11. Retour en arrière

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Natalia attendit que tout le monde fut installé sur les divans du salon, que le silence se fut imposé dans la pièce et que toute l'attention fut portée sur la famille Romanoff-Barnes avant de commencer à raconter l'histoire qu'elle partageait avec Bucky et Dean, celle qu'elle avait passé tant d'années à cacher pour protéger ce qui restait de son cœur en miettes. Mais les choses avaient changé, maintenant. Les deux hommes de sa vie, ceux qu'elle avait longtemps cru perdus pour toujours, étaient de nouveau à ses côtés et lui redonnaient espoir en l'avenir. Tous deux étaient fort probablement aussi brisés qu'elle, mais ça n'avait plus d'importance, puisqu'ils étaient à nouveau ensemble. Une fois ce malentendu réglé et cette discussion derrière eux, ils pourraient enfin songer à guérir et à aller de l'avant, ce qui ne lui avait jamais semblé possible jusqu'à ce jour. Pour ce faire, toutefois, elle allait devoir s'amender pour tous les mensonges et les non-dits qu'elle avait empilés au fil des années et révéler l'entière vérité à ses frères d'armes – à ses frères tout court – en débutant par le moment qui avait radicalement bouleversé son existence : sa rencontre avec James Buchanan Barnes.

-En 1999, la Chambre rouge m'a envoyé travailler pour HYDRA, l'une de leurs organisations alliées, dans le but de finaliser mon entraînement auprès de leur meilleur agent, le légendaire Soldat de l'Hiver. On nous a donc jumelés, lui et moi, pour quelques missions sur le terrain dans le but de tester mes compétences et mon endurance dans des environnements imprévisibles. Nos premières affaires se sont passées sans encombre, nous étions rapides et efficaces, et à peine quelques mots furent échangés entre nous. Il fallait dire que le Soldat était plutôt...robotique, si je puis dire, dans ses agissements. Il ne parlait que lorsque c'était vraiment nécessaire ou lorsque l'un de nos supérieurs lui posait une question, mais autrement, il se muait dans le silence. Lorsqu'on ne lui donnait pas d'ordre direct ou qu'il ne se trouvait pas dans le feu de l'action, il pouvait rester en garde-à-vous pendant des heures, les yeux fixés dans le vague, impassible à tout ce qui se passait autour de lui. Je soupçonnais bien que ce comportement n'était pas normal et qu'HYDRA avait forcément dû dérégler le cerveau du Soldat à un moment dans son entraînement pour le manier plus facilement, mais c'était une normalité dans le monde dans lequel j'avais grandi. Personne ne sortait jamais intact d'une telle éducation, c'était notre pénitence pour pratiquer un tel métier, mais on nous apprenait dès l'enfance à s'insensibiliser à la peur, à la douleur et à la perte d'innocence, alors je n'ai pas songé à remettre la conduite du Soldat en question dans les premiers temps. J'ai seulement réalisé à quel point j'avais eu tort de fermer les yeux sur son comportement lors de notre mission en Algérie. C'est là que tout a changé.

» La tâche qu'on nous avait donnée été censée n'être rien de plus qu'une promenade de santé. Le plan était simple : un avion nous parachuterait incognitos sous le couvert de la nuit à l'intérieur des lignes ennemies pour que nous puissions nous infiltrer sans encombre dans la petite ville où vivait un riche homme d'affaires algérien qui venait tout juste d'acquérir un manuscrit ancestral écrit en énochien sur lequel nos supérieurs tenaient absolument à mettre la main. Selon nos sources, le système de sécurité de sa résidence n'avait pas été mis à jour depuis plus de dix ans et moins d'une douzaine de gardes étaient censés surveiller les alentours, mais on ne tarda pas à s'apercevoir que ces informations étaient erronées. Je ne sais pas comment c'est possible, mais l'ennemi nous attendait dès le moment où on a atterri. Les balles volaient de partout, on a dû laisser la plupart de notre matériel derrière nous et battre en retraite. Ce n'est que plusieurs kilomètres plus tard qu'on est enfin parvenus à les semer et on s'est installés dans une vieille ferme en ruines pour passer la nuit et planifier un nouveau mode opératoire pour venir à bout de ces hommes et récupérer ce foutu manuscrit sans avoir recours à aucune aide extérieure, puisqu'on avait dû abandonner nos radios pendant notre fuite.

LE MUTANT ET LE MONSTREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant