LE MUTANT ET LE MONSTRE

14. Au pied du mur

Bucky et Dean furent réveillés en sursaut par la porte de l'aile pénitentiaire qui claqua avec fracas et par des bruits de pas rapides et résolus qui venaient dans leur direction. Les deux anciens soldats d'HYDRA, pris au dépourvus, se relevèrent d'un bond et se dressèrent en position de combat, prêts à se défendre contre la possible menace qui fonçait droit sur eux et qu'ils étaient encore trop déboussolés pour bien saisir. Ils remarquèrent avec étonnement que Natalia avait retrouvé sa place aux côtés de Bucky sans qu'ils n'aient eu le moindrement conscience de son retour parmi eux et qu'elle ne semblait pas s'inquiéter outre mesure des personnes qui s'approchaient d'eux d'un bon pas. La belle rousse se contentait plutôt de les regarder combattre le désorientant brouillard du sommeil, une lueur espiègle perçant à travers ses yeux verts.

-Contente de voir que vous n'avez rien perdu de vos réflexes, plaisanta-t-elle. Mais vous pouvez relaxer, ce n'est que Steve et Tony. D'ailleurs ils vont m'entendre, ces deux-là, pour vous avoir réveillés. J'ai rarement vu quelque chose d'aussi mignon que vous deux en train de dormir, et j'ai une panoplie de photos gênantes pour en témoigner.

-Combien de temps on a dormi ? demanda Bucky en se passant une main sur le visage pour se sortir pour de bon de sa torpeur.

L'ancien assassin n'aurait jamais osé l'avouer à haute voix, mais malgré la position et l'environnement dans lesquels il s'était endormi, il s'était rarement senti autant reposé au réveil, signe que pour la première fois depuis des années, il avait connu un véritable sommeil réparateur, une chose qui se faisait rare dans le mode de vie qu'il menait.

-Je ne peux pas vous le dire précisément, mais je suis revenue de ma discussion avec Steve il y a environ trois heures et vous dormiez tous les deux à poings fermés.

-Trois heures ? s'étonna Dean. C'est l'équivalent de deux nuits complètes de sommeil, ça ! La dernière fois que j'ai dormi aussi longtemps, je perdais encore mes dents !

Bucky voulut réagir à son tour, mais il n'en eut pas l'occasion, puisque toute leur attention fut détournée à ce moment par l'entrée de Steve, de Tony et de Peter dans le corridor. Capitaine America et Iron Man marchaient à l'avant, côte à côte, un regard à la fois furieux et déterminé fixé sur l'unique détenu de l'aile, vers qui ils se dirigeaient comme s'il venait de signer son arrêt de mort. Peter, pour sa part, restait intentionnellement en retrait, mais il ne semblait pas moins résolu que ses deux aînés à régler ses comptes avec Dean.

-Je dois dire, tu es un sacré bon menteur, petit, lança Tony à brûle-pourpoint en se postant devant la cellule du jeune homme, et par le fait même devant Bucky et Natalia, qui formaient une ultime barrière de protection entre leur fils et les trois super-héros. Tu es parvenu à convaincre à peu près tout le monde dans l'équipe avec ton histoire tragique et larmoyante et tu es même presque arrivé à faire fléchir mes convictions, ce qui n'est pas peu dire, mais tu as commis une grave erreur en nous offrant cette clé USB. On y a trouvé des informations particulièrement éclairantes en épluchant tes dossiers, des renseignements que tu n'avais pourtant pas cru bon de nous fournir hier soir dans ton exposé.

-C'est exactement parce que je ne voulais pas avoir à vous révéler toutes ces informations que je vous ai donné cette clé, Stark, répondit froidement Dean, qui avait revêtu son masque imperturbable et arrogant en présence des trois nouveaux arrivants. Si j'avais voulu vous cacher les renseignements que vous avez trouvés sur cette clé, vous pouvez être assurés que je les aurais effacés depuis longtemps. Mais en agissant ainsi, je n'aurais pas tout à fait respecté ma volonté de mettre cartes sur table avec vous, n'est-ce pas ? Je ne vous ai pas tout divulgué hier pour éviter de trop vous embrouiller avec un surplus d'informations, mais je me rappelle vous avoir également annoncé que je resterais disponible pour répondre à vos questions lorsque vous aurez analysé le contenu de cette clé, et comme promis, je n'ai pas bougé de cette cellule de toute la nuit. Alors je vous écoute, messieurs : qu'avez-vous donc à me reprocher, cette fois ?