CHAPITRE 3

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MOSCOU, PLACE LA LOUBIANKA, SIÈGE DU FSB

VENDREDI 3 AOÛT 2012, 4 H 45

Effervescence dans les sous-sols du FSB, l'agitation au niveau des bureaux de communications était sens dessus-dessous.

Après les révélations de Nikita Baranov, le procureur Nikolaï Volkov avait mandaté le Bureau M pour placer sur écoute le club d'Obolensky. Le FSB travaillait en étroite collaboration avec la Spetssviaz (Service des communications spéciales et d'information). Des agents avait, sans plus attendre, équipé les locaux de micros et autres enregistreurs dernières technologies. Après quelques manœuvres fines, l'informaticien hors pair du Bureau M – Pavel Vassiliev – avait récupérer l'adresse IP de l'ordinateur et l'avait tracée. Un mandat s'y était alors ajouté : une perquisition de l'atelier d'Obolensky. Rapidement, le système d'écoutes avait porté ses fruits. Le document fut d'abord transmis en fichier.txt vers un serveur spécial en données brutes. Il contenait donc toutes les erreurs perpétrées par la transcription audiotexte. Mais il n'en restait pas moins identifiable. Le message fut recueilli par fibre optique sur un second logiciel spécialisé dans la détection des mots clés. Tous n'étaient pas envoyés sur les ordinateurs. Le cas échéant, ça constituerait une montagne de travail impossible à gérer. Celui-ci retiendrait pourtant l'intérêt des agents.

Le premier analyste à prendre connaissance du message était Antov. Un informaticien pour le compte de la police politique. Un petit bedonnant affalé sur son siège. Des oreillettes lui transmettaient les messages. Tout à coup, un signal d'alerte aigüe se déclencha et il porta son attention sur l'écran. Il stoppa toute activité et leva un doigt, intimant le silence. La pièce était remplie de tables surmontées d'ordinateurs et une cinquantaine d'agents y œuvraient. Il parcourut rapidement l'ordinateur sur lequel s'affichaient en vitesse accélérée des lignes cryptées vert fluorescent. Malgré l'heure, tous ses sens étaient aux aguets. Ça puait la merde. Son sandwich lui était tombé des mains. Il retira ses écouteurs d'un geste bâclé et enfila un casque. Il écouta la transmission radio. Une fois puis deux. Attentivement. Le document s'avérait de bien piètre qualité. Il ne parvint ainsi à identifier que quelques mots clés. Néanmoins, les écritures sur le fichier.txt envoyé simultanément étaient plus claires.

— Appelez l'agent Smirnova, maintenant. C'est urgent.

Tout son corps tremblait d'excitation et d'angoisse. L'adrénaline coulait dans ses veines. Une dizaine de minutes plus tard, des pas lourds indiquèrent l'arrivée de Smirnova. Elle se posta au côté d'Antov.

— C'est quoi l'urgence ? demanda-t-elle d'une voix rauque, désagréable.

— Écoutez ça, chef.

Smirnova plaça le casque sur ses oreilles et écouta. En appuie sur ses coudes, elle se concentra sur l'audio haché et grésillant. Elle jeta un rapide coup d'œil au texte sur l'écran. Les écoutes étaient sans appel : Obolensky et le maniaque du darknet étaient un seul et même homme.

— Très bon travail, Antov. Continuez comme ça. Je dois passer un coup de fil.

Elle pivota et quitta la salle des communications. Elle emprunta les escaliers de service et monta les marches quatre à quatre. Elle bifurqua à droite, longea un couloir désert et obliqua sur sa gauche. Elle plaqua son portable contre son oreille.

— Tkachenko, réunion de crise. Ramène le reste de l'équipe.

☦︎

5 H 15. Smirnova entra comme une furie dans son bureau. Tous ses agents étaient là. Vassili Volkov, Khassan Vizirov, Pavel Vassiliev, Mikhaïl Tkachenko. Deux d'entre eux attendaient à la fenêtre, une cigarette dans le bec. Vassiliev pianotait sur son téléphone de sécurité. Tkachenko patientait, assis sur une chaise. Smirnova frappa du poing sur la table. Tous se retournèrent face à l'organigramme sur les Productions de Sevvostlag. Ils tendirent leurs mains droites au niveau de la tempe en un salut militaire parfait. Le loup de Tchétchénie – Vizirov – hocha la tête avec un petit rictus funeste.

Supplices de Toundra - 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant