LE MUTANT ET LE MONSTRE

6. Un ennemi commun

Logan marchait en retrait de Dean et du Professeur Xavier tandis qu'ils visitaient les moindres recoins de l'Institut, qui grouillait toujours de jeunes âmes à cette heure de la soirée. Le professeur s'était fait un devoir de présenter chacun des membres du personnel à leur mystérieux rescapé, tout comme il l'avait fait pour lui de nombreuses années auparavant. Le but de Xavier était évident : il voulait amadouer Dean, le convaincre qu'il n'était pas seul au monde, qu'il avait la possibilité de changer de vie, de recommencer à zéro et d'oublier son passé douloureux. Si la ruse du professeur avait fonctionné sur lui, pourquoi ne marcherait-elle pas sur Dean ?

Le garçon suivait docilement son guide sans dire un mot, mais Logan n'avait pas manqué de remarquer les regards perçants et intelligents avec lesquels il scrutait chacune des pièces de fond en comble. Le mutant ne tarda pas à comprendre qu'il les analysait autant qu'eux pouvaient l'analyser, mais il ignorait toujours dans quel but.

Ce pouvait-il qu'il ait pu se tromper sur le compte de ce gamin ? En y repensant bien, il lui avait accordé sa confiance beaucoup trop rapidement alors qu'il ne connaissait absolument rien de lui. Même s'il se sentait instinctivement protecteur envers ce garçon et qu'il ne pouvait nier qu'il l'aimait bien, il craignait que l'amitié qu'il ressentait envers lui l'ait aveuglé au point qu'il ait par mégarde laissé entrer le serpent dans le jardin d'Eden.

Le professeur ne semblait pas partager ses craintes, puisqu'il alla même jusqu'à montrer à leur jeune visiteur les moindres installations destinées aux X-Men, en finissant par le Cérébro, dont il expliqua en détails les fonctions et l'utilité. À plusieurs reprises, Logan fit signe à son ami de se taire, que ces informations pouvaient devenir dangereuses si elles tombaient entre de mauvaises mains et qu'ils ne connaissaient toujours pas les allégeances du gamin, mais la voix de Xavier ne tarda pas à résonner dans sa tête pour apaiser ses doutes.

"Fais-moi confiance. Je ne peux peut-être pas lire dans la tête de ce garçon, mais je peux t'assurer que je n'ai rien perdu de mon sens de l'observation et j'ai bien l'intention de comprendre ses motivations d'une manière ou d'une autre. Ce jeune garçon ne s'est pas braqué contre nous parce qu'il nous considère comme ses ennemis, mais simplement parce qu'il a peur. J'ignore encore ce qu'il craint à ce point, mais sa rencontre avec le Cérébro pourra potentiellement nous en apprendre plus."

Ce ne fut qu'à cet instant que Logan remarqua que le regard de Dean avait changé lorsque le professeur avait commencé à lui expliquer le fonctionnement de son amplificateur d'ondes cérébrales. Ses grands yeux verts s'illuminèrent sous le coup d'un vif intérêt et il crut même percevoir à travers ses prunelles ce qui ne pouvait pas être autre chose que de l'espoir.

-Cette machine vous permettrait donc de trouver, de voir et de communiquer avec n'importe qui à travers le monde, et ce peu importe où se trouve la personne que vous cherchez et quel est son état ?

-Avec suffisamment d'énergie et beaucoup d'heures de pratique, un télépathe de mon calibre peut y arriver assez facilement, en effet, mais la plupart du temps, je concentre uniquement mes recherches sur les mutants en difficulté. Mon équipe se dépêche ensuite de leur venir en aide et de leur offrir un foyer sécuritaire.

Le professeur tourna sa chaise roulante vers l'adolescent, qui fixait l'appareil à la fois comme s'il s'agissait de la huitième merveille du monde et comme s'il craignait qu'il explose à tout moment.

-Souhaiteriez-vous que je cherche quelqu'un pour vous, Dean ?

L'espace d'un instant, Logan crut que Dean allait réellement tomber dans le piège que lui tendait le professeur et lui demander de faire une recherche pour lui, mais ce fut avant que les traits du garçon ne s'affaissent subitement et que son visage perde toutes ses couleurs. Il commença à jeter des coups d'œil frénétiques autour de lui tout en reculant vers la porte et chaque partie de son être respirait une peur que Logan ne le savait même pas capable d'éprouver.