Lettre du passé, n°3

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Les corbeaux croassaient sans répit dans cette rue sombre et désertique, à l'affût de la moindre miette qui traînerait à terre sur le sol dégradé et cabossé. Seul les quelques habitants qui vivaient ici osaient se rendre dans ces quartiers malfamés et c'était le cas de la jeune Chiyong, alors âgée de dix-huit ans à peine et déjà porteuse d'un trop lourd fardeau pour ses frêles épaules. Elle se rendait avec rapidité et discrétion jusqu'à l'appartement, ou plutôt la chambre, dans laquelle il lui était permis de loger en échange de ses services. Elle entra dans le vieux bâtiment bancal et salua timidement la grande et belle Miri qui lui accorda un tendre sourire, puis elle s'empressa de grimper l'escalier. Elle croisa à son plus grand malheur son patron qui fronça les sourcils en voyant son visage poussiéreux.

- Tu es sale, lui dit-il mécontent.

- Je suis désolé monsieur, s'inclinait-elle les épaules tremblotantes.

- Lave-toi, tu as de nombreux clients ce soir, dont un très important.

- Oui monsieur.

- Je te ferai porter une tenue différente pour lui alors avise-toi d'être la plus jolie possible. Comme la poupée que tu es.

- Oui monsieur, s'inclinait-elle à nouveau.

Oh, la jeune Chiyong était loin de faire ce métier par passion ou quelconque envie ! Fille d'une prostituée, elle avait naturellement enchaîné cette maudite branche avec le même proxénète. Elle n'était pas vraiment consciente que son métier était vu comme dégradant pour la plupart des autres humains. La prostitution lui permettait de survivre, c'est à dire d'avoir un toit qui la protégeait du froid et un repas trois fois par jour, sauf quand on lui disait d'être au régime. Pour elle, c'était un métier comme un autre. Un métier qui avait tué sa mère. Un métier qui l'avait empêcher de connaître son père. Mais un métier qui lui faisait gagner sa croûte comme on pourrait dire. Car la jeune Chiyong était persuadée que c'était la seule chose dans laquelle elle excéllait. N'ayant jamais eu la chance d'aller à l'école, on ne lui avait jamais offert la possibilité de rêver.

Après avoir enchaîné ses quelques clients, elle se prépara pour le dernier client, celui qui était « important » selon son patron. Elle se lava avec ses plus bonnes huiles parfumées puis elle tressa ses cheveux avant d'y glisser plusieurs bijoux prêtés. Elle maquilla l'entièreté de sa peau, cachant les différentes marques qu'elle pouvait avoir, et enfila la fameuse tenue spéciale. C'était une somptueuse robe de soirée en satin légèrement rosée qui faisait ressortir son jolie teint. Un fin sourire s'esquissa sur ses lèvres légèrement abîmées à la vision qu'elle renvoyait. On aurait pu croire à une jeune fille de la bonne société, distinguée et vertueuse... Puis son sourire s'effaça lorsqu'elle aperçut derrière sa personne, le reflet de sa salle de bain miteuse et de sa chambre où seul un lit où elle venait de changer les draps était placé. Quelle vie pitoyable, pensait-elle en cet instant.

Quand l'homme fut annoncé par la belle Miri, Chiyong était déjà prête à le recevoir. Ses yeux écarquillèrent face à la beauté du jeune homme de la vingtaine, ses joues s'empourprant étant peu habitué à accueillir des clients si jeune. Le jeune homme remercia la jeune femme et ferma la porte avant que ses yeux onyx ne se porte sur la jeune fille lui faisant face. Il resta silencieux un moment, se contentant de l'observer.

- M-monsieur ? L'appelait-elle timidement, perturbé par son regard silencieux.

- Je savais qu'elle vous irait à la perfection.

- Comment ?

- Ma robe. Je savais qu'elle vous irait parfaitement.

- Elle est à vous ? Écarquillait-elle les yeux.

🔹️ WAR OF HORMONE 🔹️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant