Chapitre 4 - Jimin

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— Mi casa es tu casa ! s'exclama Tae en entrant dans le hall de son appartement.

Il tire ma valise alors que j'observe les lieux. Devant moi, se présentent trois             arches. Celle de droite donne sur le salon. Du canapé aux fauteuils en passant par le tapis et les murs, tout est dans un joli dégradé de gris. De jolis tableaux que Tae a dû passer des heures à choisir, sont accrochés ici et là. Leurs couleurs sont chaudes et rendent l'endroit plus chaleureux. C'est agréable et reposant. Au fond, je peux apercevoir un balcon qui fait toute la longueur de la pièce.

À gauche, se trouve une salle à manger design, seulement séparée d'une cuisine épurée et toute équipée, par un bar. Les lieux n'ont pas l'air d'être souvent utilisés et ça n'a rien d'étonnant. Tae déteste cuisiner. Pour lui, c'est comme une perte de temps. Il préfère acheter des plats tout faits ou alors se faire livrer.

— Viens suis-moi !

Mon regard se reporte sur mon ami qui s'éloigne dans le couloir sur lequel la troisième arche donne. Celui-ci mène aux chambres et à la salle de bain. Je referme la porte derrière moi et retire rapidement mes chaussures.

Je le suis, mon sac de voyage pendant à mon épaule. Nous laissons sa propre chambre à notre droite et la salle de bain au bout du corridor, pour nous approcher de la dernière pièce sur la gauche. Tae laisse ma valise à côté du lit et ouvre les bras pour me désigner mon nouveau chez moi.

J'entre et un léger sourire apparaît sur mes lèvres. Après avoir posé mes bagages au sol, je m'assois sur le matelas et observe autour de moi. La chambre d'amis que j'occuperai à présent est grande et lumineuse. Une jolie commode se trouve sur la droite et un bureau assorti est installé devant de grandes baies. Ces dernières permettent d'avoir une vue impressionnante sur Séoul.

J'avais déjà vu l'appartement par visio et je savais qu'il était génial mais le voir en vrai est encore plus incroyable. Je n'aurais jamais pu espérer un meilleur retour dans mon pays. Ici, avec mon meilleur ami, je pourrai facilement remettre ma vie sur les bons rails. Je n'ai aucun doute.

— Merci, Tae. Pour tout ce que tu fais pour moi depuis toujours.

Il m'adresse un immense sourire comme lui seul en a le secret puis un clin d'œil.

— Tu es mon meilleur ami mais aussi mon frère comme Gyu. Tu le sais aussi bien que moi, dans une famille, on se serre les coudes.

C'est le leitmotiv des Kim et surtout de Seon-Mi. Je les ai tellement écoutés me dire ça ces dernières années mais malgré tout, c'est encore parfois difficile pour moi d'y croire complètement.

— Bon, je dois aller répéter. J'ai pas touché à mon violon depuis deux jours, ce n'est jamais bon !

Je hoche la tête pour lui faire comprendre qu'il n'y a pas de souci.

— Je vais en profiter pour ranger mes affaires.

— Super !

Il me tapote l'épaule puis ajoute :

— Tu nous prépareras une omelette pour le dîner, d'accord ?

Il me fait encore un sourire, moqueur cette fois, juste avant de sortir de la pièce. Ma chambre. Un fort sentiment de gratitude monte en moi. Tae comme les autres membres de la famille Kim, ne se rendent pas compte que ce qu'ils m'offrent depuis douze ans. Leur amour, leur respect et leur acceptation sont juste invraisemblables.

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, ce n'est pas quelque chose d'universel ou de normal pour tout le monde. Mes propres parents en sont le meilleur exemple, ils n'en ont pas été capables. D'ailleurs... malgré les années qui sont passées... Je vois encore le dégoût sur le visage de ma mère. Je sens encore la main froide de mon père claquant sur ma joue. J'entends encore leurs mots :

— Ce n'est pas mon fils, je ne l'ai pas élevé comme ça.

Elle avait ensuite ordonné que je sorte de sa maison mais j'avais été incapable de bouger. J'étais trop abasourdi par la violence dont ils faisaient preuve. Alors mon père avait attrapé mon bras et l'avait serré tellement fort que j'avais gardé la marque de ses doigts pendant au moins quinze jours. Il m'avait trainé à travers la maison et m'avait jeté dehors.

Pendant presque deux heures, j'avais pleuré et les avais suppliés qu'ils m'ouvrent. Tout ce que je connaissais était dans cette baraque. Toutes mes affaires étaient dans ma chambre. En moins de cinq minutes, je m'étais retrouvé sur le trottoir en pyjama et claquettes. Ma vie se résumait à ça, je ne possédais rien d'autre.

Mais ils avaient tout fermé à clé. Les rideaux avaient été tirés. Alors que je m'étais effondré dans le petit jardinet, j'avais entendu le son de la télévision. J'en étais donc arrivé à la conclusion qu'ils étaient tranquillement en train de regarder leur émission habituelle. J'avais jeté un regard dans la rue et quand j'avais aperçu un voisin promener son chien, j'étais parti. Je n'avais plus rien à faire ici.

Tae avait été la première personne à laquelle j'avais pensé à ce moment-là. Je savais qu'il serait le seul à pouvoir m'aider. Contre mon avis, il n'avait pas tardé à tout raconter à ses propres parents. Il n'avait cessé de me répéter qu'ils comprendraient et qu'ils étaient les seuls qui pourraient faire quelque chose pour moi.

Il avait eu raison. Après avoir su, Seon-Mi m'avait souri et avait passé une éternité à me tenir contre elle, dans ses bras en me répétant que j'étais une bonne personne. Cette femme que je ne connaissais pratiquement pas avait, en moins de dix minutes, agi plus en tant que mère envers moi que la mienne en quatorze ans.

Hee-Seung était resté quant à lui, un long moment, assis au bout de la table. Le regard dans le vide. Imperturbable. J'avais craint qu'il me chasse lui aussi de sa maison. J'en avais tremblé de tous mes membres mais quand il avait ouvert la bouche, il avait affirmé d'un ton déterminé :

— Tu restes avec nous. Tu es ici chez toi à présent !

Il s'était levé, m'avait ébouriffé les cheveux en passant à côté de nous et avait téléphoné à son avocat. La semaine suivante, il était revenu avec mes affaires. J'ignore encore aujourd'hui comment il a fait pour les récupérer ou même ce qui a bien pu se passer entre lui et mes parents. Un jour peut-être, j'aurai le courage de lui poser la question.

Deux semaines plus tard, nous avions nos lits individuels. Au bout d'un mois, le collège – administration et élèves – savait que j'avais changé d'adresse. Et six mois après, les Kim sont devenus mes tuteurs officiels.

Je n'avais jamais plus eu de nouvelles de mes géniteurs.

Je ricane, amer. Peu importe le temps qui passe, ce qu'ils m'ont fait restera une blessure impossible à cicatriser. J'en suis conscient à présent et je n'attends plus aucun miracle. Je soupire en secouant la tête et me lève, bien décidé à passer à autre chose. Comme toujours.

Mes affaires prennent place dans le placard et la commode. Elles ne remplissent pas tous les emplacements mais mon ex doit m'envoyer les quelques cartons et même un fauteuil que j'ai laissés dans notre appartement. Enfin dans son appartement à présent.

Une fois mes bagages défaits, je me campe devant la fenêtre et ramène mes cheveux en arrière. J'observe la vue, me sentant soudain comme une coquille vide. D'ici je n'entends pas les bruits de la rue. Il y a seulement la musique parfaite de Tae qui me berce. Cependant, la mélodie est d'une tristesse écrasante.

Une larme m'échappe et dévale ma joue.

Suivie de tellement d'autres.

Boy(s) with luv | JikookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant