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Point de vue: Marco

•Un mois plus tard•

Quel bastatso! Ce pequeño trafiquant a osé nous voler notre marchandise! Et Mickaël risque aussi d'être très en colère. Comme mi hermano en ce moment même.
Il fait les cent pas tel un félin, près à bondir sur sa proie. Et ça risque de faire mal. Mickaël n'est pas beaucoup touché, il a déjà l'argent. Mais nous... on se retrouve sans argent, et sans cannabis!
Pedro s'arrête soudain. Il a le regard froid, très obscure, et si ce n'était pas mon frère, j'aurais très peur pour ma vie. Il fronce les sourcils. Je l'observe en silence et avec patience. La patience est bien une de mes meilleures qualités dans ce monde. Sinon, j'en aurais déjà tué plus d'un.

-Je vais tuer cet hijo de puta de mes propres mains!
-Tu dois avant tout prévenir Mickaël. C'était sa marchandise. Et puis, tu dois agir avec lui. C'est une attaque contre nos deux cartels.
-Je sais Marco! Tu es mon bras droit, mais si c'est pour me dire des choses aussi stupides, tu la fermes! hurle Pedro.
-¡Mi hermano! Je crois que tu devrais te calmer un peu. J'essaie de te guider parce que tu commence à voir rouge! Si mes conseils ne te plaisent pas, tu peux aller te faire foutre!

Je me lève, furieux, et fais quelques pas pour quitter ce bureau de mierda! Je sens une main se poser sur mon épaule. Je fais volte-face pour dévisager le visage de mon frère, tiraillé entre l'envie de me foutre un sévère coup de poing et de celle de me garder près de lui dans sa tourmente.

-Ne pars pas Marco.
-Mais je serais toujours là pour toi mi hermano. Agis maintenant, qu'on en finisse avec ce bastardo.
-Je vous rejoins au salon. Réunis tout le monde en attendant.
-À tes ordres, jefe.

Je lui accorder un dernier regard avant de sortir de son bureau. Je passe devant la chambre d'Ava. J'ouvre la porte sans toquer. De toute façon, elle est sourde. La jeune femme aux cheveux jais est allongée sur son lit, son carnet dans les mains.
Je m'avance et lui tape -délicatement- le dessus du crâne. Elle relève la tête et sourit légèrement. Curieux, je pose mes yeux sur son carnet. Elle semble relire d'ancienne conversation. Je reconnais mon écriture. Et la sienne. Je signe.

"Qu'est-ce que tu fais?"

"Rien d'important."

"Tu es sûre de toi?"

"Oui."

Je la fixe, septique. Mais j'y fais abstraction.

"Viens avec moi au salon. P-E-D-R-O doit faire une réunion."

Elle ne répond pas et se contente de se lever, prenant tout de même son carnet et son stylo. En un mois, j'ai pu approfondir mon apprentissage de la langue des signes, comme Moana, Amina, Alejandro et Anthony. Ainsi, nous arrivons plus ou moins à t'en une conversation avec Ava. Et je pense que cela lui fait du bien. De se sentir comprise.
Nous rejoignons rapidement le salon, où elle s'installe avec les autres qui sont -étrangement- déjà tous présents. Je regarde Alejandro en fonçant les sourcils. Pedro m'aurait-il devancé? Lorsque j'entends des bruits de pas dans mon dos, je me retourne. Pour effectivement faire face à mi hermano.
De son regard, noir et perçant, il instaure le respect et le silence se fait rapidement dans la grande salle. Il me jette un coup d'œil, puis regarde Ava, non loin de moi. Je vais devoir faire le traducteur.

-Bien! Alors je ne vais pas passer par quatre chemins. Je veux la mort de trafiquant de mes deux qui se fait appeler Nat. Dans une heure, on part. Mickaël envoie quelques hommes à lui. Parce que, comme moi, il ne laisse pas passer le fait qu'on nous ait volé et trahit. Bien. Toute la partie gauche de cette pièce vient. Les autres, restés attentifs.

Je traduis pour Ava. Et elle comprend qu'en effet, elle est de la partie. Après tout, les autres aussi vu qu'ils sont à droite. Moana se lève, et Alejandro la suit du regard. Ces deux-là ne s'adressent plus beaucoup la parole depuis que la jeune femme a fini sa formation. Pourquoi? Je ne sais pas. Mais c'est encore un mystère à régler.
Je regarde mi hermano. Pedro. Je me rappelle encore de nos instants d'insouciance à la maison familiale. Notre tante nous laissait jouer dans le jardin. Et on jouait déjà au gang. Aux tueurs. Mais on faisait semblant. On ne savait pas. Aujourd'hui, ce jeu est devenu réalité.
Ô mi hermano! Je vois cette colère sourde en toi. Celle qui m'a si longtemps animée. Celle qui m'a consumée, dévorée. Celle qui a gagné et qui fait de moi un pantin. Sauf que la tienne est pure. Elle n'est que colère et haine. Moi, la mienne, est souillée.
Ma colère est depuis toujours souillée par la perte, le deuil. Celui de mon premier amour. Le seul. L'unique. L'erreur qui m'a fait tomber. Que je ne commettrai plus. Parce que je n'ai tout simplement pas su me relever assez vite.
La mienne est souillée par ma tristesse. Elle est souillée par ma honte. Ma culpabilité. Et par ma rage d'oublier parfois. Je m'en veux. Et ma colère se souille de la culpabilité. La culpabilité sous toutes ses formes.

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Point de vue: Pedro

Je vais tuer cet hijo de puta. Je vais le butter. Je vais le tailler en pièce. Je vais le pulvériser. J'écraserai si fort sa tête de bastardo que sa mère ne le reconnaîtra même plus! Et je vais adorer lui écraser sa sale face de rat!
Tour à tour, je regarde mes hommes. Ouais. On va les massacrer. Ça va saigner. Ça va prier. Ça va pleurer. Et ça appellera su mamá. Mais toutes les madres du monde seraient incapable de m'arrêter. Je veux sa tête sur un pique que j'accrocherai devant ma villa pour faire comprendre une chose.
Il ne faut pas s'en prendre au clan Esteves. Il ne faut pas s'en prendre au grand Pedro Esteves. Parce que Pedro est un fou. Un fou qui a des principes qu'on ne doit pas bafouer. Et cet hijo de puta de Nat a chier sur mes valeurs. Il va donc mourir.
Et je me ferais un plaisir de lui faire subir les pires atrocités de cette terre. Je veux qu'il sente la douleur dans chacun de ses membres. Je veux qu'il se pisse dessus comme la mierda qu'il est. Je veux qu'il m'implore. Ouais. Qu'il me suce bien pour que je le laisse laisse vie.
Mais moi, je veux sa mort. Alors je ne le laisserai pas me sucer. Non. Je veux vengeance. Je veux son sang sur mes mains. Je veux voir ce liquide rouge se répandre sur moi. En même temps qu'il hurlera mon prénom.
Je veux qu'il emmène mon prénom en enfer. Je veux que tous les hommes de cette terre et ceux qui n'y sont plus aient peur de moi. Ils doivent trembler en entendant mon prénom. PUTAIN! JE VEUX QU'ON ME CRAIGNE POUR CE QUE JE REPRÉSENTE!
La faucheuse doit m'envier. Elle aussi doit venir jusqu'à moi pour m'implorer. Je veux qu'elle me demande de lui apprendre à faire le mal. À envoyer des hommes hurlant de douleur voir el Diablo. Je veux honorer mon pacte avec le dieu des enfers.
Et je le ferais! Je le ferais parce que cet hijo de puta m'a volé ma marchandise. Parce qu'il a osé se pointer sur MON PUTAIN DE TERRITOIRE POUR ME VOLER! Alors ouais, on va aller jusqu'à lui pour détruite tous ses espoirs de célébrité. Tu n'es qu'una mierda sur cette terre, Nat.
Je pose mes yeux sur Marco, mi hermanito. Il me fixe aussi. Je sais à quoi il pense. Je le sais parce qu'il est le seul à me connaître. Et que je suis le seul à le connaître aussi. Il y a ce lien d'hermanos invisible et fort. On se comprend. Plus que les autres ne peuvent nous comprendre.
Et je sais qu'il pense à lui. Qu'il commence à penser au passé. Et je ne veux pas. Non, Marco, ne penses pas à elle. Ne penses pas à vous. Ne penses plus. Parce que si tu penses, tu te perds. Tu te noies et tu coules. Mais je ne veux pas que tu sombres.
Cette fille, tu le sais, était incroyable. Mais elle nous manipulait. Tu as préféré t'occuper de cette traîtresse toi-même. Je n'ai jamais eu les détails, mais je sais. Tu m'as tué. Tu as tué celle que tu aimais à cause de ta vie, de notre vie, celle que nos parents ont tracé pour nous.
Elle ne méritait pas de mourir. Parce qu'elle était perdue dans ce monde et qu'elle essayait par tous les moyens de survivre. Elle n'était pas méchante. Elle t'aimait. Elle t'aimait si fort qu'elle t'a laissé la tuer pour ne pas voir ta rancœur et ta douleur chaque jour.
Tu ne mérites pas de mourir petit à petit de l'intérieur, mi hermanito. Tu as fait l'erreur d'aimer la mauvaise femme. Une pauvre névrosée qui était déjà condamnée. Mais tu l'as aimé. Parce que l'amour c'est aller au-delà de tout. Mais c'était une erreur. Tu dois t'en souvenir, Marco.
Comme je dois me souvenir de pourquoi je suis ici. Pourquoi je suis le jefe. Pourquoi je tue. Pourquoi je suis en colère. Pourquoi je me bats. Et toi-même tu sais. Je me bats pour que tu puisses avoir plus de libertés. Je me bats pour nos valeurs, celle que nous suivrons jusqu'à la mort.

La Sourde et la BruteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant