Moi, c'est Lucas. J'ai rien à dire sur ma vie, parce que y a rien qui m'intéresse. À part me défoncer et boire comme un trou lors des soirées, bah faut dire que j'fous pas grand-chose en fait.
Puis un jour, y a ce mec. Au début j'aimais pas son pré...
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JEUDI MATIN, avec Jolly
Ma cigarette se consume petit à petit entre mes doigts. Assis sur le sofa, je tire une tafe, j'expire de la fumée, je tire, j'expire ; avec monotonie. Mes yeux sont accrochés au mur de cette pièce qui est pas tout à fait une chambre à vrai dire. Je sais pas ce que c'est. Osef. J'sais juste que y a un bordel là-dedans et le mur devant moi est sale, des posters sont collés, des photos, des Polaroïd représentant des gens que j'connais pas. À droite, y a une vielle télé recouverte d'un plaid rouge, des livres, des CD-ROM, des bijoux pas vraiment à la mode. Ça me fait grave grave bizarre d'être ici en fait.
Bizarre, ouais. Mal à l'aise je dirais. Parce que les souvenirs exacts de la veille m'échappent. C'était ouf et bordélique et flou et plein de choses encore. Je me mets à penser à des trucs, des trucs qui tournent dans ma tête. Genre est-ce que la porte de cette chambre est fermée à clés ? Putain je voudrais pas imaginer qu'elle le soit et qu'un inconnu débarque tout d'un coup. Ah merde tuez-moi si une chose pareille se produit. Et puis j'me dis que les draps sont sales, que j'ai fac dans quelques heures, que Jolly doit tafer aussi, on est jeudi quoi.
Toutes ces interrogations, j'me suis même pas foutu me les poser hier soir. Non. Même pas. J'étais trop à l'aise. J'y ai pas pensé une seule putain de seconde. Faut dire que... ouais. Qu'hier soir c'était pas le meilleur moment d'y penser t'vois. Je pensais mais tellement à autre chose, très différent. Puis là je m'en veux. Genre un peu quoi.
D'un mouvement lent, je me tourne en arrière pour voir le corps allongé du mec avec qui j'ai passé la nuit. Il dort. Il dort bien, sa joue écrabouillée contre le coussin, le drap le recouvrant jusqu'au bas-ventre. Pourquoi je peux me réveiller chaque jour avec cette vision ? C'est injuste wesh. J'veux bien me réveiller chaque jour et tomber sur une vue aussi belle. Au moins là, j'aurais envie d'me réveiller t'vois. Le seul truc qui me rassure c'est que y a personne d'autre que moi qui aie droit à cette image. Ce qui est bien.
— Jolly... je dis doucement, en m'allongeant à moitié pour pouvoir caresser sa joue rouge du bout des doigts. J'aurais bien pu le secouer dans tous les sens pour le tirer d'son sommeil, mais sérieux là, j'ose pas. J'suis trop un gars doux avec lui j'en peux plus de moi. 'Fin t'as capté, je suis pas d'ce type, mais Jolly j'crois il a changé mon type. Comment, ça je sais pas mais il l'a quand même fait ce con.
— Mm... marmonne-t-il, en respirant fortement par le nez, dérangé.
— Tu t'réveilles ?
— Mm non...
Comment ça non. Il faut qu'il se réveille, on peut pas rester ici encore, wesh il est huit heures et mon cours commence à 11 heures et puis... au fond je m'en fous des cours, c'est juste que ça me met mal à l'aise d'être dans un appartement étranger. On se casse quoi.
— Jolly... on s'casse...
Je souris quand il bâille. Wesh pourquoi il est mignon comme ça, même quand il bâille avec sa gueule grande ouverte. Giflez-moi allez. Je rapproche mon visage pour l'embrasser dans le cou, c'est peut-être le seul moyen de le réveiller j'crois. Sa peau est chaude sous ma bouche et c'est si bien de sentir son parfum. Y a pas à sentir bon à huit heures du mat' c'est irréaliste. Je l'embrasse aussi doucement sous son oreille et il commence à bouger, à se tortiller entre les draps pour que j'arrête. J'crois je le chatouille mais j'sais pas. Moi aussi je kiffe pas quand on me réveille malgré moi, en vrai qui aime ça ? Il le faut par contre.
