devenu une fille parfaite. Ou du moins à ce qui s'en apparentait extérieurement. Je ne devais plus avoir les mains dans l'huile de moteur, ma mère me l'interdisait aussi, je ne devais plus écouter de musique trop rapide et me concentrer sur des chansons douces et sans intérêt. Rose et ma mère m'avaient aidé à étouffer les souvenirs de mon père en m'éloignant de la fille que j'étais avant. Mais une partie de moi, celle qui aimait les voitures, la vitesse et le danger était restée en veille dans mon esprit.

Cette part s'était éveillée il y a peu. Comme un appel à la lumière. 

J'avais besoin de ce soir, participer à une course et savoir si oui ou non j'étais comme mon frère et avant lui mon père, si les SerpentSand me convenaient, si je me sentais capable d'aider Aïko dans son enquête.

La chambre était silencieuse, du coin de l'oeil je vis Rose me regarder sévèrement quand les phares de la voiture de Louisa éclairèrent la route menant chez Rose, je ne perdis pas une seconde et rangeai mes affaires sous le regard attentif de mon amie ou plutôt de mon ex-amie. Ses lunettes carrées sur le nez, elle attendait probablement que je fasse ce qu'elle aimerait : me rassoir et finir mes explications sur notre exercice. Mais je ne lui donnerai pas raison. J'enfilai mon gilet et pris mon sac.

- Bonne fin de soirée Rose, je prononçai sans la moindre émotion.

- Romanellia je te défends de...

- De quoi Rose ? Dis-je froidement. Tu n'as aucun pouvoir sur moi.

- Et ta mère elle va dire quoi si tu ne réussis pas ton année ?

- Je suis capable de la réussir sans ruiner ma jeunesse à réviser.

- Elle est au courant de ce que tu fais ?

- Ne t'avise pas de lui dire !

Je me retins de faire demi-tour et de la menacer.

- Qu'est ce qui m'en empêcherait ?

- Si elle doit l'apprendre c'est de moi, pas d'une autre.

- Je t'en prie reste, ne vas pas là-bas, tu sais très bien ce que tu finiras par faire en restant avec ces criminels...

Mais je claquai la porte de sa chambre, dévalant les escaliers et ne la laissant pas en dire plus. Son petit frère me sourit quand je passai dans la cuisine, je le saluai sans plus m'attarder. Dehors l'air frais remplit mes poumons et je m'engouffrai dans la voiture de Louisa en retenant un frisson, elle fit crisser les pneus avant de sortir à toute vitesse du quartier et de prendre la route menant au désert. Je ne regardai pas une seule fois la maison de Rose qui s'éloignait dans le rétroviseur mais me concentrai sur la route qui défilait très vite, un léger sourire affiché sur le visage. Enfin libre. Louisa aussi souriant, heureuse que je sois avec elle.

- Avant va falloir te changer ma belle, ce soir tout le monde doit être au courant que ta perfection a ramené son petit cul chez nous.

Elle me balança un tas de vêtements que je réceptionnai avec grand mal et qui tomba à mes pieds. Je passai alors sur la banquette arrière pour avoir plus de place et enfilai les fins tissus qu'elle m'avait amenés puis revins devant où je passai tout le trajet à dodeliner de la tête sur de la musique. Les épaules plus légères que jamais et pressé de retrouver l'effervescence des SerpentSand.

***

Petit chapitre posté en retard sorry guys!

J'espère que l'été c'est bien passé pour vous et que vous n'avez pas crevé sous le soleil.

Faites vous cramez mais ne crevez pas!

Dans les prochains chapitres on aura le droit à du grabuge!

Un point de vue d'Alyos sera au rendez vous dans le prochain chapitre!

See u guys!!

Night DriverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant