Chapitre 15

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2 février 2022

Aujourd'hui Killi m'avait kidnappée à mes amies pour m'emmener dans un endroit auquel, à ses dires, il tenait beaucoup et il était naturel pour lui de me le montrer. J’ignorais où nous allions mais j’avais ce sentiment de pouvoir lui faire confiance. Lorsque je pris congé de mes amies, suivant mon prince Karol me fit un clin d'oeil appuyé et un sourire entendu, signe qu’elle savait ce qui se préparait et cela ne me rassurait guère quand les deux personnes les plus proches de mon entourage s’alliaient. J'avais donc suivi mon prince qui m'avait emmené visiter son jardin secret et j’avais été très touchée d’avoir été amenée là-bas car il se dévoilait à moi comme moi je n’étais pas encore prête à le faire. Son jardin d’Eden était un petit endroit du parc bien caché des regards où cohabitent  harmonieusement oiseaux et fleurs. Ce petit jardinet était pourvu d'une cascade entourée de lichen, d'un petit banc en pierre et à ma grande stupéfaction d'un piano qui trônait au centre de l’ensemble. Un piano blanc qui étincelait sous le soleil et qui appelait le musicien à venir le rejoindre. Ce paysage était tout simplement idyllique, presqu’irréel vis-à-vis du reste de la propriété. J’avais, malgré moi, un sourire d’aise, qui s’était formé sur mes lèvres. Je me sentais bien ici, entourée par la nature et auréolée par le soleil. Je ne parvenais pas concrètement à exprimer la beauté de ce lieu, aucune célébration ne me permettrait de louer cet endroit à sa juste valeur.  

- C'est magnifique Killian.

- C'est ici que je viens lorsque je suis triste, où quand…

Je me tournais vers lui et vis que son regard s’était perdu au loin, et d’une petite voix je lui demandais l’issue de sa phrase qu’il ne me donna pas. Son ton fut un peu dur, et je compris rapidement qu’il omettait de me parler d’un événement de sa vie, sûrement une plaie intérieure qui n’avait pas encore tout à fait cicatriser. Nous n’étions finalement pas si différents

- Oublie s’il te plaît, tu veux que je te joue quelque chose au piano?

- Vas-y je t'écoute, j’ai hâte que tu me montre ton talent, sûrement immense, pour le piano.

J’étais curieuse de savoir comment il jouait du piano et très heureuse que nous partagions une même passion pour la musique. Il alla s'asseoir au piano et commença à jouer les accords de Perfect, il ne le savait pas mais c’était une musique qui me tenait à cœur parce qu’elle était liée à un moment de ma vie plus ou moins heureux. Très vite sa voix vint se joindre à ses mains et lorsque je l'entendis chanter je me dis qu'il avait tout. En effet sa voix était juste magnifique, à la limite de l’envoutement. Je n'ai pas les mots pour la qualifier parfaitement. Je l'écoutais chanter et petit à petit je fermais les yeux pour que la musique m'envahisse entièrement et ça fonctionna immédiatement, puisque je me connectais à la musique et que, m’accoudant au piano je laissais ma voix rejoindre la sienne. Les oiseaux s'étaient tu écoutant eux aussi le piano chanter. Nous étions tous les deux si près et pourtant si loin du palais et de ses contraintes. A la fin de la mélodie je rouvris les yeux ayant un sourire léger posé sur les lèvres. Le soir nous montâmes sur le toit, par lequel on accède à travers une petite trappe. Alors ne vous attendez pas à une pluie torentielle soudaine comme dans les films puisqu’il faisait un temps radieux, doux, et nous n’avons pas non plus dansés sous la pluie trempés, ça avait été encore mieux, tellement plus beau. Nous sommes montés là-haut pour admirer le coucher de soleil. Lorsque j’admirais la vue qui nous était offerte je trouvais cela féérique. C'était incroyable de voir le panorama magnifique de la Sicile, puisque le palais surplombait la ville de toute sa hauteur. Au loin nous vîmes les montagnes et juste avant nous avions les reflets des rayons sur la mer, cet aperçu me poussa à penser que l’eau représentait sous certains aspects le miroir de ma vie, dans lequel se reflétait mes peurs, mes rêves et mes pensées. Me sentant observée je tournais mon regard vers Killian qui me regardait avec un sourire heureux, presque fier de ma réaction face à la vue de son pays, et je dois avouer que je le trouvais extrêmement beau sous ce ciel auréolé de couleurs chaudes. Soudain, j'eus une irrépressible envie de me sentir proche de lui, de le sentir tout contre moi, pour une fraction de secondes. Doucement et lentement nous nous rapprochâmes, nos regards s'encrèrent l'un dans l'autre, nos nez se chatouillèrent, nos fronts se collèrent, nos souffles saccadés se mêlèrent, nos mains devenaient brûlantes, la distance entre nous se réduisait à vue d’œil lorsque..

- Votre majesté c'est l'heure du diner. Oh, veillez à m’excuser votre altesse je n'avais pas vu que vous étiez en si bonne compagnie. Le diner vous attendra dans le réfectoire, et il en est de même pour vous mademoiselle.

Le majordome s'éclipsa rouge comme une pivoine d’être arrivé au moment importain. Lorsqu’il fut parti, nous pouffâmes de rire puis reprenant notre sérieux nous décidâmes d’aller effectivement manger au réfectoire  notre absence à tout les deux aurait été trop suspecte. Nous traversâmes la terrasse du toit main dans la main, laissant derrière nous ce paysage apaisant et éblouissant, pour rejoindre l’intérieur froid et austère du palais. Avant que nous n’empruntions la trappe  nous conduisant à l'intérieur du palais, Killian prit avec délicatesse mon menton dans entre ses doigts, se rapprocha très près de mon visage, ses yeux faisant des allers-retours lents avec ses iris bleutés entre mes yeux et mes lèvres. Il s'arrêta à quelques millimètres de moi quêtant mon accord. Je ne parvins pas à lui donner, mon esprit étant totalement embrumé, comme éteint, je ne répondais plus de moi-même, la seule chose que je savais c’est que je voulais qu’il efface cette distance qui nous séparait. Alors posant ma main sur sa joue je posais avec délicatesse mes lèvres sur celles de Killi, doucement pour découvrir cette nouvelle sensation et ces lèvres qui étaient douces, rassurantes A peine nos lèvres furent-elles scellées en un baiser que je ressentis des papillons puis, lorsqu’ils se furent envolés, un brasier ardent s’embrasa par lui-même en moi, me dévorant de l’intérieur. Nous aurions pu rester encore quelques instants dans notre bulle, à deux, mais nous rappelant que l'on nous attendait pour le dîner nous nous séparâmes, presque à contrecœur. Je savais que mes joues s’étaient teintées, je le sentais puisqu’elles chauffaient légèrement sous le coup de l’émotion qui m’avait envahi durant cet échange. Avant de descendre les escaliers menant au second étage puis au rez-de chaussée, Killian remit son masque pour que les autres pensionnaires ne le voient pas sans masque. Nous prîmes deux directions différentes pour ne pas éveiller les soupçons et fîmes comme de rien lorsque nous arrivâmes au même instant devant les portes de la salle à manger. Une fois arrivée plusieurs filles me posèrent des questions sur mon retard, sur mes cheveux légèrement décoiffés et sur mon sourire béat, mais Manon et Karol, qui savaient dans les grandes lignes où je me trouvais cette après-midi, les firent taire, leur répondant que ça ne les regardait pas et qu’elles auraient les réponses à leurs questions lorsque j’aurai l’envie de les leurs donner. Certaines reprirent leur repas d’autres mécontentes m’injurièrent.

Journal D'une Princesse.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant