Le Jeu T1 : Alone

16/ Hasard

  La traversée du couloir fut un véritable enfer. Elle me parut aussi longue qu'une vie.

  À ses côtés. 

     Si Edwin m'avait d'abord poussé en avant, en dehors de la salle, en se moquant d'un regard, il avait ensuite repris une attitude indifférente, voir froide. 

   Il était si étrange. Un coup, il souriait, réjoui de continuer à jouer. Et l'instant d'après, il se renfermait dans son silence, dans son inexpression, morne et hargneux. 

  Je trouvais ça vraiment bizarre, mais j'avais d'autres préoccupations, comme savoir où il comptait m'emmener. Et pour voir qui ? Quel professeur voulait me voir ? Et pourquoi ? Quelle pouvait donc être cette raison, si importante, si urgente pour me faire déplacer en plein cours ? 

   Normalement, lorsqu'un enseignant souhaitait voir un élève, il attendait la fin d'un cours, ou le croisait dans un couloir. Parfois on était même appelés via des haut-parleurs disposés dans tous le lycée, qui demandaient à une liste d'élève longue comme le bras de se rendre à l'accueil, où on leur expliquait la raison de cet appel. 

   Une fois Mick et moi avions été appelés, et, comme on avait potentiellement, je dis bien "potentiellement " fait une bêtise juste avant... 

   Plus stressant tu meurs. 

 Enfin si remarque, il y a bien lui qui est beaucoup plus flippant... songeai-je en regardant Edwin du coin de l'œil. 

  Il se tenait un peu devant moi, parce qu'il marchait assez vite et ne m'attendait pas le moins du monde. 

   Il sait que je vais le suivre de toute façon. 

Je décidai, après un questionnement mental interminable (qui ? pourquoi ? comment ? Et toutes les autres questions imaginables), de... lui poser directement la question. 

   Et si il répond pas, je fais grève. 

      - Au fait... qui veut me voir ?

               ...

Silence and "emotional damage". 

  Bon, va pour la grève. 

  Je m'arrêtais avec un grand crissement de chaussures, pour bien le faire chier, et pour qu'il réalise que je ne le suivais plus, puisqu'il ne me jetait pas un regard. 

   Avec un profond soupir, et une immense lenteur, il s'arrêta aussi, prit un instant pour se pincer le nez, et se retourna vers moi. 

 Silence.

  Toujours la grève. Mon cerveau : On veut des réponses ! Y'en a marre de rien savoir ! 

     - Avance. 

 Ne bougeant pas d'un pouce, je croisais même les bras obstinément, pour bien qu'il comprenne que sans réponse, pas de mouvement. 

  Ironiquement, il me fit face également, et croisa ses bras, implacable, m'imitant volontairement. 

  Nous nous dévisagions mutuellement, attendant le premier qui abandonnerait.

  Durant notre attente, j'en profitais pour le détailler minutieusement, puisque pour une fois, il ne portait pas de capuche (et que, miracle, nous étions en pleine lumière haha.).

   La première fois que je l'avais vu, je l'avais trouvé assez imposant (sûrement le contexte), mais je remarquais que ce n'était pas tant le cas. Il était à peine plus grand que moi et même plus petit que Mick (c'est pour vous dire !) et pas vraiment costaud.