Les Meutes - Tome 2 : Défendre sa Place

5.

— Lyas, hey, Lyas, me secoue Hemza.

— Quoi ? baillé-je.

— On est suivi.

Tout à coup très alerte, je me redresse sur les vieux sièges beiges du van.

— Depuis quand ?

— Quand on est partis, mais on a tenté de la semer.

— La ? répliqué-je laconique, maintenant que j'ai compris de qui il parlait. J'espère que vous avez vraiment essayé. Et pourquoi tu me réveilles pour me le dire, alors que j'aurais fini par m'en rendre compte plus tard ?

— Parce qu'on s'arrête manger un bout, argumente-t-il en souriant.

Myron et Jam s'extirpent aussi du sommeil et lentement j'emboite le pas à Hemza qui ne nous a pas attendus, il est presque à l'intérieur de l'établissement.

L'odeur de nourriture ne me met pas en appétit, je déteste toutes ces odeurs mélangées, mais mes sens s'aiguisent quand je comprends que nous sommes sur le territoire d'une meute.

Un jeune homme d'une vingtaine d'années vient à notre rencontre, il transpire. Hemza le rassure d'un sourire, mais le pauvre est à deux doigts de se faire dessus. Son odeur m'est familière, mais rien d'étonnant, nous sommes déjà passés à Vegas, c'est même la troisième grosse meute que nous avons dissoute. Je perds le compte peu après, il y en a eu tellement...

— Nous sommes simplement venus diner, dis-je au serveur qui nous proposait déjà d'appeler son alpha.

Je suis content de voir que ce dominant n'est pas belliqueux, mais étonné qu'il ne soit pas capable de prendre un peu sur lui. Surtout qu'aucun de nous n'exsude d'agressivité. Il finit par nous présenter une table dans un coin, à laquelle il s'empresse d'en accoler une autre.

— Merci, dis-je.

Il devient livide.

— Où tu nous as amené ? demandé-je à Hemza.

— Dans un des mails, une des meutes mentionnait ce restaurant comme étant le sien. Je me suis dit que nous montrer ne ferait pas de mal.

— Le repas va être agréable, soupiré-je.

Et je ne me trompais pas, quand le serveur s'éclipse, c'est le chef de cuisine lui-même qui vient prendre nos commandes. C'est l'alpha et fort heureusement, il se décompose moins que son dominant. Puis le restaurant se remplit petit à petit des membres de la meute. Je me contente de manger en silence, ils ne sont pas agressifs, simplement curieux et dans l'expectative, comme si c'était notre genre de prendre des gants quand nous avons des remontrances à faire. Nous n'en aurions pas le temps, le nombre de meutes du pays a été multiplié au moins par dix à cause de notre intervention. Pour les gérer, il nous faut foncer dans le tas, intimider, châtier et espérer que l'exemple dissuadera les autres.

Las Vegas reste un petit territoire, il n'y a que quatre meutes qui se séparent la ville et pas mal de solitaires. Nous n'avons jamais eu à y revenir pour faire régner l'ordre. Nous faisons souvent que passer pour nous montrer en nous rendant ailleurs.

— Vous désirez autre chose ? demande le serveur qui semble s'être remis de ses émotions pour retourner travailler.

— Ton cœur sur un plateau, commente Vael en rigolant.

Hemza le frappe et Myron le fixe d'un air atterré.

— Ne l'écoute pas, interviens-je. Il essaie d'être drôle. L'addition suffira.

Quand il s'éclipse, je fusille Vael du regard. Je déteste quand il joue avec la crainte que nous inspirons, même si je peux comprendre que ce soit tentant. Il y a dix ans nous devions être des ombres, peu importe le lieu où nous nous rendions. Maintenant, nous sommes en terrain conquis partout et l'envie de renvoyer la monnaie de leur pièce à tous ces gens est tentante.