Antonio

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- Pourquoi tu voulais partir aussi vite ? me demanda-t-il, les yeux toujours rivés sur la route.
J'étais dans un autre état, mes pensées m'accaparaient complètement, je tentais de cacher mes tremblements tant bien que mal.
J'avais fait tous les efforts possibles pour fuir mon ancienne vie, j'avais tout quitté, tout lâché, tout abandonné et en une fraction de seconde, tout m'avait à nouveau éclaté au visage.
- Elisa ?
Mes pensées m'avaient aspirées, encore.
- Oui ? dis-je en secouant la tête de façon à chasser mes pensées.
- Pourquoi tu voulais partir aussi vite ? répéta-il avec insistance, en me regardant dans les yeux.
- Je me sentais pas très bien, les gens là-bas sont très... intimidants, rigolais-je, gênée.
Il ricana.
Il sortit une clope de son paquet et m'en tendit une.
Je lui souris faiblement.
Je me détestais du plus profond de mon être. Je me haïssais et je regrettais le passé. Il n'était pas de mon fait, on me l'avait imposé, obligé, forcé mais les souvenirs de leurs mains arpentant chaque partie de mon corps, me touchant, s'imprégnant en moi était insupportable.
Ils m'avaient fait me détester, ils m'avaient totalement transformée, je n'étais plus femme, je n'étais plus qu'un objet sexuel.
Je me souviens des douches où je me frottais la peau à sang pour me donner une toute petite impression de laver leurs empreintes de ma peau.

Il vint poser sa main sur ma cuisse et soudain mon esprit ne se concentra plus que sur ce contact inattendu.
J'écarquillais les yeux et laissais ma respiration ralentir.
- Tu as la même expression de visage quand tu paniques intérieurement qu'elle, me dit-il calmement.
Oh non, pas maintenant.
- Qui, elle ? demandais-je en priant avoir la mauvaise réponse dans ma tête.
- Ma soeur, elle était aussi douce que toi, c'est perturbant à quel point tu lui ressembles dans tes mimiques.
- J'ai besoin de savoir ce qui s'est passé.
Je le savais déjà.

Il me regarda un instant, l'air hésitant et se décida enfin au bout de longues secondes à se confier à moi.
- Elle était partie faire du shopping en ville avec ses amies. Je ne lui avais jamais donné l'autorisation, elle ne sortait jamais de la maison mais cette fois c'était différent. Elle a été kidnappée par le gang Reilles, tabassé et violée. Ces fils de pute m'ont envoyer toutes les vidéos. C'est comme ça que la guerre a commencer.
Il tira une latte sur sa clope et me regarda un instant avant de s'arrêter sur le bord de la route.

La route était déserte et avait un petit rebord à hauteur de mon ventre, en arrière-plan se trouvait la ville.
C'était beau, très beau.
Les mille et une étoiles brillant dans le ciel nous faisaient nous rendre compte de notre si petite existence.
C'était beau.
Il m'empoigna la main et me monta sur le mur.
Je le regardais dans les yeux, je le regardais me contempler.
Son visage était juste en face du mien. Il passa une de mes mèches derrière mon oreille et puis il passa son pouce sur mes lèvres avant de laisser sa main glisser sur ma joue.
Le silence régnait, ni lui ni moi ne parlions.
On se regardait simplement nous apaiser mutuellement.
Et d'un coup, il approcha son visage du mien et posa sur mes lèvres, les siennes.
Un frisson parcourut tout mon corps. Je vins poser ma main à l'arrière de son crâne, laissant quelques un de ses cheveux s'emmêler avec mes doigts.
Il m'embrassait, lui.
Il m'embrassait, moi.
Une petite larme coula le long de ma joue pendant son baiser si doux.
Larme qu'il effaça une fois s'être détaché de mes lèvres.
- Tu es tellement précieuse, Elisa.

J'entourais sa nuque de ma main et l'approchais à nouveau de mes lèvres pour venir l'embrasser à nouveau.
Et une fois ses lèvres contre les miennes, tout avait disparu de nouveau. Toutes les tortures qui me tuaient de l'intérieur, plus rien n'existait.
Je l'aimais.

- Viens, on rentre à l'hôtel.
Il attrapa mes cuisses et me porta jusqu'à ma place dans la voiture.
Et il démarra à toute allure.
Il arpentait les routes tellement vite que je n'arrivais même plus à distinguer la moindre lumière de la ville, mais ça ne comptait pas, je m'en fichais. Si je devais crever, je crèverais.

born to dieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant