Chapitre 24

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6 mai 2022

Deux semaines s’étaient écoulées depuis mon voyage en Argentine. Les premiers jours qui suivirent mon couronnement furent douloureux. Aujourd’hui j’étais retournée en Sicile et je gouvernais mon pays via Zoom avec des conseillers de confiance, conservant tout de même les présentations publiques en présentielle. c’est pourquoi je prévoyais de faire des allers-retours entre le palais et la Sicile. Je mettais donc en place des lois et donnait mon avis sur des affaires par appel vidéo et loin de mon peuple duquel je tentais de m’occuper au mieux. C’était légèrement difficile d’avoir un pied dans chaque nation mais je ne pouvais abandonner ni l’Argentine ni mon mari et la Sicile. Pour l’instant ce mode de fonctionnement convenait à tous les conseillers, tant que personne ne se plaint et que ça fonctionne correctement, ce système d’appels vidéos restera en vigueur pendant une durée indéterminée. J’étais en pleine lecture du  dernier projet de loi que l’on m’avait envoyé par mail lorsque je reçus un message qui allait changer ma vie, ou du moins réveiller en moi cette haine infinie que je pensais éteinte pour toujours. La police, aidée de la PTS, avait assemblé toutes les preuves pour trouver le coupable du double régicide. Plus les preuves défilaient, plus je me sentais bouillonner de l’intérieur, laissant la haine monter en moi : l’homme qu’on voyait sur les vidéos des caméras n’était autre que le roi José, celui qui allait devenir mon beau-père, celui qui avait promis de se venger mais que je n’avais pas écouté. Une vidéo attira mon attention. On y voyait le roi de Sicile de dos tirant sur mon père avec une arme de chasse, profitant qu’il soit de dos. A l’instant où mon père tombe au sol, ma mère entra et son visage fut peint d’effroi lorsqu’elle vit le corps inanimé de son mari au sol. Le roi profita de cette douleur pour la poignarder en plein cœur, l’achevant elle aussi et mon cœur rata un battement lorsque je vis la rage avec laquelle il plantait le couteau. Je fus emplie de colère face à toutes ces horreurs, il n’avait eu aucun remord, aucune pitié, il aurait pu venir me présenter ses condoléances mais rien, il n’avait pas changé d’un poil. J’avais aussi de la culpabilité de ne pas l’avoir écouté, de ne pas l’avoir pris suffisamment au sérieux. Ses paroles me revinrent en mémoire et je me maudissais de ne pas l’avoir écouté : « ou tu en paieras les conséquences». A cette pensée, je me levais et avec un cri de rage, j’envoyais tout valser autour de moi, des papiers de mon bureau jusqu’aux vêtements posés sur mon lit. Puis je m’affalais au sol, la tête dans les mains. Killian ouvrit la porte et entra avec précipitation dans ma chambre, alerté par le bruit. S’approchant de moi il me demanda la cause de ma colère. Je ne lui répondais pas et sortis sur mon balcon pour prendre un bol d’air frais qui était plus que nécessaire pur que la température redescende pour que je quitte cette pièce dans laquelle l’air me semblait irrespirable. Il me suivit et, avec une infime douceur, il vint encercler ma taille de ses bras, me collant ainsi tout contre lui. Il ne parla pas comprenant que ce n’était pas le moment opportun pour engager une conversation. Immédiatement, lorsque nos corps furent les plus proches, je me sentis en sécurité dans ses bras et je lui déballais tout, sans réfléchir, sans peser mes mots, sans contrôler ma colère et ma tristesse : ce qui s’était passé le jour du couronnement, les preuves matérielles, la vidéo…

Il m’écouta patiemment, sans m’interrompre et je le remercie encore pour ça. Le seul point que j’omis d’évoquer était le nom de son père et ses menaces lors de notre court entretien: certes le roi était un meurtrier mais ça restait quand même mon futur beau-père et je ne connaissais pas réellement les rapports qu’il entretenait avec son fils. J’estimais donc que ce n’était pas à moi de le lui dire, du moins pas maintenant, je n’avais pas la force de le détruire, de l’anéantir. Cependant Killi dut comprendre que je lui cachais quelque  chose puisqu’il me pria de faire extrêmement attention à moi et de ne pas foncer tête baissée vers le bourreau de mes parents si je venais  le retrouver. A ces mots je me retenais de lâcher un rire amer et de lui dire que le meurtrier de mes parents était à cet instant même sous le même toit que moi. Il m’expliqua que s’il m’arrivait quoi que ce soit il ne s’en remettrait pas, et il me dit une phrase dont je me souviendrais je pense toujours, que j’avais trouvée très naise sur le coup mais qui est profondément vraie

-       Si tu le tues, tu noirciras ton cœur et tu auras sa mort sur la conscience. Et surtout si tu venais à la tuer tu le laisserais gagner. Ta soif de vengeance ne sera jamais tout à fait assouvie, j’en suis profondément persuadé

-       Ne te tracasses pas je ne tenterai rien, après tout la vengeance ne résout rien n’est-ce pas ?

Il arborait un air dubitatif comme s’il doutait de la sincérité de ma réponse. Ces doutes étaient fondés et c’est parce qu’il a douté de moi qu’il m’a empêchée de commettre une action irréversible que j’aurai assurément regrettée toute ma vie : le pire   

 

Journal D'une Princesse.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant