La Sourde et la Brute

20

Point de vue: Ava

Je regarde à travers le miroir Amina et Moana s'activer sur ma longue chevelure noire. Hier, Amina et Anthony sont sortis en ville pour faire des achats de première nécessité. Et la blonde a pensé à m'acheter de quoi soigner mes cheveux.
Et je lui en suis reconnaissante. Puisqu'ils commençaient à devenir terne, pour mon plus grand malheur. Les deux jeunes femmes s'amusent à y appliquer un soin nourrissant, puis elles enroulent ma chevelure dans une serviette humide.
Moana attrape mon carnet. Puis elle écrit. En attendant, je me concentre sur Amina. Elle s'active à ranger la salle de bains. Cette grande salle de bains qui fait la taille de mon ancien appartement. La douche à l'italienne coûte sans doute plus cher que mon ancien loyer.
D'ailleurs, la chambre dans laquelle je loge est magnifique. Grande, clichée et chaleureuse. Rose, d'abord. Mais luxueuse. Le lit à baldaquin est plus que confortable. On pourrait y dormir à trois! Et puis, le mobilier me fait penser à la chambre d'una princesa.
Il y a cette porte aussi. Celle qui donne directement sur la chambre de Marco. Celle qu'il empreinte le soir pour venir me réconforter lorsqu'il m'entend hurler après un cauchemar. Ceux où je revis la perte de tous mes proches. Mais ils se font de plus en plus rares.
Soudain, la porte de la salle de bains s'ouvre, faisant sursauter Amina et Moana. Je m'empresse de me cacher en attrapant une serviette rapidement. Je suis quand même en serviette de bain! Je croise dans le miroir ce regard noir.
Mais qu'est-ce qu'il fiche ici? La salle de bains, c'est interdit! Il le sait! Je le foudroie du regard. Mais je me calme dès que je vois sa mine renfrognée. Il devait sûrement s'attendre à me voir seule. Et non pas avec ces deux jeunes femmes. Moana me donne mon carnet. Je lis.

"C'est dix minutes le soin.
On doit vous laisser?"

Quoi? Me laisser seule avec lui alors que j'ai pris la confiance en le fusillant du regard? Hors de question! Je fais donc "non" de la tête. Les deux filles me regardent, puis regardent Marco. Et je suis cette scène depuis le reflet du miroir.
Je croise pour la seconde fois le regard de Marco. Et je me vois m'empourprer. ¡Idiota! Je rougis comme une collégienne! Mais, après tout, je suis quand même à moitié nue! Je n'ai qu'une simple serviette comme vêtement.
Je donne un coup de coude à Moana afin de récupérer mon carnet, ainsi que le stylo. J'écris, ayant besoin que Marco quitte cette pièce. Je tends la page à Moana où j'ai écrit: "il doit sortir! Je suis nue!"
Elle sourit. C'est ça! Moques toi de moi! Elle regarde ensuite derrière moi. J'observe du coin de l'œil Marco qui semble alors lui accorder toute son intention. Un maigre sourire en coin naît sur ses lèvres. Puis ses lèvres bougent, et je sais qu'il me parle puisqu'il me fixe.

"Mon bijou est donc pudique? Alors j'attends dans la chambre."

Je resserre ma serviette. Et je le foudroie du regard. Ne joues pas avec mes nerfs Marco! Je pourrais décider de t'ignorer! Ce n'est pas parce que je pleure dans tes bras forts et que tu me réconfortes la nuit que je dois tout te céder.
Non! Je cède uniquement parce que tu es haut placé dans un cartel colombien, que tu es dangereux, et que tu peux décider de ma vie ou de ma mort.
Marco regarde un derrière fois les filles et sort. J'expire. J'avais trop retenu ma respiration. Mais... C'est Marco! Une main se pose sur mon épaule. Je regarde donc Amina droit dans les yeux en me retournant. Elle me désigne mes cheveux, et je comprends qu'elles doivent finir. J'hoche la tête.

💠💠
💠

Je rejoins sur la pointe des pieds ma chambre, habillée d'une pantalon à pince noir et d'une chemise en dentelle de la même couleur. Amina et Moana ont tout de même oublié une chose: les chaussures. Je suis pieds nus!
La silhouette de Marco ne passe pas inaperçue dans cet espace. Paradoxalement, cette pièce immense semble minuscule lorsqu'il est à l'intérieur. Il relève la tête pour poser son regard noir sur moi. Je souris brièvement.
Je le rejoins donc. Je lui donne mon carnet où j'ai déjà écrit la question: "tu veux me parler?" Il prend le stylo pour écrire. Puis me rend le carnet.