LIBÉRER

CHAPITRE 02 : Miroir brisé.

SAMANTHA.

Mon menton posé dans le creux de la paume de ma main, je regarde la mine de mon stylo bleu rayer sur le coin supérieure droit de mon cahier.

Je dessine. À chaque page, je tague, je trace des petits dessins pour enjoliver mes cahiers.

Une tête ronde, une moustache et des cornes de diables sur le sommet de sa tête. Collins.

Je regarde le cœur brisé en milliers de petites miettes que j'ai fait juste à côté. L'état de mon cœur.

Puis, je regarde mes petits tirets. Mes objectifs, ce qui me permet de survivre : Espérer, tenir, travailler, partir. Quatres verbes qui résument ce que je vise.

Et enfin, je regarde cette jolie rose que j'ai coloré avec mon stylo rouge. Une rose, comme celle située sur mon avant-bras gauche. C'est moi-même qui l'ait créer. Puis, j'ai remis le croquis au tatoueur pour qu'il le reproduise.

Depuis mon plus jeune âge, j'aime le dessin. Surtout celui au crayon à papier sur une simple feuille de rame ou de canson. J'aime la beauté du noir et du blanc qui ressort lorsque les ombres sont bien faites. 

Dessiner, c'est mon échappatoire. Même quand tout allait bien, je ne passais pas une journée sans, au moins, esquisser un croquis ou reproduire un objet. C'est ma particularité, la reproduction.

Je suis claquée en imagination.

Et même lorsque j'essaie de mettre en avant mon imagination, je suis déçue de la noirceur qui en découle.  Des dessins ternes qui racontent des histoires tristes car mon imagination n'est que le reflet de mon âme. Alors j'ai arrêté d'imaginer pour me concentrer sur la reproduction.

Je n'écoute plus ce que la prof de philosophie nous dit. Je crois qu'elle parle de la conscience. Ce cours ne m'intéresse pas plus que ça. J'ai toujours été un peu nulle s'agissant de la philosophie. Je ne comprends pas le quart de ce que ces philosophes racontent et c'est encore pire lorsque la leçon ne me dit rien.

— Quelqu'un pourrait-il m'expliquer que veut dire Hegel, lorsqu'il cite : "ce qui élève l'homme par rapport à l'animal, c'est la conscience qu'il a d'être un animal. Et du fait qu'il sait qu'il est un animal, il cesse de l'être" ?

Voyez-vous, je ne comprends même pas le sens de la phrase. 

— Oui, mademoiselle ? Votre nom.

— Hayes.

— Très bien, mademoiselle Hayes, on vous écoute.

Je relève discrètement mon visage et tends mon oreille, curieuse de comprendre cette citation en français facile.

— La conscience permet de différence l'homme à la chose, l'homme à l'animal. Nous pouvons insinuer ici que Hegel affirme que la conscience implique des conséquences sur l'image qu'un homme a de lui-même et son rapport avec le monde. 

Bon. Ce  n'est pas mieux, mais je comprends.

Et je conclus que mon père ne doit pas avoir de conscience vu tout les actes qu'il commet. Est-ce de façon irréfléchie ou est-ce une façon sournoise d'aimer me voir en mauvais état  ?