31. La tension monte

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Dean pouvait voir le niveau de l'océan monter et monter toujours plus haut sur la grève au fil des minutes et des heures, il pouvait sentir ses muscles faciaux s'étirer en un sourire satisfait tandis que l'eau atteignait les fondations des maisons situées le plus près de la berge et que le tumulte commençait à s'élever parmi les riverains. Il ne se trouvait qu'à une cinquantaine de mètres des pauvres habitants qui commençaient à empiler des sacs de sable autour de leur demeure dans un vain effort pour prévenir au maximum les dégâts, il aurait pu courir les rejoindre pour les avertir de la situation et leur enjoindre d'aller se mettre à l'abri le plus loin possible des cours d'eau, et pourtant il resta là, immobile, à savourer le malheur des autres. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, toutefois. Il se démenait comme jamais ne serait-ce que pour lui faire ravaler son sourire, mais Michael ne voulait rien entendre. Il avait perdu tout contrôle sur son propre corps, dorénavant, et avait été relégué au simple rôle de la voix agaçante dans la conscience de Michael.

Michael, qui venait tout juste d'amorcer le Jugement Dernier.

Jamais il ne s'était senti aussi impuissant. Il avait pourtant littéralement grandi dans une cage comme une bête de foire, contraint à agir contre son gré et à servir d'expérimentation au profit des pires ordures de l'espèce humaine, mais au moins, il avait toujours gardé un minimum de contrôle sur son corps à cette époque. Il avait toujours pu crier et insulter ses geôliers lorsqu'on restreignait ses mouvements, toujours pu se débattre et donner du fil à retordre à ses oppresseurs dès qu'on lui en donnait l'occasion. Surtout, il avait alors toujours pu compter sur Sam pour lui rappeler que la vie valait tout de même la peine d'être vécue. Aujourd'hui, non seulement on lui avait retiré tout moyen de se révolter contre sa situation, que ce soit par la parole ou par les gestes, mais son petit frère lui avait également tourné le dos. Depuis des années maintenant, il abusait de sa confiance pour accomplir à son insu les desseins de Claus Brock et d'HYDRA. Tout était sa faute. Sam était la cause de tous ces malheurs qui s'abattraient bientôt sur l'humanité, ce qui faisait de Dean un coupable par procuration, puisqu'il avait été trop stupide pour concevoir la trahison de la personne qu'il aimait le plus au monde. Fou de rage, de douleur et de culpabilité, il s'époumona jusqu'à en faire craquer ses cordes vocales, mais le cri se contenta de résonner contre les parois de son esprit, uniquement perceptible par l'archange qui avait usurpé son corps et son identité. La colère le consuma de plus belle lorsque Michael pouffa de rire (il s'était même approprié son rire, mais avec un écho plus méprisant, moins humain).

-Je détecte beaucoup de ressentiment en toi, mon garçon. C'est bien. C'est très bien. Cette colère contre ton ancien protégé nous sera plus qu'utile lorsque viendra l'affrontement final. C'est grâce à elle que nous prendrons le dessus sur ton cher Sam...et sur Lucifer.

« C'est hors de question que je t'aide pour quoi que ce soit, sale fils de pute » gronda Dean, qui aurait tout donné pour toujours avoir le contrôle sur ses facultés, puisqu'il aurait ainsi pu faire comprendre à l'archange que Lucifer n'était pas l'unique ennemi dont il devait se soucier.

Dean Romanoff-Barnes était peut-être désarmé, mais il refusait de se considérer vaincu tant qu'il respirait encore. En ces temps incertains, au moins une chose restait sûre : il vengerait ses amis et sa famille, que Michael avait laissés mourir comme des chiens dans les cellules du quartier-général et qu'il n'avait pas été assez fort pour sauver.

-J'en comprends que tu me blâmes pour la mort prochaine de tes coéquipiers, devina Michael sans jamais se départir de son sourire suffisant. Eh bien, tu ne veux peut-être pas me croire encore, mais je t'assure que la fin que je leur ai accordée est bien plus miséricordieuse que celle qui attend le reste de l'humanité dans les prochains jours. Tes proches n'ont même pas connu le centième du désespoir et de l'impuissance que ressentiront les derniers survivants de l'espèce humaine avant leur extinction totale.

LE MUTANT ET LE MONSTREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant