Point de vue: Marco
On est de retour à Pereira. Et ça me fait du bien. Cette ville appartient à mi hermano, alors je sais que j'y suis en sécurité. Même si Tumaco appartient aussi à mi hermano, je suis éloigné de lui, de notre famille et du Q.G., alors je suis obligé d'être à l'affût.
D'ailleurs, je l'ai bien remarqué ces dernières temps. Je ne suis en sécurité nulle part. On se fait constamment attaquer, et ça devient trop dangereux de faire des échanges en extérieur ou en zone neutre. Mais je me pose une seule question: comment peuvent-ils savoir constamment les lieux de transaction?
Si il y a encore une taupe, Pedro va finir par exploser et tous nous butter. Non pas que je tiens à ma vie, mais j'y tiens quand même. Il faut que je lui parle. Même si je pense qu'il a déjà prévu une petite entrevue entre lui et moi.
Je gare le SUV devant une des villas de Pereira. L'autre n'est plus vivable et sûre depuis l'attaque de Samuel. Il a su la trouver, d'autres la trouveront. Et puis, elle n'est plus que débris de verres, de bois et impactes de balles. Rien de transcendant.
Je pose le regard sur Ava, allongée de tout son long à l'arrière du véhicule. Elle a eu du mal à se remettre de son geste. Celui qui m'a sauvé la vie. Cet homme est probablement mort en se vidant de son sang. Je pense qu'Ava change petit à petit. Le cartel s'immisce de plus en plus dans ses veines.
Le 4x4 de Giotto se gare derrière mon véhicule. Felicia sort, prend ses sacs. Bouges toi Marco. Je sors à mon tour de ma voiture. J'ouvre la portière arrière pour attraper Ava. Elle est épuisée, elle n'a pas dormi de la nuit. Quand je me tourne, je vois Alejandro se jeter sur sa sœur pour la prendre dans ses bras.-Putain, tu n'as rien, mi hermanita.
-Ça va, Alejandro, ne joues pas au papá.
-Moi? Jamais! Je voulais juste m'assurer que je pourrais moi-même te tuer quand tu te mariera avec de Francesco de mes deux.
-Parles mieux de ton beau-frère, Alejandro!Je tourne la tête pour voir Francesco sortir à son tour. Felicia lui saute au cou pour l'embrasser. Beurk. Je me détourne pour regarde Alejandro qui affiche une grimace de dégoût. Ce type me fera toujours rire, même dans les pires moments.
-Allez, Alejandro, montres toi utile et portes mes affaires et celles d'Ava dans ma chambre.
-Vous faites chambre séparée. Ordre de Pedro.
-Pourquoi?
-Je ne sais pas. Tu verras avec lui.Je fronce les sourcils quelques secondes. Que se passe-t-il mi hermano? Qu'as-tu en tête?
Je ne reste pas ici longtemps. Rapidement, je gagne l'étage de cette villa. Si on fait chambre séparée, je sais au moins lesquelles mi hermano nous a attribué. Je rejoins le bout du couloir. Les seules chambres qui ont une porte de communication à l'intérieur.
J'ouvre la porte de gauche. La chambre rose. Quel cliché... Mais bon, Pedro est un cliché sur pattes. Un de plus ou un de moins... ça ne change rien. Je dépose mi joya sur son grand lit, froissant les draps froids et soyeux. Du satin? Sérieusement? J'ai presque envie de rire.
Cependant, je ne reste pas. Non. Je dois avoir une discussion avec el jefe. Et maintenant. En me retournant, je croise le regard océan de Moana. Bien. Ava ne sera pas seule. Je n'aime pas qu'elle gère ses cauchemars seule. Je fais signe à la polynésienne avant de sortir.💠💠
💠J'entre sans frapper dans le bureau de mi hermano, el jefe. Je n'ai pas besoin de m'annoncer. Et puis, même si il est le jefe, il n'est pas non plus l'homme le plus puissant de la terre. Il n'a pas le pouvoir divin. Et puis je suis su hermanito! J'ai bien le droit à quelques privilèges!
Sa grande musculature assombrie la pièce alors qu'il est devant la baie vitrée. Il se tourne en m'entendant. Je m'avance, jusqu'à arriver devant son bureau. Puis je m'installe dans un fauteuil. Pedro me fixe.-Je dois faire chambre à part avec Ava maintenant?
-Cest trop dangereux. L'attaque de l'ancienne maison et le reste. Je préfère prendre toutes les mesures. Mais vous avez la porte de liaison.
-Encore heureux! Elle fait des cauchemars souvent, et je dois la réconforter.
-Ouais.
-Mi hermano. Ça va?
-Ça va. J'essaie de comprendre certaines choses.
-Comme?
-Pourquoi notre cartel part en vrille, d'abord.Le regard dans le vide, les sourcils froncés. Je n'ai jamais vu mon frère aussi inquiet. Mierda... Mais comment on en est arrivé là? On doute de chacun de nos membres, on...
-Y a une autre taupe. Peut-être plusieurs. Je n'en sais rien. Je ne peux pas surveiller tout le monde. Pour le moment, je vais demander à Anthony de s'occuper de contrôler tout ceux qui sont sur Pereira. Mais je ne sais pas...
-Je sais, Pedro. Et, as-tu pensé à aller voir papá pour avoir des conseils?
-¿Papá? Il se fera un plaisir de vouloir reprendre la barre. On a déjà eu du mal à le faire quitter le navire.Un mince sourire étire mes lèvres. Ouais... Notre père ne voulait pas céder sa place à Pedro. Mais il est maintenant âgé. Et puis, il doit penser à se reposer, au près de notre tante qui, elle, est fatiguée de toutes ces histoires d'armes, de drogues, de dangers.
Nos parents, Rico et Shiappa, se sont connus quand ils étaient jeunes. Très jeunes. Ma mère avait quatorze ans, mon père dix-sept. Une fois que ma mère a été majeure, ils se sont mariés. Un mariage d'amour. Mon père a créé son empire avant de s'engager avec ma mère. Il avait peur pour elle.
Mais elle n'avait pas froid aux yeux. C'est le cas de le dire... Elle est morte quand j'avais deux ans. Et c'est sa sœur, notre tante, qui nous a en partie élevé.
Ma mère maniait les armes et les explosifs à la perfection. D'ailleurs, je suis certain que nous tenons celle d'elle. Je pense que mon père, même à la "retraite" -soit depuis cinq ans-, n'a pas cessé de s'entraîner. Ce qui expliquerait aussi pourquoi il semble avoir dix à vingt de moins. Il est loin de faire sa soixantaine! Ce qui doit épuiser ma tante à longueur de journée, d'ailleurs.-Enfin bon... Ça ne me tuera pas de lui soumettre mes doutes. Après tout, ce cartel, il l'a dans le sang, et si je m'en occupe mal, il me bottera les fesses.
-Est-ce que tu sais qui étaient les hommes qui nous ont attaqué à Tumaco?
-Aucune idée. Il y avait juste ce type mort quand j'ai envoyé des hommes.
-Anthony a donc intérêt à bien se mettre au travail à son retour.
-Ouais... Je suis déjà sympa de lui offrir un week-end avec sa copine en pleine crise, alors son travail devra être parfait. Ça me fait d'ailleurs penser... montes moi une équipe pour demain, j'ai rendez-vous avec Olivio Hernandez. Évidemment, tu es de la partie, et ta protégée aussi. Mais pas de faux pas. Ça me permettra de la voir sur le terrain.
-Olivia Hernandez? Cette femme pèse de millions, et elle ne travaille qu'avec les américains.
-Il faut croire que mon charme opère encore!
-Ce fameux charme... Je pense surtout qu'elle a besoin de fric cette nana.
-Écoute, elle m'a dégoté de vrais bijoux. C'est la meilleure fournisseuse du continent. Alors je veux la meilleure équipe. Ceux en qui j'ai confiance et qui savent ce pourquoi ils sont avec moi.
-Pas de soucis. Je sais déjà qui prendre.Je me lève, n'ayant plus rien à faire dans le bureau de mi hermano, qui soit d'ailleurs avoir beaucoup de choses à régler.
Une mission prévue la veille pour le lendemain? C'est plutôt rare. Non. En fait, c'est c'est jamais vu. Seulement... Ouais, je vois. Pedro cherche à noyer le poisson. Si demain on se fait attaquer, le cercle de personnes mises au courant sera restreint. Donc la taupe serait un proche.
Même si je ne crois pas en cette théorie, on doit la vérifier. Pour moi, les membres les plus importants du cartel, et donc ceux qui sont les plus proches de nous, sont des personnes de confiance. On les connaît depuis presque toujours.-Marco!
Je me retourne alors que j'allais quitter la pièce. Je dévisage mon frère. Quelques secondes, j'ai l'impression de voir mon propre reflet et celui de mon père. Mierda... Je ne pourrais jamais le renier ce con!
-Pedro?
-Je compte sur toi. Et je veux que la niña soit prête. Pas de conneries demain. Tiens tes troupes. Ils se dissipent trop dans les sentiments ces derniers temps.
-Pas de soucis. Ce sont des professionnels, n'oublies pas.Je lui souris, histoire de le rassurer, puis je quitte la pièce. J'avais vu ça aussi... Mis amigos qui oublient qu'ils sont membres d'un cartel, et qui pensent plutôt jouer dans une série sentimentale américaine. Mais que puis-je faire réellement?
Même si nous sommes de la pire espèce, on a quand même le droit à l'amour et au bonheur. Pas vrai?

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La Sourde et la Brute
Romance"Parce qu'elle était une âme égarée Qui a rencontré son âme déboussolée; Il avait le talent de tuer Et elle celui de supporter; Il a suffit d'un seul regard Pour que chacun s'égare; Parce qu'il était un connard et elle un rempart Ils faisaient...