XXIV. Enfin, le fin mot de l'histoire

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XXIV

Janvier fut le dernier à pénétrer dans la petit pièce, la tête baissée.

Ils s'étaient regroupés comme un peloton de condamnés, dressés dans la poussière, là où les bouteilles leur laissait l'espace de respirer. Rivière faisait front. Il avait récupéré le bébé golem.

Personne ne mouftait.

L'autre, assis dans son fauteuil, avait joint les doigts.

« Golvan. »

La fillette releva les yeux, les souffle court.

« Comment tu...

— Si tu crois que je suis incapable de reconnaître ma propre fille dans le noir, tu te fourres le doigts dans l'œil » lâcha-t-il.

Elle soupira.

« Oui, papa.

— Je voudrais d'abord savoir pourquoi le portail qui était dans la cave n'a rien donné.

— Oui, papa.

— Sauf le vantail qui miraculeusement a fini ouvert.

— Oui, papa.

— Sachant que les clefs étaient en ta possession.

— Pardon, papa. »

Il soupira, essuya son visage d'un main pâle et nerveuse.

« Je suis désolé, Golvan » crut-on entendre dans un souffle, mais là encore, c'était probablement un songe.

Ce fut à cet instant que Rivière fit résolument un pas en avant.

« C'est vous qui avez mis ce portail temporel ? » lança-t-il d'une voix claire. Seamus sursauta de nervosité et lui fit signe de baisser d'un ton, mais l'autre l'ignora.

« En effet » souffla l'autre.

« Alors, dites-nous au moins pourquoi » déclara Rivière, sans réplique. « Dites-nous pourquoi vous nous promenez depuis si longtemps. C'était vous, pour Jackalan et Samuel ? »

Il y eut soudain un changement dans l'air. L'éclat d'un œil suffoqué brilla dans l'obscurité, en éclair de croc, et l'homme remua nerveusement. Il venait de perdre les atouts. Sa nervosité suintait dans l'espace.

« Vilebrequin... ? » souffla-t-il d'une voix faible.

Rivière fut pris de court, une seconde.

Puis :

« Oui. Oui, c'est moi. »

Un silence.

Puis il y eut un cliquetis de chaîne de lampe qu'on fouille convulsivement dans l'obscurité. Puis un déclic très net.

La lumière fut.

L'homme se tenait debout, très droit, vêtu de noir.

Son visage était aigu, obscur, rempli d'ombres dans la pâleur de l'air. Il avait des airs de corbeau ; comme un corps long et sans fin de porte-manteau, gravé de lierres invisibles, et ses doigts fins tenaient encore la chaînette d'une vieille lampe.

L'œil gris-vert était grand ouvert, effaré, et la bouche au bord des larmes fendait une figure que le temps n'avait pas tant changé.

...de l'autre côté les écailles miroitaient en étincelles rouges.

« Oui. Jackalan et Samuel, c'était moi, » lâcha Seamus d'une voix rauque.


LA THÉORIE DU CHAOS - premier axe : 𝓁ℯ𝓈  𝒸𝒽𝓇ℴ𝓃ℴ𝓃𝒶𝓊𝓉ℯ𝓈Où les histoires vivent. Découvrez maintenant